CONFÉRENCE ÉPISCOPALE DU CONGO


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LA FAMILLE CONGOLAISE AUJOURD’HUI : IDENTITÉ, ENGAGEMENT DANS L’ÉGLISE ET LA SOCIÉTÉ

jeudi 1er octobre 2020

PAROLES D’ÉVÊQUE N°37
43ÈME ASSEMBLÉE PLÉNIÈRE ANNUELLE DE LA CONFÉRENCE ÉPISCOPALE DU CONGO (C.E.C),
DU LUNDI 20 AU DIMANCHE 26 AVRIL 2015 À BRAZZAVILLE

 

PRÉAMBULE

1. A l’issue de la 43ème Assemblée plénière, Nous Évêques du Congo, vous adressons à vous tous, hommes et femmes, jeunes et vieux, membres de la famille de Dieu, un message de paix, de joie et d’espérance pour nos familles et pour tout le peuple de Dieu.

La question de la famille reste une préoccupation majeure pour tous. Elle est au centre de l’attention tant des hommes d’Église que des institutions sociopolitiques. L’expérience montre que la civilisation et la solidité des peuples dépendent d’abord de la qualité de leurs familles. Mais de nos jours, la stabilité de la famille congolaise est menacée par des situations qui compromettent gravement son épanouissement. Les familles connaissent des drames et des déchirements tous azimuts. Ne pouvant pas rester muets face à la gravité de la situation, nous voulons, comme Évêques et Pasteurs, aider à la sauvegarde de la famille.

I. LA FAMILLE : PREMIÈRE INSTITUTION DE LA SOCIÉTÉ

2. Au terme de la 42ème Assemblée Plénière de la Conférence Épiscopale du Congo, tenue à Brazzaville du 5 au 11 mai 2014 dernier, Nous, Évêques du Congo, vous avons adressé un message d’espérance et d’amour sur la famille. Que ce thème rebondisse encore cette année, cela révèle l’importance que l’Église accorde à ce creuset de l’humanité et de la foi qu’est la famille.

3. La famille, « sanctuaire de la vie », d’après le Pape Jean Paul II, demeure le premier lieu d’apprentissage des relations sociales qui inculquent un modèle culturel d’attitudes et de comportements. Naturellement, « un homme et une femme unis dans le mariage forment avec leurs enfants une famille. Cette disposition précède toute reconnaissance par l’autorité publique ; elle s’impose à elle… » (Catéchisme de l’Église catholique, n°2202). Sanctuaire de la vie et école maternelle de la foi, véritable lieu de sécurité pour les enfants, la famille est la cellule originelle de la vie sociale. Elle est la société naturelle où l’homme et la femme sont appelés au don de soi et de la vie dans l’amour.

4. La famille est la communauté dans laquelle, dès l’enfance, on apprend les valeurs morales, humaines et spirituelles. Comme l’enseigne le Catéchisme de l’Église Catholique : « La vie en famille est initiation à la vie en société » (C.E.C. n° 2207). En effet, la famille, regroupement de personnes liées par le sang ou par alliance, qu’elle soit traditionnelle ou moderne, nucléaire, monoparentale ou recomposée, constitue le lieu privilégié de transmission de savoirs : savoir- être, savoir-faire, savoir-faire faire. La famille est une école d’humanité et un lieu de rapports plus intimes. Elle est une entité généralement formée par le père, la mère et les enfants. La famille est véritablement un lieu de communion et de participation, elle est aussi promotrice du développement humain. En effet, « c’est au sein de la famille que naissent les citoyens et c’est dans la famille qu’ils font le premier apprentissage des vertus sociales, qui sont pour la société l’âme de sa vie et de son développement » (Jean Paul II, Ecclesia in Africa n° 85). Ainsi, nous affirmons que la grandeur d’une société se mesure à la qualité de la famille dont la source profonde est Dieu lui-même.

