JEUNESSE CONGOLAISE ET IDENTITÉ CHRÉTIENNE : DÉCEMBRE 2018
vendredi 9 octobre 2020
PAROLES D’ÉVÊQUE N°41
47ÈME ASSEMBLÉE PLÉNIÈRE DE LA CEC
DU LUNDI 26 NOVEMBRE AU DIMANCHE 02 DÉCEMBRE 2018 À BRAZZAVILLE
Ne dis pas : je suis un enfant. Tu iras vers tous ceux à qui je t’enverrai
(Jr 1, 7)
Préambule
1. Peuple de Dieu, membre de l’Église-famille qui est au Congo, paix, amour et joie dans le Christ !
À l’issue de notre 47ème Assemblée plénière, tenue du 26 novembre au 02 décembre 2018, au Centre Inter-diocésain des Œuvres (CIO), sur le thème : « jeunesse congolaise et identité chrétienne », nous vous adressons ce message, fruit de notre réflexion et méditation, pour le bien de la jeunesse congolaise et de tout le Peuple de Dieu que nous formons en Jésus-Christ, notre Seigneur et Sauveur, qui continuellement nous appelle à le suivre et à le témoigner par notre foi et notre engagement chrétien.
I. CONTEXTE SOCIOCULTUREL ET RELIGIEUX
2. Filles et fils bien aimés, il vient de se tenir à Rome, du 03 au 28 octobre 2018, la 15ème Assemblée Générale du synode des Évêques sur le thème : « Les jeunes, la foi, et le discernement vocationnel ». Ce thème qui a été au cœur de la réflexion des Évêques du monde entier, trois semaines durant, a aussi fait l’objet de la méditation et du travail des Évêques du Congo, vos Pasteurs, réunis en Assemblée plénière. Il était question, à la suite des Pères synodaux, d’approfondir la réflexion sur la question de la jeunesse Congolaise (et plus précisément de l’identité des jeunes chrétiens).
3. Plusieurs raisons nous ont poussés au choix de ce thème : du point de vue démographique, le Congo est un pays majoritairement jeune (environ 60 à 70% de la population). Du point de vue socioculturel, la jeunesse, bien qu’étant la couche la plus nombreuse, est paradoxalement une couche marginalisée, vulnérable et sacrifiée, victime des maux de notre société : chômage, délinquance, banditisme, mépris, isolement, exclusion, etc.
4. Du point de vue religieux, cette même jeunesse est désorientée à cause des idéologies diffusées par un certain nombre de mouvements religieux et ésotériques qui manipulent, désaxent et fanatisent la jeunesse pour des intérêts inavoués. Face à cet état de faits, nombreux demeurent perplexes, mêmes perturbés et s’interrogent sur leur foi et leur identité chrétienne. Animés par le souci pastoral, chers jeunes, que nous avons voulu réfléchir en profondeur sur cette question qui préoccupe l’Église universelle et plus particulièrement notre Église locale, afin de vous édifier et vous affermir dans votre foi chrétienne et catholique. Ainsi, avec le Pape François, nous vous disons : « Cher jeune, l’Église désire se mettre à l’écoute de ta voix, de ta sensibilité, de ta foi, mais aussi de tes doutes » (Pape François, Lettre aux jeunes, à l’occasion de la présentation du document préparatoire du synode, du 13 janvier 2017).
5. Dans nos différents messages, nous n’avons jamais cessé de parler aux jeunes, nos interlocuteurs préférés, de ce qu’ils sont pour l’Église et la société. Déjà en 1986, dans notre message, Le chrétien messager de la paix, nous alertions l’opinion nationale sur les problèmes qui frapperaient notre jeunesse. Nous soulignions : « Le plus grand traumatisme social subi par notre pays depuis les dernières années de colonisation est dû à l’exode et à l’extravagante croissance de nos villes : immenses quartiers insalubres, activité économique insuffisante pour assurer l’embauche de la main d’œuvre disponible, structures familiales ébranlées dans leur fondement, débordées par une jeunesse très largement majoritaire, déracinées et prises au piège de ces villes qui ne parviennent à leur assurer ni les structures scolaires, ni l’avenir professionnel, ni le niveau de vie, ni les loisirs auxquels elle aspire. Ainsi, s’accumulent des réserves de frustrations qui pourraient, un jour, dégénérer en violences extrêmes » (n. 32).
