CONFÉRENCE ÉPISCOPALE DU CONGO


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LA QUESTION SOCIALE : LUTTE CONTRE LA PAUVRETÉ - AVRIL 2012

samedi 26 septembre 2020

PAROLES D’ÉVÊQUES N° 34
40ÈME ASSEMBLÉE PLÉNIÈRE DE LA CEC
DU LUNDI 16 AU DIMANCHE 22 AVRIL 2012 À BRAZZAVILLE

 

Chers Filles et Fils du Congo !
Vous tous, hommes et femmes de bonne volonté !

1. Au terme de la quarantième (40ème) Assemblée Plénière de notre Conférence Épiscopale qui vient de se tenir à Brazzaville, du lundi 16 au dimanche 22 avril 2012, sur le thème : «  La question sociale : lutte contre la pauvreté  », Nous, vos Évêques et Pasteurs, nous réjouissons de vous adresser ce Message de Paix et d’Espérance dans le Christ-Ressuscité.

Le choix du thème

2. Nous appuyant sur la vocation même de l’Église, nous avions affirmé clairement dans notre Message de 2007 que l’Église s’intéresse à la question sociale et à la lutte contre la pauvreté, parce que « Les joies et les espoirs, les tristesses et les angoisses des hommes de ce temps, des pauvres surtout et de tous ceux qui souffrent, sont aussi les joies et les espoirs, les tristesses et les angoisses des disciples du Christ, et il n’est rien de vraiment humain qui ne trouve écho dans leur cœur » (Concile Vatican II, Gaudium et spes, n° 1).

3. Sensible aux questions de lutte contre la pauvreté dans notre pays et désireuse d’apporter sa contribution à ce combat, la Conférence Épiscopale, au terme de sa plénière de l’année 2011 avait décidé d’approfondir sa réflexion sur les situations de pauvreté au sein de notre société.

Repartir de la Parole de Dieu et de la tradition de l’Église

4. Dans l’Ancien Testament, la pauvreté est considérée comme l’expression d’une injustice sociale, c’est-à-dire les riches qui écrasent les pauvres. Le Dieu d’Israël qui a déjà pris position pour les pauvres avec la libération du peuple hébreu donne comme consigne à son peuple : « Qu’il n’y ait donc pas de pauvre chez toi » (Dt 15,4) et, d’autre part, il fait entendre sa voix par les prophètes. Le prophète Amos est souvent pris en exemple dans cette lutte contre les injustices sociales : « Écoutez cette parole que je profère contre vous (...). Eh bien, puisque vous piétinez le faible et vous prélevez sur lui un tribut de froment, ces maisons en pierre de taille que vous avez bâties, vous n’y habiterez pas (...) car je sais combien sont nombreux vos crimes » (Amos 5,1.11).

5. Si dans l’Ancien Testament le discours prophétique interpelle les riches parce qu’ils exploitent les pauvres, l’interpellation du Nouveau Testament sur ce point, concerne l’indifférence et le manque de charité vis-à-vis du pauvre auquel s’identifie le Christ : « En vérité, je vous le dis, dans la mesure où vous ne l’avez pas fait à l’un de ces plus petits, à moi non plus vous ne l’avez pas fait » (Mt 25,45).

6. A ce propos, dans son Message de Carême 2012, le Pape Benoît XVI nous invite à nous intéresser à l’autre et à « ouvrir les yeux sur ses nécessités, sans faire passer avant tout nos intérêts et nos préoccupations personnels, et en évitant de nous laisser étouffer par la richesse matérielle et la satiété (...).

L’Écriture Sainte met en garde contre le danger d’avoir le cœur endurci par une sorte d’anesthésie spirituelle qui rend aveugle aux souffrances des autres ».

L’Église, de par l’Écriture et la tradition, est tenue de faire le «  choix préférentiel pour les pauvres  ».

Les stratégies de réduction de la pauvreté.

7. Être pauvre signifie certes manquer de revenus suffisants pour satisfaire ses besoins de base, mais pas uniquement. La pauvreté est définie également comme la privation des droits fondamentaux à la santé, à l’éducation, au développement et à la protection sociale. Un représentant de l’Unicef au Congo déclarait récemment : « les planificateurs nationaux accordaient la priorité aux questions économiques au détriment des questions sociales. L’intégration récente de la protection sociale dans le Document Stratégique de Réduction de la Pauvreté (DSRP) représente donc une opportunité majeure pour attirer l’attention sur les catégories les plus vulnérables et lutter contre les inégalités sociales ».

8. Nous encourageons les efforts des pouvoirs publics dans la stratégie pour la croissance, l’emploi et la réduction de la pauvreté, en prenant en compte non seulement les questions économiques, mais aussi la protection et la sécurité sociales. Il y a un double objectif à atteindre : fournir des conditions de vie adéquates aux populations et combattre les attitudes contraires à la solidarité. Il en est de même du secteur agropastoral qui concerne une bonne partie de la population.