II. LA FAMILLE : « UNE ÉGLISE DOMESTIQUE »

5. La famille chrétienne est appelée « petite église » ou « église domestique » (Lumen gentium, n° 11 ; Evangeliumnuntiandi, n° 71) ; elle est une communauté de personnes et constitue la première expérience de l’Église, le premier lieu où est accueillie, reconnue, partagée l’expérience de l’amour de Dieu pour les hommes. Elle a vocation à être une profonde et solide communauté de vie et d’amour (Benoit XVI, Africaemunus, n° 43.), qui permette à chacun de ses membres de s’épanouir et de réaliser sa vocation propre, qui soit au service de la vie, qui travaille à l’humanisation de la société et participe à la mission de l’Église.

6. Le foyer familial, comme autant de petits îlots de vie chrétienne, est devenu le premier lieu de relation à Dieu qui participe à la croissance de l’Église. Comme le souligne également le Catéchisme de l’Église catholique : « De nos jours, dans un monde souvent étranger et même hostile à la foi, les familles croyantes sont de première importance, comme foyers de foi vivante et rayonnante » (CEC n° 1656). Pères et mères sont appelés – et à juste titre – les précurseurs de la foi de leurs enfants. Après tout, une bonne part de la formation et de l’éducation des enfants dépend de l’enseignement et de l’exemple vécu de leurs parents. De même, pères et mères sont souvent invités à approfondir leur foi par leurs enfants. La famille devient ainsi le brasier (le feu) auprès duquel chacun de ses membres vient se réchauffer.

7. Nommer la famille chrétienne « église domestique » n’est pas une métaphore, pour suggérer une vague ressemblance. Il s’agit bel et bien d’une concrétisation particulière et réelle de l’Église, de cette communauté sauvée et salvatrice, évangélisée et évangélisatrice qu’est l’Église. Écoutons encore Jean-Paul II le dire clairement : « Non seulement les époux reçoivent l’amour du Christ en devenant une communauté «  sauvée », mais ils sont également appelés à transmettre à leurs frères le même amour du Christ, en devenant ainsi une communauté « qui sauve  » (Cf. FamiliarisConsortio, n°49). La famille chrétienne, tout comme l’Église, n’a pas d’autre lumière que le Christ. Cette lumière est proposée à toutes les familles congolaises qu’elle que soit leur complexité.

III. LA FAMILLE CONGOLAISE AUJOURD’HUI

8. Comme partout dans le monde, au Congo la famille subit des pressions et des mutations socioculturelles. Les tensions sociopolitiques se répercutent de manière insidieuse sur la cellule familiale. La famille est influencée par la civilisation contemporaine, marquée par l’utilitarisme, l’individualisme et la cupidité ; la gratuité qui fait l’essence de l’amour s’effrite au bénéfice du profit. Les valeurs familiales traditionnelles telles que le dialogue, la solidarité, la générosité, etc., sont remises en cause. Des situations sexuelles autrefois marginales voudraient se voir reconnues, authentifiées et légalisées (Cf. Actes de la 10ème Assemblée plénière de l’ACERAC). Ainsi donc, la crise de l’éducation affecte un bon nombre de familles, d’où l’affaiblissement de l’autorité parentale, débouchant sur l’irresponsabilité vis-à-vis des enfants… à la merci de la rue.

III.1. Aspect traditionnel

9. La compréhension de la famille au Congo est bien large. Toutes les personnes ayant une parenté proche ou lointaine avec le père ou la mère constituent la famille. La famille, cellule de base de la société, est dépeinte comme le lieu de l’épanouissement de la personne, du soutien psychologique et social. C’est le lieu privilégié de la reproduction de la parenté, du développement des enfants et de l’entraide entre ses membres. La grande famille n’exclut pas l’existence de la famille restreinte. Au sein de la famille, les enfants jouissent de statuts différents qui leur confèrent des droits et des devoirs. La position de l’aîné comporte ainsi des privilèges. Il fait l’objet d’admiration et d’identification pour la famille, pour les plus jeunes. On lui doit respect, politesse et déférence. Il participe à des activités, à des cérémonies d’où les plus jeunes sont exclus. Aujourd’hui, malheureusement, la place de l’aîné tend à disparaitre. Nous constatons, avec amertume le non-respect de l’aîné chez les nouvelles générations, et parfois la démission de celui-ci de ses responsabilités.