6. Notre premier souci, au cours de cette 47ème Assemblée Plénière, a été de nous mettre à votre écoute. Attentivement, nous avons suivi les communications des experts et les témoignages de certains d’entre vous. Des témoignages émouvants et frappants qui nous poussent à vous adresser ce message d’espérance, pour vous encourager à affronter la vie avec optimisme et vous permettre aussi de rester fidèles à votre foi, gage de votre vie : « Heureux l’homme qui met sa foi dans le Seigneur… » (Ps. 1, 2-3).
7. Par cette écoute, nous avons voulu nous faire davantage proches de vous, pour vous apporter la « joie de l’évangile » et la nouveauté de Dieu dans vos vies, ce Dieu qui vous aime tant et vous invite à l’aimer en retour et à témoigner de lui dans vos milieux de vie. Bref, le contexte dans lequel nous vivons a inspiré nos assises et ce message, pour qu’au-delà de tous vos problèmes, vous ayez, chers jeunes, le regard fixé sur Jésus (Hb 12, 2). Il est l’unique capable de vous conduire sur le chemin du bonheur, l’unique qui peut vous orienter et l’unique Maître et Sauveur que vous devez avoir et à qui vous devez vous accrocher ; tous les autres étant « des maîtres d’illusions » ou tout simplement de « faux maîtres ».
II. DÉFIS DE LA JEUNESSE : ÉDUCATION, FORMATION, ENTREPRENARIAT ET ENGAGEMENT ÉTHIQUE
8. Chers jeunes, vous êtes une préoccupation pour notre société et notre Église. Nous avons à vous porter plus d’attention et de soins, car vous constituez, non seulement l’avenir mais aussi le présent de notre société et de notre Église. Cela exige un travail de dialogue avec le plus grand nombre d’entre vous et une révision sans cesse des possibilités d’une bonne éducation, d’une formation intégrale et d’une insertion socioprofessionnelle. Le triste tableau que présente notre continent, comme notre pays, du point de vue politique, socio-économique et financier, appelle à travailler pour une authentique éducation et la formation à la culture des valeurs de non-violence, de fraternité, de justice, de paix et d’unité, pour que l’avenir des générations soit prometteur et produise de bons fruits.
9. Le tableau dressé par nous, évêques du Congo, dans notre Message sur les anti-valeurs, montre bien l’urgence de réfléchir davantage et de travailler encore plus sur la question de l’éducation et de la formation de la jeunesse. C’est dire que le combat contre les antivaleurs ne sera possible que grâce à notre engagement, pour une vraie éducation de la jeunesse.
III. MAGISTÈRE DE L’ÉGLISE SUR LA JEUNESSE
10. Le Concile Vatican II (1962-1965), exhortait les jeunes à être prêts à construire une société qui « respecte la dignité, la liberté, le droit des personnes ». (Message du Concile Vatican II aux jeunes). Dans ce sens, vous jeunes devriez refuser de donner libre cours à l’instinct de violence et de haine qui engendre les guerres et leur cortège de misères. Un moment important dans cet enseignement du magistère universel sur les jeunes est la lettre adressée par le Pape Jean Paul II aux jeunes, le dimanche des Rameaux 1985, année qui avait été décrétée par les Nations Unies « année internationale de la jeunesse ». Le Pape attirait alors l’attention sur diverses problématiques de notre monde d’aujourd’hui liées à la jeunesse. Il relevait déjà que l’étape de la jeunesse était une grande richesse pour chaque Homme, une richesse unique. C’est à cette étape de la vie qu’on se pose beaucoup de questions sur son devenir. Elle peut aussi être l’étape où l’on met les assises en Dieu ; Lui seul, en effet, est le fondement des valeurs, Lui seul donne un sens décisif à toute existence.
