Message des Évêques du Congo à l’issue de la 53^ème Assemblée Plénière : Octobre 2024

PAROLE D’ÉVÊQUE N° 47
53^ème Assemblée Plénière de la CONFÉRENCE ÉPISCOPALE DU CONGO du 8 au 13 Octobre 2024

Au Peuple de Dieu,

Aux membres de l’Église-famille de Dieu qui est au Congo-Brazzaville,
Aux personnes consacrées,
Aux femmes et hommes de bonne volonté,

Paix à vous !

1- À l’issue de notre 53^ème Assemblée Plénière ordinaire annuelle, tenue à Brazzaville du 8 au 13 octobre 2024, sur le thème «  La vie consacrée au Congo et les défis de l’heure : la mondanité, les défis théologiques et pastoraux  », à l’horizon de l’Année Sainte 2025, Nous, Évêques du Congo-Brazzaville, vous adressons ce message d’espérance pour vous rappeler notre vocation commune à la sainteté évangélique, pour « consolider la foi, favoriser les œuvres de solidarité et de communion fraternelle au sein de l’Église et de la société » [1].

2- En route vers le jubilé sur la vie consacrée qui se tiendra à Rome les 8 et 9 Octobre de l’année prochaine, peu avant la clôture de l’Année Sainte 2025 convoquée par le Saint Père sous le thème «  Pèlerins de l’espérance sur le chemin de la paix  », l’Église-Famille de Dieu qui est au Congo-Brazzaville avait initié depuis l’an dernier une série de réflexions sur cette réalité.

3- Cette année encore, la Conférence des Évêques du Congo s’est penchée sur les relations avec les Congrégations religieuses, en vue de les approfondir et de discerner le chemin à entreprendre ensemble pour le bien de notre Église. Nous sommes pleins de gratitude envers les premiers missionnaires par qui notre pays le Congo a connu l’Évangile et un premier accès à la vie consacrée, qu’elle soit masculine ou féminine. Avec eux, la vie consacrée a fait son chemin au Congo-Brazzaville. Aujourd’hui, elle regroupe différents Ordres Religieux, Congrégations, Instituts séculiers et autres formes de vie consacrée.

4- Trois facteurs déterminants ont stimulé l’évolution de la vie consacrée au Congo, à savoir l’accession du pays à l’indépendance politique en 1960, le souffle nouveau apporté par le Concile Vatican II et le dynamisme des Évêques congolais à encourager l’éclosion des congrégations autochtones (diocésaines) pour mieux répondre aux besoins urgents de la vie ecclésiale et sociale.

5- Outre leur engagement dans la pastorale de notre Église, les personnes consacrées assurent de nombreux services qui répondent aux besoins multiples de la population, principalement dans les domaines de la santé, de l’éducation et des œuvres sociales. À côté de ces missions inestimables de bienfaisance, nous souhaitons que la vie consacrée au Congo devienne davantage un facteur déterminant pour une évangélisation en profondeur, une source d’inspiration et de confirmation des valeurs et attitudes chrétiennes au cœur même de la vie sociale, politique, économique et culturelle de notre pays.

I- SIGNIFICATION ET FONDEMENTS DE LA VIE CONSACRÉE

A/- Signification de la vie consacrée

6- « La vie consacrée, profondément enracinée dans l’exemple et dans l’enseignement du Christ Seigneur, souligne le Pape Saint Jean Paul II, est un don de Dieu le Père à son Église par l’Esprit. Grâce à la profession des conseils évangéliques, les traits caractéristiques de Jésus — chaste, pauvre et obéissant — deviennent « visibles » au milieu du monde de manière exemplaire et permanente et le regard des fidèles est appelé à revenir vers le mystère du Royaume de Dieu, qui agit déjà dans l’histoire, mais qui attend de prendre sa pleine dimension dans les cieux » [2].

7- Tous ceux qui suivent Jésus Christ aujourd’hui, en abandonnant tout pour lui, nous rappellent les Apôtres qui, répondant à son invitation, renoncèrent à tout. « Traditionnellement, on parle de la vie religieuse comme d’une apostolica vivendi forma  » [3](une forme de vie apostolique).