10. En outre, il existe entre l’homme et la femme des rapports de subordination. Il nous faut, dans le contexte de la nouvelle évangélisation, évangéliser nos traditions, nos comportements en y apportant « l’évangile de la famille », par une catéchèse qui, tenant compte des réalités, apporte les valeurs chrétiennes pour que la famille vive selon le dessein de Dieu : lieu de vie et d’épanouissement pour tous dans une forte cohésion.

III.2. Aspects modernes

11. Aujourd’hui, la famille congolaise se présente sous de multiples formes : nous avons ainsi plusieurs types de familles à savoir : la famille nucléaire ou restreinte, élargie, recomposée, monoparentale et polygamique (Cf,Message de la 42ème Assemblée Plénière de la CEC).

III.3. Aspect chrétien

12. L’Église tient en grande estime la vie familiale. Le mariage chrétien monogamique et indissoluble constitue un idéal à la fois noble et difficile, car il comporte beaucoup d’exigences : « l’homme quittera son père et sa mère et s’attachera à sa femme et les deux ne feront qu’une seule chair…. Que l’homme ne sépare pas ce que Dieu a unit » (Mt19, 5-6). La famille tient de Dieu son existence et sa dignité. Ses droits et ses privilèges sont inaliénables et intangibles. Elle a aussi le devoir, devant Dieu et devant la société, de défendre, de revendiquer et de promouvoir ces droits, ces privilèges, non seulement pour son propre avantage mais pour la gloire de Dieu et pour le bien de la collectivité.

13. Nous constatons avec amertume que l’enracinement dans la foi chrétienne est insuffisant dans la majorité des familles. L’on constate une forte religiosité éloignée de la vie concrète, surtout devant certaines réalités de la vie quotidienne (devant l’argent, le veuvage, la maladie, les décès, l’héritage, la dot, etc.). Nous constatons aussi que malgré la participation massive aux célébrations liturgiques et aux dévotions, il y a peu de mariages religieux. Nous encourageons les familles chrétiennes à rester fidèles à la doctrine de l’Église et nous invitons d’autres à faire de même.

14. En somme, il y a hybridation anthropologique de la famille congolaise, une oscillation de la famille entre les traditions ancestrales, la modernité et les valeurs chrétiennes. De nos jours la famille congolaise est confrontée à ces grands défis à relever.

Nous, Vos Pasteurs, lançons un appel urgent à la conversion par l’Évangélisation, en vue de consolider l’identité de la famille chrétienne et de redorer son blason terni par des vents contraires à la foi catholique.

IV. LES GRANDS DÉFIS DE LA FAMILLE CONGOLAISE AUJOURD’HUI

IV. 1. Croyances ancestrales

15. L’expérience vécue dans l’accompagnement des couples et familles montre que les croyances héritées des traditions sont très présentes dans la vie des conjoints, qu’ils en soient conscients ou non. Et cela est particulièrement patent lorsque la famille rencontre des problèmes (ou épreuves). Il nous faut évangéliser certaines croyances ancestrales qui déséquilibrent la famille, entre autres, la sorcellerie. A ce sujet, Saint Paul nous dit : « Vous n’avez pas reçu un esprit de peur, vous avez reçu un esprit de force, de maîtrise de soi, d’amour » (2Tim 1,7). La famille doit s’engager à faire la démarcation entre la vraie religion chrétienne libératrice et la religion qui retient en captivité.

IV.2. Éducation familiale des enfants

16. A la lumière de la doctrine sociale de l’Église, les parents sont les premiers éducateurs de leurs enfants. Ace propos, le Pape PIE XI affirmait dans son encyclique, Divinisilliusmagistri : « le devoir et le droit premiers, inaliénables des parents est celui d’éduquer leurs enfants. Aussi, les parents ayant donné la vie à leurs enfants ont-ils la très grave obligation de les élever, et à ce titre, ils doivent être reconnus comme leurs premiers et principaux éducateurs » (n° 59). Dans ce sens, les parents et les enfants forment « une église domestique » ; pour que celle-ci joue pleinement son rôle, les parents doivent s’engager à donner un bon témoignage de leur vocation humaine et chrétienne. Dans le contexte difficile que connait la famille aujourd’hui, ils doivent réactualiser les informations et connaissances sur les questions cruciales de la vie familiale (le sens d’appartenir à une famille, le respect des uns et des autres, la fidélité dans les engagements, la valeur du travail …), se former pour avoir les aptitudes intellectuelles, morales, humaines et spirituelles requises afin de répondre chacun promptement aux problèmes de la vie en famille.