11. À cette étape de la vie, vous jeunes êtes appelés à revisiter les fondements de la morale basés sur les commandements de Dieu inscrits dans la conscience et l’Évangile. C’est ainsi qu’on acquiert une certaine droiture de vie. Cette droiture de vie, c’est ce que nous appelons vertu. Celle-ci, écrit le Pape François, dans Amoris Laetitia, « est une conviction transformée en un principe intérieur et stable d’action. La vie vertueuse, par conséquent, construit la liberté, la fortifie et l’éduque, en évitant que la personne devienne esclave de tendances compulsives déshumanisantes et antisociales » (AL, n. 267). C’est pendant cette étape de la jeunesse qu’on cherche à bâtir sa vie sur des principes sains, pour devenir, à l’âge adulte, une personne consciente, fidèle aux principes, digne de confiance, crédible (Jean-Paul II, Dilecti Amici, n. 7). C’est aussi à cette étape de la vie que vous jeunes pourriez découvrir et mûrir votre vocation. Pour tout cela, il faut une bonne ouverture de votre cœur à Dieu.
12. Dans l’Exhortation apostolique post-synodale Africae Munus, le Pape Benoît XVI, parlant des jeunes, notait avant tout qu’en Afrique, ils sont la majorité de la population et que la jeunesse est un don et un trésor de Dieu dont l’Église doit être reconnaissante au Maître de la vie. Cette jeunesse, il nous faut l’aimer, l’estimer et la respecter. Malgré les ambiguïtés possibles liées à leur âge, les jeunes peuvent accéder à des valeurs authentiques qui trouvent leur plénitude dans le Christ. Ils sont ainsi capables de recevoir le message du Christ, même s’il est exigeant, même s’il est marqué par la croix (cf. AM, n. 60).
IV. JEUNESSE ET IDENTITÉ CHRÉTIENNE
13. À l’unisson, nous voulons vous dire, à vous jeunes du Congo, « qui êtes du Christ », de ne pas oublier votre identité et de ne pas la brader pour des gains sordides (Gal 2, 27). Vous avez été créés par Dieu et rachetés à un si haut prix : la mort et la résurrection de Jésus. Vous êtes donc à Lui. « Recherchez d’abord le royaume de Dieu et sa justice et tout cela vous sera donné par surcroît » (Mt 6,33). À chacun de vous, avec Saint Paul, nous disons : « …Tout ce qu’il y a de vrai, de noble, de juste, de pur, d’aimable, d’honorable, tout ce qu’il peut y avoir de bon dans la vertu et la louange humaines, voilà ce qui doit vous préoccuper » (Phil 4, 8), « Sois vainqueur du mal par le bien » (Rm 12, 21). Jeune, « Ne dis pas que je suis un enfant. Tu iras vers tous ceux à qui je t’enverrai » (Jr 1, 7). Alors, soyez les ambassadeurs du Seigneur dans vos milieux de vie. Avec Saint Paul, nous disons : « Ne renie pas ta foi » (1Ti 5,8) et « que personne ne méprise ta jeunesse ; mais sois un modèle pour les fidèles, en parole, en conduite, en charité, en foi, en pureté » (1Tm 4,12).