8- Ce don spécial qu’est la vie consacrée, est à comprendre comme une élection. Il est gratuit et non pas mérité. Il est fait par Dieu à ceux qu’il choisit librement pour le salut de son peuple.

B/- Fondements scripturaires, magistériels et théologiques

9- La vie consacrée prend sa source dans le Christ Jésus, qui est le premier consacré pour le salut du monde, par son Incarnation et par sa mort sur la croix. Cette consécration personnelle de Jésus à son Père commence dès l’incarnation et se poursuit dans sa vie publique, où Jésus se présente comme « celui que le Père a consacré et envoyé dans le monde » (Jn 10, 36) [4] .

10- Par conséquent, il sied de rappeler que par le baptême, tout chrétien est « consacré » au Christ. La consécration n’est donc pas le monopole d’une catégorie de personnes, mais la vocation de tous, ainsi que le souligne la première Lettre de Pierre : « Mais vous, vous êtes une race élue, un sacerdoce royal, une nation sainte, un peuple acquis, pour proclamer les louanges de Celui qui vous a appelés des ténèbres à son admirable lumière, vous qui jadis n’étiez pas un peuple et qui êtes maintenant le Peuple de Dieu, qui n’obteniez pas miséricorde et qui maintenant avez obtenu miséricorde » (1P 2, 9-10).

11- Voilà pourquoi tous les disciples du Christ, « [...] doivent porter témoignage du Christ sur toute la surface de la terre, et rendre raison, sur toute requête, de l’espérance qui est en eux d’une vie éternelle (cf. 1P 3,15) [5] ». Par conséquent, il serait convenable de parler de vies consacrées. La première, reçue par le baptême, est celle de tous, appelés à animer les réalités temporelles par l’esprit évangélique. La seconde, qui anticipe les réalités d’en haut par la profession et la pratique des conseils évangéliques (obéissance, pauvreté et chasteté), concerne les personnes consacrées.

12- Pour ce qui est de la vocation à la Vie religieuse comme consécration spécifique, l’Église enseigne que le don de la vocation religieuse s’enracine dans la grâce du sacrement de baptême, mais il n’est pas donné à tous les baptisés. « Répondant à cet appel accompagné par un attrait intérieur, la personne appelée se confie à l’amour de Dieu qui veut l’avoir à son seul service et elle se consacre totalement à lui et à son dessein de salut (cf. Cor 7,32-34) » [6] .

13- C’est ce que le Pape Benoit XVI dans sa lettre apostolique en forme de Motu proprio, Porta Fidei, relève clairement en ces termes : « Par la foi, des hommes et des femmes ont consacré leur vie au Christ, laissant tout pour vivre (...) l’obéissance, la pauvreté et la chasteté, (,..) » [7]

14- De façon spécifique, le propre de la vie consacrée est de prendre pour base les conseils évangéliques de pauvreté, chasteté et obéissance , à partir desquels s’est développée providentiellement « une admirable variété de communautés religieuses qui contribuèrent beaucoup à ce que l’Église non seulement fût apte à toute bonne œuvre (2Tm 3,17) et prête pour l’exercice de son ministère en vue de l’édification du Corps du Christ (cf. Ep 4,12), mais encore apparût embellie des dons variés de ses enfants comme une épouse parée pour son époux (cf. Ap 21,2) et que par elle fussent manifestées les ressources multiples de la sagesse de Dieu (cf. Ep 3,10) »9.

II - VIE CONSACRÉE ET MISSION AU CONGO

A/- Vie consacrée et défis locaux

15- Comme nous l’avons souligné, la vie consacrée au Congo demeure une réalité très riche. Toutefois, elle reste encore un grand défi, eu égard à un contexte culturel particulier marqué par des interactions complexes entre traditions culturelles locales et conseils évangéliques, entre les exigences de la vie consacrée, d’un côté, et l’idée visiblement antagonique d’une vie réussie en Afrique subsaharienne, de l’autre.