IV.3. Promotion de la famille et lutte contre la pauvreté

17. La misère et la pauvreté constituent les facteurs principaux du déséquilibre de la famille congolaise aujourd’hui. Grand défi pour la promotion et l’épanouissement de la famille, elles doivent être combattues pour promouvoir la famille. Aussi, les familles doivent ouvrir les yeux face aux différents visages et formes de pauvreté, en démasquer les causes profondes et les combattre de front. Il faut absolument sortir de cette ornière. Les initiatives locales de développement en famille ou entre familles pour lutter contre la pauvreté peuvent faire d’elles un des leviers du développement pour le bien-être de la famille et de la société congolaise toute entière.

IV.4. Sécurité alimentaire et sanitaire en famille

18. La sécurité alimentaire est l’accès de tous aux aliments nécessaires pour mener une vie active et saine. Nous en constatons malheureusement une carence de dans les nombreuses familles vivant en dessous du seuil de pauvreté. On peut noter, en outre, les mauvaises conditions d’hygiène qui sont la cause de nombreuses maladies. Chaque famille, quel que soit son niveau social, doit s’engager à une éducation nutritionnelle et hygiénique en fonction de son revenu. Les commissions diocésaines et paroissiales de la pastorale de la famille peuvent constituer des lieux d’information et de formation à la sécurité alimentaire et sanitaire pour les familles. Les Pasteurs et les familles chrétiennes, qui forment l’Église-famille de Dieu au sein des paroisses et des diocèses, doivent exiger leur mise en place et veiller à leur existence, à l’instar de toutes les autres commissions. C’est une urgence pastorale.

IV.5. La famille dans le champ de la justice et de la paix

19. La famille naturelle, en tant que profonde communion de vie et d’amour, fondée sur le mariage entre un homme et une femme (cf. Gaudium et spes, n° 48), constitue « le lieu premier d’humanisation de la personne et de la société » (Jean-Paul II, Exhortation apostolique Christifideleslaici, 30 décembre 1988, n° 40), le « berceau de la vie et de l’amour » (Ibid). Aussi, est-ce avec raison que la famille est qualifiée de première société naturelle, « une institution divine qui constitue le fondement de la vie des personnes, comme le prototype de tout l’ordre social » (Compendium de la doctrine sociale de l’Église, n° 211). En effet, dans une famille, on fait l’expérience de certaines valeurs fondamentales de paix, de justice et d’amour entre frères et sœurs, d’aide mutuelle devant les nécessités de la vie, de disponibilité à accueillir l’autre et à lui pardonner. C’est pourquoi, la famille devrait être la première et l’irremplaçable éducatrice à la paix.

20. Quand on affirme que la famille est « la cellule première et vitale de la société et de l’Église » (Benoît XVI, Africaemunus, n°6), on dit quelque chose d’essentiel. Par conséquent, celui ou celle qui, même inconsciemment, entrave l’institution familiale fragilise la paix dans la communauté toute entière, parce qu’il affaiblit ce qui, de fait, est la principale artisane de paix. C’est là un point qui mérite une réflexion particulière : « Famille congolaise, engage-toi sur le chemin de la paix, de la justice et de la réconciliation, pour un Congo meilleur et prospère ».

IV.6. La famille dans le contexte de la Nouvelle Évangélisation

21. Dans la vision chrétienne du mariage, la relation réciproque et totale, unique et indissoluble, entre un homme et une femme, répond au dessein originel de Dieu. Elle s’est obscurcie dans l’histoire par la « dureté du cœur », mais le Christ est venu la restaurer dans sa splendeur originelle, en rappelant ce que Dieu a voulu « depuis le commencement » (Mt 19, 8).Dans le mariage, élevé à la dignité de sacrement, est aussi exprimé le « grand mystère » de l’amour sponsal du Christ pour son Église (cf. Ep5,32). Dès lors, l’Église ne peut céder aux pressions d’une certaine culture, même si celle-ci est répandue et parfois militante. Les familles chrétiennes doivent être irradiées et illuminées par l’amour de Dieu.