14. Instruisez-vous en mieux. Rejetez la facilité et toutes les anti-valeurs du monde que l’Église dénonce (Cf. Notre message de la 41ème assemblée plénière : Face aux anti-valeurs que devons-nous faire ?). Recherchez l’excellence dans vos études et votre travail. À vous jeunes formés mais désœuvrés et chômeurs, nous vous encourageons à vous prendre en charge et à prendre des initiatives par un entreprenariat individuel ou collectif, en vue d’un leadership de la jeunesse chrétienne catholique pour répondre à l’exigence biblique : « à manger leur propre pain en travaillant paisiblement » (2Th 3, 12). N’oubliez pas que la réussite de votre vie dépend de votre engagement, en tant que chrétien, dans la société et dans l’Église (Cf. Message de la 39ème Assemblée Plénière des Évêques du Congo : La vocation et la mission des laïcs dans la société ).
15. Chers jeunes, n’ayez donc pas peur. Le Christ est avec vous (Mt 28, 20), il est l’Emmanuel, le Dieu avec nous (Mt 1, 23). Croyez en lui et faites tout avec Lui, vous ne serez pas déçus, car « l’espérance ne déçoit jamais » (Rm 5, 5). Nous, vos Évêques, vous portons, au quotidien, dans nos prières et vous soutenons dans toutes vos bonnes œuvres.
V. ORIENTATIONS PASTORALES :
APPELS
16. Filles et fils bien aimés, au terme de ce message, nous lançons un appel pressant, à vous tous et surtout à vous jeunes, pour que l’identité chrétienne reçue par le baptême, soit toujours vécue et témoignée. Cet appel est aussi lancé aux prêtres et personnes consacrées, aux parents et familles, aux éducateurs et aux gouvernants, aux femmes et hommes de bonne volonté.
1/ - Aux Jeunes et Enfants
17. Chers jeunes et enfants, ces mots du concile Vatican II restent encore d’actualité : « c’est au nom de Dieu et de son Fils Jésus que nous vous exhortons à élargir vos cœurs aux dimensions du monde, à entendre l’appel de vos frères et à mettre hardiment à leur service vos jeunes énergies. Luttez contre tout égoïsme. Refusez de laisser cours aux instincts de violence et de haine, qui engendrent les guerres et leur cortège de misères. Soyez généreux, purs, respectueux, sincères. Et construisez dans l’enthousiasme un monde meilleur que celui de vos aînés » (Message aux jeunes à la fin du Concile Vatican II, 8 décembre 1965). Chers jeunes, nous vous lançons, aujourd’hui, ce même appel.
18. Aussi, voudrions-nous vous dire avec le Pape François : « qu’un monde meilleur se construit aussi grâce à vous, à votre désir de changement et à votre générosité. N’ayez pas peur d’écouter l’Esprit qui vous suggère des choix audacieux, ne temporisez pas quand la conscience vous demande d’oser pour suivre le Maître. L’Église elle-même désire se mettre à l’écoute de votre voix, de votre sensibilité, de votre foi, voire de vos doutes et critiques. Faites entendre votre cri, laissez-le résonner dans les communautés et faites-le arriver aux Pasteurs ». (Pape François, Lettre aux jeunes, du 13 janvier 2017).
19. Chers jeunes, soyez des modèles dans vos milieux de vie en incarnant les valeurs chrétiennes. Ayez le courage d’interpeller ceux qui déstabilisent votre jeunesse par des comportements désinvoltes et déviants. Nombreux parmi vous, pour des raisons diverses et injustifiées, sont tombés malheureusement dans les mauvais chemins (alcoolisme, assassinat, braquage, corruption, délinquance juvénile, déviances sexuelles, drogue, tricherie, viol, vol, etc.). Ne suivez pas les mauvais exemples, ni les mauvaises compagnies. En tout et pour tout, soyez raisonnables et écoutez la voix du Seigneur.
20. À vous membres des gangs, vous êtes malgré tous nos enfants, vous êtes aussi des enfants de Dieu, vous venez de nos familles et vous y vivez. Vos réactions, vos rébellions sont certainement dues à des frustrations profondes. Nous, vos Pères, voulons vous dire que vous êtes dans nos prières et vous appelons au ressaisissement ; car la manière dont vous agissez n’est pas une solution. Détruire, tuer, faire du mal, c’est vous détruire vous-mêmes. Nous vous appelons à revenir à Dieu. L’Église, Mère et éducatrice, reste les bras ouverts pour vous accueillir.