9. Il est un autre élément important dans ce combat contre la pauvreté : l’éradication de la misère requiert non seulement l’assistance, dont on ne peut que souhaiter le renforcement, mais aussi la prise de conscience de l’importance de la lutte contre la corruption et la promotion de la bonne gouvernance. Les pouvoirs publics devraient par exemple mieux appuyer l’Observatoire anti-corruption dont la vocation est de lutter contre les antivaleurs en vue du bien-être social.

10. Hommes politiques, hommes d’Église et société civile, chacun selon ses compétences, la lutte contre la pauvreté doit s’inscrire dans le changement de nos mentalités, de nos modes de vie. Dans le contexte qui est le nôtre, les antivaleurs qui ont pour noms : injustice, fraude, népotisme, complaisance, mauvaise gestion du bien commun, corruption, concussion, impunité... déjà dénoncées au plus haut niveau de l’État, sont autant de facteurs qui aggravent la pauvreté. Ainsi :

- comment comprendre que certains projets publics dûment financés par l’État ne soient jamais réalisés ?

- comment comprendre que des fonctionnaires de l’État fassent payer les services officiellement déclarés gratuits ?

- comment comprendre que les travaux dirigés (TD), en semaine comme le dimanche, désormais payés par les parents, deviennent plus importants que les cours eux-mêmes ?

- comment comprendre qu’un retraité, pour toucher sa pension doive céder une partie de son dû ?

11. Face à ces nombreuses pratiques, pour le moins déplorables, nous sommes tous invités, frères et sœurs en Christ, à un sursaut moral qui passe par une conversion authentique, comme nous le dit le Pape dans l’Exhortation du second synode sur l’Afrique : « Le Christ appelle constamment à la métanoia, à la conversion. Les chrétiens sont marqués par l’esprit et les habitudes de leur époque et de leur milieu. Mais par la grâce de leur baptême, ils sont invités à renoncer aux tendances nocives dominantes et à aller à contre-courant » (Africae Munus, n° 32).

12. Le tableau de la pauvreté peut être étendu indéfiniment, nombre de personnes étant exposées au désespoir, au piège de la drogue, à la solitude du grand âge ou de la maladie, à la discrimination sociale, aux accusations de sorcellerie...

Là aussi, État comme société civile, nous avons tous un grand rôle à jouer.

Peuple de Dieu, hommes et femmes de bonne volonté

13. Le message social de l’évangile n’est pas une théorie, mais avant tout un fondement et une motivation pour l’action. Plus que par sa cohérence et sa logique internes, il ne peut être vraiment crédible que par le témoignage des œuvres.

C’est de cette conviction que découle l’option préférentielle de l’Église pour les pauvres, qui ne veut être ni exclusive ni discriminatoire à l’égard des autres.

14. Face au drame du 4 mars 2012, l’Église catholique au Congo s’unit au message du Saint-Père, le Pape Benoît XVI et exprime sa compassion à tous ceux qui, de près ou de loin, sont touchés par cette tragédie. Puissent les responsables de notre pays intensifier leur action, pour soulager les souffrances de toutes les victimes de cette catastrophe et pour que la justice et la vérité s’établissent dans la paix.

15. Bien-aimés de Dieu, accueillir le pauvre, c’est accueillir Dieu Lui- même. Dans le message de carême 2012, on peut lire : « Le fruit de notre accueil du Christ est une vie selon les trois vertus théologales : nous approcher du Seigneur avec un cœur sincère et dans la plénitude de la foi, garder indéfectible l’espérance et exercer avec nos frères la charité  ». C’est ce à quoi nous serons invités pendant l’Année de la Foi (octobre 2012-novembre 2013) proclamée par le Pape Benoît XVI à travers le Motu Proprio (Lettre Apostolique) : « Porta Fidei ».

16. Que cette Année de la Foi, à venir, nous fasse comprendre que « de nos jours aussi, la foi est un don à redécouvrir, à cultiver et dont il faut témoigner, afin que le Seigneur accorde à chacun de nous de vivre la beauté et la joie d’être chrétiens » (cf. Note avec indications pastorales pour l’Année de la Foi, §2).

Prière

- Fais, Seigneur que nous entendions toujours ta Parole : «  N’ayez pas peur ! J’ai vaincu le monde. Je suis avec vous tous les jours jusqu’à la fin du monde  ».

- Seigneur, augmente notre foi, fortifie notre espérance et déploie notre force d’aimer, pour que nous soyons des artisans infatigables de la justice, de la solidarité et de la paix et que l’intercession de la bienheureuse Vierge Marie, notre Mère du ciel, nous soutienne dans cette lourde mission... Amen !

Fait à Brazzaville, le 22 avril 2012

 

Les Évêques du Congo

 

 

 


 
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