22. La Nouvelle Évangélisation représente un défi pour l’Église d’aujourd’hui. Les familles chrétiennes qui sont évangélisées et qui évangélisent ont une place privilégiée dans la vie de l’Église et dans la société. Dans un environnement sécularisé, la famille chrétienne doit devenir un témoin attrayant par son identité, fondée sur la communauté d’amour et de vie (Mt 5,13-14). L’évangélisation des temps nouveaux oblige notre Église, «  Famille des familles  », à se renouveler en permanence pour transmettre le message du Christ à l’aune des nouveaux défis du monde.

23. Les familles, à travers un dialogue franc, avec les autorités religieuses, politiques et les législateurs, doivent leur rappeler leurs responsabilités, leur donner leur avis pour protéger la dignité de l’amour et le droit à la vie. Le témoignage des consacrés et des laïcs s’impose. Personne n’est excusé. C’est l’heure de l’engagement de tous pour la cause de la famille, où que l’on se trouve. Car tous nous venons de la famille avant de devenir ce que nous sommes aujourd’hui dans l’Église et la société (cf. Jean-Paul II, Lettre aux Familles, n. 2).

IV.7. La famille et les moyens de communication sociale

24. Les moyens de communication sociale sont devenus un grand défi pour la famille. L’éducation aux médias nécessite la formation à l’exercice de la liberté. C’est une tâche exigeante. La vraie liberté ne devrait jamais condamner l’individu, particulièrement l’enfant, à une quête insatiable de nouveautés. A la lumière de la vérité, la liberté authentique s’éprouve comme réponse définitive au «  oui  » de Dieu à l’humanité, qui nous appelle à choisir tout ce qui est juste et beau (cf. Tt 2,11-12).Pour cette raison, les parents sont invités de manière ferme et décisive à exercer une éducation positive aux médias. Ils sont aussi appelés à comprendre ce langage pour opérer, eux-mêmes, des choix conséquents et pouvoir accompagner et aider les enfants avec sagesse.

V. APPELS

25. Au regard de ce qui précède, Nous, Évêques et Pasteurs, soucieux de la question de la famille et pour le bien de la société congolaise, réitérons les appels lancés, lors de notre 42ème Assemblée plénière, au bénéfice de la famille. Nous voulons ici nous adresser quelques appels aux Prêtres, Religieux et Religieuses, à l’État, aux familles, aux jeunes, aux personnes de bonne volonté et aux organismes internationaux.

1. Aux Prêtres, Religieux et Religieuses

26. Collaborateurs proches et indispensables de l’Évêque, chers Prêtres, Religieux et Religieuses, vous avez la mission de poursuivre l’œuvre d’évangélisation (cf. Benoit XVI, AfricaeMunus, n°108). Or, il n’est pas possible d’évangéliser sans tenir compte de la réalité familiale. La famille est le lieu d’où a germé notre vie et vers lequel Dieu nous envoie comme pasteurs de son troupeau. Consacrés et mis à part, vous êtes envoyés en mission pour paître les brebis de son pâturage. Votre mission permanente demeure : l’enseignement de la Parole de Dieu conformément à la doctrine de l’Église, la sanctification du peuple de Dieu et l’administration, avec la collaboration de vos Évêques, des structures mises en place.

27. Dans ce monde en perpétuelles mutations, vous êtes appelés à vous imprégner en profondeur de la réalité de la famille, pour mieux l’assister, l’orienter par vos conseils conformément aux enseignements de l’Église (cf. Jean-Paul II, Familiarisconsortio, n° 73-74). Car, il nous faut, de plus en plus, des chrétiens engagés, pour le bien de la famille, dans l’Église et la société. Pour ce faire, il faut, sous votre direction, une bonne catéchèse pour la famille et un suivi permanent avec des animateurs exemplaires et disponibles. L’exercice n’est pas une sinécure, nous le savons bien. Mais, nous vous engageons, comme le veut aussi le Pape François, à être plus prêts du peuple et à œuvrer pour le plein épanouissement de l’homme, dans le respect de la vie et de l’amour. Œuvrez pour des familles de plus en plus unies, où chacun trouve le plein épanouissement, le bien-être et le bien-vivre. Dans cette tâche ardue, vous rencontrerez beaucoup d’obstacles. Soyez forts et constants dans la vocation qui est la vôtre. Que les béatitudes vous fassent regarder le Christ vivant en vous, œuvrant avec vous, pour la venue d’un monde comme Dieu le veut.