21. À vous jeunes, nous, vos Évêques, sommes conscients des difficultés de tout genre que vous rencontrez dans votre vie. Nous sommes aussi informés de vos différents problèmes. Avec les Pères synodaux nous vous disons : « lorsque le monde que Dieu aime au point de lui avoir donné son Fils Jésus, est replié sur les biens matériels, sur le succès immédiat, sur le plaisir, sur l’injustice, lorsqu’il broie les plus faibles, aidez-le à se réveiller et à tourner son regard vers l’amour, la beauté, la vérité, la justice…Vous êtes le présent, illuminez maintenant notre avenir » (Lettre des Pères synodaux aux jeunes, Octobre 2018).
22. Acceptez de vous laisser former humainement et spirituellement. Ne soyez pas réfractaires à l’exigence du cheminement dans la foi. Rejetez toutes formes de médiocrité et dénoncez aussi les tendances contraires à votre croissance spirituelle. Ne laissez pas vaciller votre foi à cause des faiblesses de certains de vos responsables. Au contraire, priez pour eux et aidez-les à se ressaisir pour le bien de l’Église. Nous demandons pardon pour les abus de tout genre dont sont victimes les jeunes. De notre part, des mesures sont désormais prises pour éviter que cela advienne à l’avenir.
2/- Aux Prêtres
23. Chers prêtres, dans votre ministère de pasteur, n’oubliez pas les jeunes, prenez soin d’eux. Ils ont besoin de vous, de vos conseils et de votre accompagnement pour les édifier et les orienter vers Dieu. Dans leur jeunesse, malgré les limites liées à leur âge, ils sont capables de beaucoup de choses. Saint Benoît recommandait aux abbés de consulter les jeunes avant toute décision importante, parce que, « souvent Dieu révèle à un plus jeune ce qui est meilleur » (Saint Benoît, Règles III, 3). Alors, ne délaissez pas les jeunes, soyez proches d’eux, selon l’itinéraire : écouter, accompagner, dialoguer, discerner, orienter. Car « l’écoute est le premier pas du cheminement de la foi ». (Pape François, Homélie de la messe de clôture du synode, Octobre 2018).
24. Que votre action pastorale soit sans limite et sans calcul. Faites gage des riches enseignements du Pape François qui chaque jour, nous exhorte à être « une Église en sortie » (Evangelii gaudium, n. 46), d’aller à la périphérie, vers les nécessiteux, les marginalisés, parmi lesquels il y a aussi des jeunes souvent abandonnés à eux-mêmes, d’où l’égarement et la perdition de beaucoup d’entre eux.
Pensez à la pastorale sociale et aux laissés pour compte. Soyez des modèles dans l’agir au quotidien et les jeunes suivront votre exemple. Avec Saint Pierre nous disons : « soignez le troupeau qui vous est confié, non pas de force mais volontiers, de bon cœur » (1Pi.5, 2).
25. Chers prêtres, vous devez prendre à cœur la pastorale de l’enfance et de la jeunesse dans les paroisses. Il vous faut inventer une pastorale d’approche des marginalisés et autres jeunes en difficulté. Ce n’est ni un fardeau qui vous est imposé, ni quelque chose de dérisoire mais une activité essentielle de votre action pastorale. Une pastorale, aussi importante soit-elle, qui ne prend pas en considération les soucis et les préoccupations des jeunes, est une pastorale morte, car on ne peut pas parler de l’Église d’aujourd’hui et de demain sans parler de la jeunesse d’aujourd’hui. Dans cette pastorale, « les jeunes sont des sujets et non des objets. Souvent dans le concret ils sont traités par la société comme une présence inutile ou incommode : l’Église ne peut avoir cette attitude parce que tous les jeunes ont droit d’être accompagnés dans leur cheminement » (Pape François, document préparatoire du synode 2018, p. 46).