16- En effet, l’appel et l’engagement à la pauvreté, à la chasteté et à l’obéissance constituent aux yeux de nombreux Africains de moins en moins un idéal viable, dans un contexte d’extrême pauvreté et d’obligation culturelle à transmettre et à promouvoir la vie reçue à la naissance. Comment expliquer autrement que les conseils évangéliques intéressent peu de fidèles congolais, surtout masculins, qui peinent manifestement à y voir un projet de vie pour eux-mêmes ou - lorsque c’est le cas - sont mus par des motifs qui sont aux antipodes de la vie consacrée : ascension sociale, abondance, pouvoir, voire domination ?

17- Il est donc urgent de formuler une articulation renouvelée des conseils évangéliques susceptible de susciter une attractivité nouvelle pour la vie consacrée en contexte congolais, où l‘idéal de vie communautaire, solidaire et partagée est profondément enraciné dans la culture, mais est en même temps remis en cause par les défis de la pauvreté, de l’obligation de fécondité et de l’aspiration à l’accomplissement de soi et des siens, d’une part, et, par les contraintes de l’économie monétaire, du numérique et de la mondanité, d’autre part.

18- Toutefois, l’engagement profond et total au service de Dieu et de l’Église dans la vie consacrée n’est pas d’abord une vocation à renoncer aux biens matériels et à la vie familiale ; elle est avant tout l’acceptation d’une existence centrée sur le don de soi à Dieu, à la communauté, à l’Église et aux autres. Dans le contexte congolais aujourd’hui, cette forme de vie se heurte à de nombreux obstacles sociopolitiques, économiques et culturels, qui influencent fortement l’expérience des personnes consacrées, tant dans leur vie communautaire que dans leur témoignage quotidien.

19- En effet, les jeunes qui frappent à la porte des congrégations religieuses arrivent aussi avec leur histoire. Il appartient donc aux aîné(e)s de leur montrer avec sagesse et patience la voie du don total dans la persévérance. L’enthousiasme des plus jeunes doit être encouragé et accompagné. C’est dans cet espace de rencontre que le discernement et la vie fraternelle par le dialogue les aideront à grandir et à faire de bons choix.

20- Nous avons besoin des vocations pour témoigner du Royaume de Dieu. Aujourd’hui, plus que jamais, nous sentons la nécessité de bâtir une culture de la promotion des vocations. La pastorale des jeunes doit aussi avoir le souci de favoriser les vocations religieuses pour un avenir radieux de la communauté chrétienne et de la société.

21- Avec la mondialisation et le développement exponentiel des technologies de l’information et de la communication, de nombreuses idéologies et théories mettent parfois à mal l’enseignement de l’Église et la vocation de certains jeunes à la vie consacrée. Cette situation nous interpelle. L’Église doit aider les jeunes à prendre en main leur responsabilité et à s’engager comme chrétiens, témoins du Christ ressuscité.

B/- Vie consacrée et défis du monde moderne

22- Nous devons faire mieux dans ce monde en mutation. Autrement dit, il nous faut laisser resplendir la force rénovatrice de l’espérance, en affrontant les défis de l’heure à la lumière de l’Évangile. En effet, les mondanités actuelles doivent trouver dans la vie consacrée le lieu de leur déroute. La vie consacrée doit être le repoussement du vieillissement charismatique et spirituel que dénonce le Pape François, la décrivant comme une sorte de connaissance qui réduit la vie consacrée à une coquille où se renferme une Sequela Christi (suite du Christ) sans renonciation, une prière sans rencontre, une vie fraternelle sans communion, une obéissance sans confiance et une charité sans transcendance.

23- La protection des mineurs et des adultes vulnérables constitue également un champ pastoral sur lequel se penchent de plus en plus les congrégations religieuses du Congo pour donner une réponse adéquate aux victimes des abus de conscience, de pouvoir et d’ordre sexuel.7 Cette réponse est élaborée conformément aux lignes directrices proposées par les documents du Magistère et de l’Église locale.

24- Il résulte de ces lignes directrices la nécessité impérieuse pour notre Église particulière de mettre en place un organe interdiocésain chargé d’accompagner et de résorber les situations de détresse humaine en ce domaine, sans oublier l’érection d’une cellule d’écoute, travaillant en étroite collaboration avec les tribunaux ecclésiastiques ainsi que les pouvoirs publics.