28. Nous, Évêques du Congo, vous encourageons et vous exhortons à beaucoup plus d’ardeur, de dynamisme et à un travail méthodique pour la réussite de la mission de l’Église en faveur de la famille et de la société. D’ores et déjà, nous vous rassurons de nos prières et de notre bénédiction paternelle.

2. A l’État

29. Face à tous les maux décriés, nous appelons une fois de plus les pouvoirs publics à une action forte et déterminante pour le bien-être de la famille congolaise aujourd’hui et demain. La santé de la famille dépend aussi de la volonté de l’État à veiller à l’existence d’un environnement sain, permettant aux membres de la famille d’assumer leur responsabilité dans la société en toute quiétude. L’une des premières missions consisterait à poursuivre les efforts de normalisation de la situation socio-économique des ménages congolais pour donner à chaque famille les conditions nécessaires de vie. L’État devra veiller à la promotion et à la protection de la famille conformément aux lois et règlements de la République. Il est à noter que les institutions de la République disposent de tous les outils nécessaires pour protéger la famille. Qu’en est-il des lois n°60-95 du 03/03/1960 réglementant la fréquentation des débits de boissons pour les enfants de moins de 16 ans ; n°60-94 du 03/03/1960 réglementant la fréquentation des salles de cinéma et de spectacles par des enfants de moins de 16 ans ; n°15/66 de juin 1966 modifiant la loi n°19/64 du 13 juillet 1964 sur la protection des élèves mineurs ? Enfin, nous appelons l’État à la prudence par en ce qui concerne l’idéologie du genre qui n’est pas forcément pour l’épanouissement de la famille.

30. Aux Responsables politiques et administratifs, nous recommandons :

1 - De valoriser les centres de loisirs sains pour le développement harmonieux des enfants et des jeunes. Pour cela, il est nécessaire de créer dans chaque Département du Congo, de tels centres de loisirs ou centres de vacances pour l’occupation du temps libre des enfants et des jeunes.

2 - De veiller au respect du code de la famille pour éviter les surenchères constatées lors des dots. La dot doit toujours avoir son sens de « symbole d’alliance » pour garder sa noblesse, sa solennité et sa sacralité.

3 - De garantir l’assistance aux familles (la sécurité sociale), pour donner à chaque famille congolaise le minimum vital. Tout homme a droit à la vie. Le droit de vivre dignement ne doit pas être le monopole d’une catégorie sociale.

4 - Éduquer davantage les jeunes à l’unité nationale, au-delà des clivages claniques, tribaux et régionaux ; combattre ainsi la haine, la violence et toute manipulation malsaine.

3. Aux Familles

31. Gardez présentes à l’esprit que la famille est une institution naturelle et une nécessité pour tout homme. Conscients des difficultés de tout genre que vous rencontrez dans la vie quotidienne (deuils, maladies, handicaps, incompréhensions, manque de dialogue, accusations de sorcellerie, désobéissance des enfants, abandon du foyer, pauvreté, chômage des jeunes, alcool et drogue, etc.), nous vous rappelons qu’aucune vie humaine n’est exempte de difficultés. Lorsqu’elles arrivent, ne renoncez pas à votre foi. Retenez cette exhortation de saint Jacques : « Heureux l’homme qui endure l’épreuve, parce que, une fois testé, il recevra la couronne de la vie promise à ceux qui l’aiment » (Jc 1, 12). Ainsi, dans vos familles, que chacun joue son rôle de père, de mère, d’enfant, d’oncle et de tante. Tous doivent être artisans de relations authentiques au sein de la famille (cf. Ex 20, 12 ; Col 3, 18-21).