26. S’adressant aux évêques et prêtres, le Pape François dit : « Je le demande surtout aux pasteurs de l’Église, aux Évêques et aux prêtres, vous êtes les premiers responsables des vocations chrétiennes et sacerdotales… Ainsi, en sortant, en écoutant les jeunes, vous pouvez les aider à discerner les mouvements de leurs cœurs et orienter leurs pas » (Pape François, Discours aux participants au colloque de la pastorale vocationnelle du 1er octobre 2016). Vous devez être habités par le souci d’accompagner les jeunes et les aider dans leur discernement.
3/- Aux Personnes consacrées
27. À vous, personnes consacrées de notre Église-Famille qui est au Congo, vous êtes très conscientes de la crise multiforme que traverse notre pays, et particulièrement sa jeunesse. Au nom de votre consécration au Seigneur, vous êtes appelées à être des témoins crédibles de la tendresse et de la miséricorde de Dieu au milieu des jeunes. Nombreux parmi vous sont aussi jeunes ; ils n’ignorent ni les joies, ni les espoirs, ni les peines ni les angoisses liés à cette étape de la vie. « Comme les yeux du serviteur vers son maître, les yeux de la servante vers sa maîtresse » (Ps123, 2), les yeux des jeunes sont aussi tournés vers vous, personnes consacrées, pour que vous leur montriez le vrai sens de la vie, les vraies valeurs qui construisent une vie humaine, sainte et digne.
28. Chères personnes consacrées, impliquez-vous dans la pastorale de la jeunesse. Soyez proches des jeunes, ne vous éloignez pas d’eux ! Ils ont besoin de vous, de votre proximité, de votre témoignage de vie et de votre sens du dévouement dans l’Église et la société. C’est en restant proche des jeunes qu’on les connait mieux ainsi que leurs problèmes et que peuvent naître parmi eux les vocations à la vie consacrée, à la vie sacerdotale et à la vie laïque. À cet effet, le Pape François écrit : « sortir vers le monde des jeunes exige la disponibilité à prendre du temps avec eux, les écouter pour partager leurs joies et leurs tristesses ». Votre tâche dans ce sens est plus que pertinente et incontournable. Car, une pastorale qui ne fait pas germer les vocations est une pastorale stérile et inutile. Soyez des témoins et des boussoles qui indiquent véritablement « le chemin, la vérité et la vie » qu’est le Christ. (Jn. 14, 6).
29. À vous Séminaristes et Novices, pour l’avenir de la mission d’évangélisation dans notre pays, nous Évêques, sommes reconnaissants au Seigneur pour le don des vocations religieuses et sacerdotales parmi les jeunes. Le nombre des séminaristes et aspirants augmente dans nos séminaires et nos couvents. Séminaristes, aspirants et aspirantes, votre présence dans nos maisons de formation est une grâce du Seigneur. Cependant, nous vous encourageons à vous laisser façonner pour que vous soyez des exemples parmi les jeunes et des témoins du Seigneur dans notre Église et dans notre société.
4/- Aux Familles
30. La jeunesse constitue le présent et l’avenir de notre Pays et de notre Église. Le futur de notre société dépend aussi de ce que nos jeunes reçoivent des familles. Car, l’ignorance rend vulnérables les jeunes et conduit à la destruction de leur futur et donc de la société toute entière. Ainsi, la formation des jeunes sur tous les plans est capitale.
31. Chères familles, n’oubliez pas que vous êtes « Église domestique », « le sanctuaire de la vie et la cellule vitale de la société et de l’Église » (Benoît XVI, Africae munus, n. 42). Votre responsabilité dans la vie des jeunes est plus que déterminante. À vous de vous occuper pleinement de leur éducation, leur transmettre les valeurs humaines et spirituelles qui feront d’eux des hommes et des femmes responsables dans la société et dans l’Église. Le premier lieu de la formation des jeunes est la famille. Benoît XVI écrit à ce propos : « La mission éducative de la famille chrétienne est un vrai ministère, grâce auquel l’Évangile est transmis et diffusé, à tel point que la vie familiale dans son ensemble devient chemin de foi et en quelque sorte initiation chrétienne ou école de vie à la suite du Christ » (Africae munus, n. 46).