III - VIE CONSACRÉE ET DÉVELOPPEMENT INTÉGRAL DE L’HOMME

25- Depuis toujours, des femmes et des hommes, dociles à l’appel du Père et au murmure de l’Esprit, choisissent librement la voie d’une Sequela Christi particulière, pour se donner au Seigneur avec un cœur ‘sans partage’ (cf. 1 Co 7,34). Ainsi, ils manifestent la nature eschatologique et l’authenticité évangélique de l’Église, en travaillant de l’intérieur au renouvellement de la société. Dans ce sens, il est juste de reconnaître que la vie consacrée est une chance pour l’Église- Famille de Dieu qui est au Congo.

26- Au regard de leur implication dans le domaine de l’éducation, de la santé, de l’accompagnement des personnes, du développement rural et de l’action sociale, les congrégations religieuses jouent un rôle déterminant dans la société congolaise. Cependant ce rôle doit être renforcé étant donné le contexte de crise aigüe dans lequel vit notre société, afin que la vie consacrée soit véritablement un ferment de transformation sociale.

27- La vie consacrée a, en effet, pour mission l’évangélisation et la promotion de la vie humaine. Il s’agit d’un engagement fidèle à la mission reçue de Jésus, tel qu’il est écrit en Matthieu 10,7-8 : « Sur votre route, proclamez que le royaume des Cieux est tout proche. Guérissez les malades, ressuscitez les morts, purifiez les lépreux, expulsez les démons. Vous avez reçu gratuitement : donnez gratuitement ».

IV- EXHORTATIONS ET APPELS

28- Au terme de ce message, nous vous rappelons, avec le Pape François, l’appel pressant de l’Église à la sainteté dans le monde actuel : « En effet, le Seigneur a élu chacun d’entre nous pour que nous soyons ‘saints et immaculés en sa présence, dans l’amour ’ (Ep 1, 4) » [8] .

A/- Aux personnes consacrées

29- Témoins vivants de l’Évangile au milieu de la société, nous vous invitons à trouver votre joie dans la fidélité au Christ en vivant pleinement les vœux de chasteté, de pauvreté et d’obéissance. Dans un monde marqué par le matérialisme, l’individualisme et une vision fétichiste de la réalité, votre témoignage de vie est crucial pour montrer une belle voie alternative reposant sur les valeurs évangéliques. Veillez au service des plus faibles auxquels le Christ s’identifie. Engagez-vous avec toujours plus de zèle dans les œuvres de charité, d’éducation, de santé, de justice et de paix dans un contexte où la pauvreté, la violence et les inégalités font rage. Travaillez dans l’unité pour promouvoir la communion de vos différentes familles religieuses dans le but de bâtir une Église plus fraternelle, plus solidaire et plus dynamique.

B/- Aux prêtres et aux diacres

30- Comme pasteurs du peuple de Dieu, vous jouez un rôle essentiel dans l’accompagnement spirituel, le discernement vocationnel et le cheminement de foi des jeunes. Soyez donc, dans l’exercice de votre ministère sacerdotal et diaconal, des exemples vivants de la sainteté à laquelle nous sommes tous appelés. Habité, en effet, par le désir de proclamer l’Évangile par toute sa vie, Saint Charles de Foucault disait en substance : je voudrais être assez bon pour qu’on dise : si tel est le serviteur, comment donc est le maître ? Puissiez-vous, chers prêtres, chers diacres, dans la simplicité et l’humilité, laisser transparaître par toute votre vie la bonté de Dieu dont vous êtes invités à être des reflets. Soyez proches des jeunes pour prendre connaissance de leurs défis quotidiens afin de mieux les orienter et les encourager à s’engager davantage dans l’Église. En votre qualité de pasteurs soucieux du peuple de Dieu, engagez-vous dans la promotion de la justice sociale et la lutte contre les antivaleurs.

C/- Aux familles

31- Première école de la vie, les familles sont des lieux où les vocations naissent et commencent à se développer. Prenez davantage conscience de cette mission, éduquez les enfants dans la foi de l’Église, en cultivant un environnement familial où sont vécues les valeurs chrétiennes. Faites de vos maisons des lieux de prière, d’amour et de partage. Encouragez également les enfants qui expriment le désir de se consacrer à Dieu.