4. Aux jeunes et enfants

32. « Tout m’est permis mais tout ne me convient pas. Mais moi je ne me laisserai asservir par rien », dit saint Paul aux Corinthiens (1 Cor 7, 1).

Chers enfants, chers jeunes, ne vous laissez pas voler votre vie, refusez de vous laisser appauvrir par des thématiques et des situations qui vous trompent et qui, sous la fallacieuse imposture de la liberté, sont liberticides parce qu’elles ne sont qu’une quête insatiable de nouveautés à la longue destructrice et déprimante. Apprenez à choisir, à discerner pour vous-mêmes ce qui forme et fait croître dans le bien et dans la beauté, qui, tels un miroir du divin, inspirent et vivifient les cœurs et les esprits des jeunes, alors que la laideur et l’indécence ont un impact avilissant sur les attitudes et les comportements (cf. Message du Pape Benoit, lors de la 41ème journée mondiale des communications).

A vous de ressortir tout cet enseignement solide, utile et fondamental pour enterrer les fausses idéologies et les antivaleurs. Jeunes, prenez soin de votre corps pour qu’il reflète la beauté de Dieu, le lieu où l’Esprit Saint réside. Avec Saint Jean-Paul II, nous disons : «  Soyez les sentinelles du matin  ».

5. Aux personnes de bonne volonté

33. Tant il est vrai que de la qualité de la famille dépend la grandeur de la société, nul ne doit vivre en vase clos, indépendamment de la famille. Nous invitons toutes les personnes de bonne volonté à s’investir ardument dans la promotion d’une vie familiale responsable et respectueuse des lois de la nature, à travers :

  • Le dialogue entre les parents d’une part et les parents avec leurs enfants, de l’autre ;
  • L’éducation dont ils sont les tout premiers acteurs. En effet, pour tout parent, l’éducation est à la fois un droit et un devoir, auxquels ils doivent consacrer le plus clair de leur temps et tous les moyens requis.

La maxime « Tel père, tel fils » nous illumine sur le reflet éducatif d’un enfant. Le témoignage de vie des parents est le meilleur atout pour faire de nos enfants d’aujourd’hui les adultes de demain. Ainsi, nous invitons les personnes de bonne volonté à mettre tout en œuvre pour promouvoir, protéger la famille et la défendre quand elle est menacée.

6. Aux Organismes Internationaux

34. La réalité de la famille dans le monde actuel et dans notre pays aujourd’hui, nous amène, nous Évêques du Congo, à nous adresser à vous, Organismes Internationaux, maillons essentiels de la Communauté Internationale, pour qu’ensemble nous puissions œuvrer pour la promotion et la protection de la famille et l’engager comme facteur majeur d’un développement socio-économique et politique harmonieux.

35. Nous louons le rôle important que vous jouez dans l’assistance et l’accompagnement des peuples du monde et dans l’évolution socio-économique et politique de notre pays. Malheureusement tout n’est pas toujours positif. Certaines de vos initiatives semblent controversées, aux regards des motivations inavouées et des conditions exigées et tantôt imposées dans votre assistance et votre accompagnement pour le progrès social et le développement économique. Elles sont parfois à l’antipode des aspirations de notre peuple, et parfois contraires aux valeurs chrétiennes, africaines et humaines.

36. Nous vous exhortons à œuvrer pour la promotion réelle et la protection de la famille et de la vie, sous toutes ses formes depuis la conception. Car la vie et la famille sont sacrées. Nous vous soutenons dans les actions favorisant le développement de l’homme, la lutte contre la pauvreté, contre les mauvaises conditions de vie sociale et les courants idéologiques qui avilissent et tuent l’être humain. Nous soutenons vos initiatives d’accompagnement de notre peuple dans la légalité, la loyauté, la dignité, le respect et la promotion des valeurs qui sont les fondements de notre société et de nos croyances. Que ces initiatives encourageantes n’ouvrent pas des brèches aux valeurs contraires à la morale et à notre mode de vie en tant qu’Africains et chrétiens. Nous dénonçons les aides conditionnées à l’acceptation par nos pays « des réalités qui cherchent à expulser Dieu de la vie de l’homme, comme le laïcisme aveugle, qui étouffe les valeurs de la foi et de la morale, au nom d’une défense de l’homme ; ou le fondamentalisme violent qui prend prétexte de la défense des valeurs religieuses… » (Cf. Benoît XVI, Exhortation Apostolique, Ecclesia in Medio Oriente).