32. Chers parents, apprenez dès lors, aux jeunes à cultiver la fraternité, à abolir toutes sortes de barrières idéologique, raciale, linguistique, régionale, clanique et tribale, éviter les mauvaises compagnies qui risquent de les faire basculer dans les groupes de bandits à la une dans notre pays et qui sèment la terreur dans les quartiers, villages et villes. Pour eux, chers parents, soyez des modèles. Apprenez leur à aimer Jésus, à le suivre, car, « Celui qui fait entrer le Christ dans sa vie ne perd rien, absolument rien de ce qui rend la vie libre, belle et grande »
(Benoit XVI, Africae Munus, n.64). Refusez aussi toute idéologie contraire à l’éducation chrétienne, car plusieurs perturbent et même visent la destruction de la vraie croissance voulue par Dieu.
5/ Aux Médias
33. Aux femmes et hommes des médias, nous vous rappelons que vous êtes et faites partie du 4ème pouvoir, le plus populaire en milieu juvénile et le plus influent. Vous occupez la vie des jeunes, qui aujourd’hui, vivent surtout des médias et à travers les médias. Nous vous rappelons que votre métier est noble et votre responsabilité grande dans le domaine de l’éducation et de la formation des jeunes. Aidez nos jeunes à grandir, en âge et en sagesse (Lc 2, 52), en valeur et en vertu, dans la foi et dans la relation vraie avec Dieu et les autres. À travers les médias, donnez de bons enseignements qui forment la jeunesse et non la désorientent et la détournent de la réalité. Soyez au service de la vérité, ne la déformez pas ; évitez les fake news (fausses nouvelles) qui empoisonnent le monde (Cf., François, Message de la 52ème journée mondiale des moyens de communications sociales).
34. Aux journalistes chrétiens, nous vous demandons d’utiliser les médias comme instrument efficace d’éducation de la pastorale par des émissions qui édifient et des catéchèses qui enrichissent et forment la jeunesse. Que vos médias soient des instruments de lutte contre les antivaleurs afin que les jeunes suivent les valeurs humaines et spirituelles qui feront d’eux des femmes et des hommes responsables. Aidez aussi nos jeunes à utiliser à bon escient les réseaux sociaux, à prendre ce qui est bon et non ce qui détruit leur propre vie et celle des autres. Notre prière vous soutient afin que vous soyez par votre métier, de bons éducateurs au service de la vérité et de l’Évangile.
6/- Aux Gouvernants et à l’État
35. Les Évêques du Congo saluent tout ce qui est fait en faveur du développement. Ils louent les efforts fournis pour le rétablissement de la paix dans le département du Pool et la réinsertion des ex-combattants qu’ils appellent de tous leurs vœux. Ils félicitent et encouragent les autorités compétentes pour la reprise du trafic sur le chemin de fer et pour la mise en place du Conseil Consultatif de la Jeunesse.
36. L’heure n’est plus aux discours car les jeunes n’y croient plus. Revenez à l’honnête pratique de la politique, en tant qu’art d’administrer ou de gérer la cité, appelée à prévenir et projeter le nécessaire pour améliorer la vie des citoyens. Vous éviterez ainsi la paupérisation du peuple que vous avez la mission de servir et de protéger. Nous voulons rappeler à tous ceux qui reconnaissent avoir une vocation politique, que la politique est et demeure un service, une diaconie. Il s’agit, comme dit le Pape Pie XII, « d’une des plus hautes formes de la charité ». Nous appelons les uns et les autres à revenir à la mission régalienne de la politique pour servir de modèle à la jeunesse, en parole et en acte (1 Ti 4, 12).