D/ Aux enfants et aux jeunes

32- Vous, les enfants et les jeunes, vous constituez une source inestimable de vie et de vitalité. Vous représentez la clé de l’avenir, en ce que vous êtes un facteur crucial pour le développement et l’épanouissement du pays. Évoquant la jeunesse africaine, talentueuse et créative, le Pape Benoît XVI écrivait dans Africae Munus : « Cette jeunesse est un don et un trésor de Dieu dont toute l’Église est reconnaissante au Maître de la vie. Il faut aimer cette jeunesse, l’estimer et la respecter » [9] . En dépit de quelques « aventures ambiguës » qui vous caractérisent [10], vous êtes, comme le soulignait encore le Pape Benoît XVI dans le Journal du Vatican, une jeunesse qui aspire profondément aux valeurs authentiques africaines qui trouvent leur plénitude dans le Christ Jésus. Vous êtes pleins d’enthousiasme, d’espérance, d’humour et de joie, vous incarnez la fraîcheur du « oui » à la vie en Afrique [11] . Aussi, Nous, vos Évêques, voulons vous réitérer l’appel qu’adressait Saint Jean Paul II aux jeunes du monde entier le dimanche des rameaux 2002 : « Jeunes du nouveau millénaire, faites bon usage de votre liberté ! Ne gâchez pas la grande dignité de fils de Dieu qui vous a été donnée ! Soumettez-vous uniquement au Christ, qui désire votre bien et votre joie authentique (cf. Mt 23, 8-10) ; à Lui qui désire que vous soyez des hommes et des femmes pleinement heureux et accomplis ! ». Chers jeunes et chers enfants, nous ne vous le dirons jamais assez : vous représentez l’avenir de notre Église et de notre pays. Si vous accueillez le Christ avec son vrai visage, vous le verrez comme une réponse convaincante et vous serez capables de recevoir son message, même s’il est exigeant et marqué par la Croix. Soyez disposés à entendre l’appel de Dieu dans votre vie, que ce soit à travers la vie consacrée, le sacerdoce ou le mariage chrétien. Prenez soin de nourrir votre foi en participant activement aux sacrements et aux exercices spirituels qui vous sont proposés.

E/ - Aux formatrices et aux formateurs

33- À l’instar du prêtre Eli (cf. 1Sam 2, 28), vous, formatrices et formateurs, êtes invités à aider les candidats au sacerdoce et à la vie consacrée à être dans de meilleures dispositions pour écouter l’appel du Seigneur. Assurez-vous que les candidats bénéficient d’une formation intégrale solide et équilibrée pour être capables de relever les défis modernes avec sagesse et foi. Disposez du temps pour accompagner personnellement les candidats qui vous sont confiés. Pensez à votre formation permanente, car celui qui cesse d’apprendre doit aussi arrêter d’enseigner. « L’homme contemporain écoute plus volontiers les témoins que les maîtres, ou s’il écoute les maîtres, c’est parce qu’ils sont des témoins. [.] Dans un tel contexte, on comprend l’importance d’une vie qui résonne vraiment de l’Évangile ! » [12] .

F/- Aux séminaristes et aux novices

34- Appelés à être consacrés au bout de votre formation, un appel pressant vous est lancé afin d’imiter le Christ, modèle du consacré. Votre parcours, à l’écoute de vos formateurs (trices), sera un enrichissement spirituel et vocationnel, si vous disposez vos cœurs à l’obéissance comme oblation concrète de vos vies. Par l’oraison, la lectio divina, la prière des heures, laissez-vous façonner à l’image des grands priants de la Bible et de la Tradition vivante de l’Église.