37. N’oublions pas que nous venons tous d’une famille. Alors œuvrons pour sa promotion, son entretien, sa protection et sa défense quand elle est menacée pour l’épanouissement de tout l’homme. Que le Seigneur vous fasse regarder votre prochain pour qui vous œuvrez comme vous-mêmes, méritant une bonne vie, dignité, considération, protection et assistance, sans vouloir le diminuer, ni le rendre esclave de quelque manière que ce soit.

Nous, Évêques et Pasteurs de l’Église locale qui est au Congo, vous rassurons, de nos prières, et de notre bénédiction. Puisse le Seigneur, accompagner votre action au Congo.

CONCLUSION

38. Au terme de nos travaux, où la question de la famille a été vue et approfondie avec intérêt pour le bien de la société et de la famille congolaises, Nous évêques du Congo, Vos Pasteurs, vous exhortons, peuples de Dieu, à être fidèles aux valeurs du mariage et de la famille (cf. Message de la 42ème Assemblée Plénière). Notre bonheur actuel et le futur de notre nation dépendent de la qualité de nos familles. Faisons donc la sourde oreille aux idéologies qui veulent déstabiliser notre société et nos familles. Marchons en conservant et en transmettant les valeurs de la vie, de la paix, de la justice aux nouvelles générations. Que la famille, dans son vrai sens, prime et prenne le dessus dans vos pensées et dans vos projets. Faisons la paix et vivons dans la paix pour que nos familles soient des véritables écoles d’humanité et de vie toutes dimensions.

Avec Jean-Paul II, nous vous disons : famille congolaise, « deviens ce que tu es » (Familiarisconsortio, n° 17).Famille congolaise, sois fière de ce que tu es, n’aie pas peur de lutter, témoigne ta foi et vis dans l’espérance en Jésus-Christ mort et ressuscité. Tel est le vrai chemin du bonheur pour notre pays et pour nos familles. Famille de Dieu qui est Congo, «  lève- toi et marche  ». (Jn 5,8).

Que la sainte famille de Jésus, Marie et Joseph, modèle de la famille, vous soutienne.

Prière du Pape François pour le prochain synode

« Jésus, Marie et Joseph, en vous nous contemplons
la splendeur de l’amour véritable, à vous nous nous adressons avec confiance.

Sainte Famille de Nazareth, fais de nos familles
 des lieux de communion et des cénacles de prière, des écoles authentiques de l’Évangile
et des petites Églises domestiques.

Sainte Famille de Nazareth, que jamais plus dans les familles on ne fasse l’expérience
 de la violence, de la fermeture et de la division : que quiconque a été blessé ou scandalisé
 connaisse rapidement consolation et guérison.

Sainte Famille de Nazareth, que le prochain Synode des Évêques 
puisse réveiller en tous la conscience du caractère sacré et inviolable de la famille, sa beauté dans le projet de Dieu.

Jésus, Marie et Joseph, écoutez-nous, exaucez notre prière ».

Pape François

 

Fait à Brazzaville, le dimanche 26 avril 2015


 

Les Évêques du Congo

+Mgr Daniel MZONZO
Évêque de Nkayi, Président de la CEC
+Mgr Yves Marie MONOT
Évêque de Ouesso
+Mgr Louis PORTELLA-MBUYU
Évêque de Kinkala
+Mgr Anatole MILANDOU
Archevêque de Brazzaville
+Mgr Urbain NGASSONGO
Évêque de Gamboma
+Mgr Victor ABAGNA-MOSSA
Évêque d’Owando
+Mgr Jean GARDIN
Évêque d’Impfondo
+Mgr Bienvenu MANAMIKA BAFOUAKOUAHOU
Évêque de Dolisie
+Mgr Miguel Angel OLAVERI
Évêque de Pointe-Noire

 

 

 

 


 
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