37. En cette année consacrée à la jeunesse par l’Église universelle, notre souhait ardent est que le politique focalise son attention sur la jeunesse pour la rassurer du lendemain, en lui apportant formation et éducation dans de bonnes conditions, le travail et de meilleures conditions de vie. Aussi, face au chômage des jeunes, la création d’emplois et la mise en place des politiques publiques et des programmes en faveur de l’entreprenariat pourraient considérablement être une réponse appropriée, en aidant les jeunes à développer des compétences générales telles que l’initiative, la créativité et générer ainsi une valeur ajoutée économique. Nous vous appelons, également à faciliter la création des centres de formation professionnelle et technique et aussi des centres de rééducation des jeunes. Nous éviterons ainsi d’entrainer notre jeunesse dans des violences aveugles et autres délits.
38. Une fois de plus, veuillez éradiquer, dans la manière de gérer la chose publique, toutes formes d’anti-valeurs et faire la promotion du mérite et de l’excellence à tous les niveaux, loin du favoritisme et du népotisme qui ne font qu’augmenter les injustices sociales. Nos prières, pour vous, vont dans ce sens, pour que vous puissiez rechercher le bien commun et prendre à cœur les problèmes de la jeunesse qui attend et compte beaucoup sur la bonne gouvernance loin des promesses trompeuses. Que Dieu de toute grâce vous accorde sa miséricorde et vous donne la sagesse de Salomon (1Rois 3, 9) pour bien guider et gérer notre peuple.
7/ - Aux forces de l’ordre
39. Nous encourageons le travail qui se fait dans le rétablissement de l’ordre public au niveau de notre pays. Nous vous encourageons surtout à toujours garantir la sécurité des personnes et des biens en évitant les bavures. Nous appelons les agents de la force publique complice des groupes de bandits à se ressaisir et à accomplir leur mission dans la loyauté, le respect et le patriotisme.
8/ Aux femmes et hommes de bonne volonté
40. Le problème de la jeunesse concerne toute la société. Tous, sans exception, nous devrions nous engager en faveur des jeunes. Ce que vivent les jeunes ne doit laisser personne indifférent, car nous sommes tous responsables les uns des autres, surtout des plus jeunes. Votre responsabilité dans l’éducation des jeunes n’est plus à démontrer. Aidez donc les jeunes à accéder à de meilleures conditions de vie. Aidez-les à étudier et à finir leurs études en leur garantissant le nécessaire. Veillez à leur insertion dans le monde du travail, accompagnez-les pour qu’ils soient capables d’assurer la relève. Votre tâche dans ce sens est essentielle, si nous voulons réserver à notre pays un avenir radieux et si nous voulons vivre en paix. Car, une jeunesse ratée conduit inévitablement vers un futur incertain. Par la miséricorde de Dieu, soyons tous responsables de nos jeunes qui comptent sur notre expérience et notre bon témoignage.
CONCLUSION
41. Chers jeunes, filles et fils bien aimés, nous voulons, au terme de ce message, rendre grâce à Dieu pour le don de la vie et de la jeunesse. Nous lui disons merci de nous avoir inspiré le choix de ce thème utile pour la vie pastorale de notre Église et de notre société. À vous, de profiter des enseignements de ce message et d’écouter, une fois de plus, la voix des Évêques, vos Pasteurs, qui vous félicitent de votre courage à surmonter les épreuves et vous interpellent à rester fidèles à votre identité chrétienne. Que Maman Marie, sur qui la grâce de Dieu est survenue, vous soutienne et accompagne pour bâtir, en Jésus-Christ, un monde meilleur et plus beau, fondé sur l’amour, la justice, la réconciliation et la paix.
1er Dimanche de l’Avent.
LES ÉVÊQUES DE LA CONFÉRENCE ÉPISCOPALE DU CONGO