G/- Aux autorités publiques

35- Le Congo, notre pays, jouit du privilège d’avoir des dirigeants, qui, dans leur grande majorité, sont des personnes consacrées par le baptême. Être baptisé, c’est être configuré au Christ-Sauveur, venu dans le monde pour inaugurer le règne de son Père, règne de paix, de justice et d’amour, règne de fraternité et de solidarité. C’est pourquoi, Nous, Évêques du Congo, attendons de vous les dirigeants congolais chrétiens de vous mettre en première ligne pour un service public de qualité et pour imprimer au reste de la société la marche à suivre en vue de la transformation de notre pays et l’amélioration des conditions de vie de nos populations. À l’occasion de cet appel, nous ne voulons pas vous cacher notre vive préoccupation sur la situation de notre pays, eu égard au contexte particulièrement délétère dans lequel s’est déroulée notre assemblée plénière en ce mois d’octobre, rythmé par des pénuries de toutes sortes sur fond de revendications sociales tous azimuts. Nous vous exhortons à vous souvenir de votre baptême et à donner le meilleur de vous-mêmes pour ce pays qui vous a tant donné et pour vos compatriotes qui attendent de vous des solutions concrètes pour leur vie. Le Seigneur Jésus, Juge suprême, vous en sera reconnaissant, Lui qui s’est identifié au plus petit de vos frères et sœurs dans le besoin (cf. Mt 25, 31-46).

H / Aux hommes et aux femmes de bonne volonté

36- À vous toutes et vous tous pour qui ce pays compte, nous adressons à nouveau ces mots de solidarité prononcés par le Concile Vatican II : « Les joies et les espoirs, les tristesses et les angoisses des hommes de ce temps, des pauvres surtout et de tous ceux qui souffrent, sont aussi les joies et les espoirs, les tristesses et les angoisses des disciples du Christ, et il n’est rien de vraiment humain qui ne trouve écho dans leur cœur » (Gaudium et spes 1). En partageant les détresses qui blessent dramatiquement le quotidien de nombreux compatriotes, nous sommes habités d’une conviction et déterminés dans un engagement. D’une part, au nom de l’espérance, nous considérons que la situation de détresse actuelle n’est pas une fatalité. D’autre part, la pratique des conseils évangéliques d’obéissance, de chasteté et de pauvreté sont une manière de témoigner que les pulsions fondamentales de la personne humaine peuvent être assumées aujourd’hui dans le sens de la restauration de sa dignité et de celle de ses semblables. Nous persévérons, par ailleurs, dans l’écoute des messages que le peuple du Congo nous délivre de telle sorte que les différents savoir-faire des Congrégations religieuses de notre Église restent au service des femmes, des hommes, des jeunes et des enfants avec qui nous avons cette terre en partage. Venez ! Venez avec nous pour relever ensemble le défi d’une jeunesse mieux éduquée, d’un environnement plus respecté, d’une pensée plus ouverte à la volonté de Dieu.

VIII - CONCLUSION

37- Au terme de nos travaux, au cours desquels la question de la vie consacrée a été abordée et approfondie avec beaucoup d’intérêt, Nous, vos Évêques et vos Pasteurs, vous exhortons, Église-Famille de Dieu qui est au Congo, à être signes visibles de l’amour de Dieu et de l’Évangile au cœur d’une société en quête de repères. Nous savons que la vie consacrée au Congo se trouve confrontée à de nombreux défis qui sont amplifiés par les réalités sociopolitiques et économiques du pays et par l’évolution rapide de la société. Cependant, malgré ces difficultés, elle reste un témoignage vigoureux et un don précieux pour notre Église et notre société.

38- Pour surmonter les défis de la vie consacrée, Nous, vos Évêques, sommes disposés à repenser avec vous tous les modalités de formation et d’investissement dans l’éducation, dans la santé et dans les autres œuvres sociales afin de vous soutenir davantage dans vos missions pastorales et sociales. Ne vous laissez donc pas emprisonner dans les espaces contigus des mondanités modernes et leurs lots d’idéologies contraires à la Parole de Dieu et à la Doctrine Sociale de l’Église.

39- Que la Vierge Marie, Notre Dame du Congo, nous assiste et nous accompagne par sa prière constante, afin que nous parvenions tous à relever ensemble les défis de notre consécration baptismale et religieuse. Et que Dieu le Père, le Fils et le Saint Esprit vous bénisse toutes et tous !

Fait à Brazzaville, le 13 Octobre 2024

 

Les Archevêques et Évêques du Congo