CONFÉRENCE ÉPISCOPALE DU CONGO


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La Conférence Épiscopale du Congo : 50 ans au service de la mission

dimanche 7 novembre 2021

MESSAGE DE LA 50ème ASSEMBLÉE PLÉNIÈRE DE LA CONFÉRENCE ÉPISCOPALE DU CONGO

THÈME :
« La Conférence Épiscopale du Congo : 50 ans au service de la mission »

« Allez donc, de toutes les nations faites des disciples » (Mt 28, 19)
Du 11 au 17 octobre 2021

 

PRÉAMBULE

Filles et fils bien-aimés,

Paix, joie et espérance dans le Christ !

1. Réunis, au Centre Interdiocésain des Œuvres (CIO), pour la 50ème Assemblée Plénière de la Conférence Épiscopale du Congo (CEC), du 11 au 17 octobre 2021, sur le thème : «  La Conférence Épiscopale du Congo : 50 ans au service de la mission  », soutenu par la Parole de Dieu : « Allez donc, de toutes les nations faites des disciples » (Mt 28, 19), Nous, Archevêques et Évêques du Congo, vous adressons, à vous Peuple de Dieu et Personnes de bonne volonté, ce message de paix, de joie et d’espérance en cette année jubilaire de notre Conférence Épiscopale, pour raffermir votre foi et vous encourager à accomplir pleinement votre mission comme disciples du Christ, malgré les circonstances difficiles de notre temps.

I- CONTEXTE HISTORIQUE

2. Notre Assemblée Plénière en cette année du cinquantenaire se tient dans une période sanitaire marquée par la pandémie du coronavirus, qui continue à faire des ravages dans le monde, en dépit des traitements déjà préconisés et de l’existence des vaccins. Nous rendons grâce à Dieu pour les 50 ans d’existence et pour avoir accompagné nos pas et soutenu notre ministère d’Évêques et de Pasteurs, réunis en Conférence Épiscopale, dans un véritable esprit de fraternité, de communion et de collégialité (cf. Lumen Gentium, n°23). Nous remercions aussi tous nos collaborateurs qui témoignent au quotidien leur attachement à l’Église du Christ.

3. Notre Conférence Épiscopale célèbre ses cinquante ans. Nous saluons ici, avec gratitude, la mémoire de nos prédécesseurs, nos aînés dans la foi, qui, sous l’impulsion du renouvellement missionnaire voulu par le Concile Vatican II, décidèrent de se réunir pour la première fois en Assemblée Plénière, à Brazzaville, du 8 au 11 février 1971. C’est ainsi qu’est née officiellement la CEC. Les assemblées auront lieu chaque année, au fil du temps, pour donner vie à la Conférence Épiscopale du Congo dans sa forme actuelle. Nous voulons ici signaler l’Assemblée Plénière de 1973 où pour la première fois la Conférence Épiscopale se dote d’un bureau ayant à sa tête le Cardinal Émile Biayenda comme Président. En soulignant l’œuvre des Pères fondateurs de la CEC Nos seigneurs Théophile Mbemba, Émile Biayenda, Jean Baptiste Fauret, Georges Firmin Singha et plus tard Godefroy Émile Mpwaty, puis Barthélemy Batantou, nous voulons aussi saluer la mémoire des Pères fondateurs de l’Église du Congo à savoir Nos seigneurs Marie-Hippolyte Carrie et Prosper Philippe Augouard et tous leurs successeurs.

4. En cinquante ans, malgré le changement des personnes et des périodes, notre pensée est restée constante et dynamique, toujours dans la logique de la continuité, en communion avec le magistère de l’Église universelle et en harmonie avec la Sainte Tradition de l’Église. Si la première Assemblée Plénière fut motivée par le climat anticlérical de l’idéologie marxiste-léniniste vis-à-vis de l’Église Catholique, les assemblées successives ont abordé les thèmes les plus divers, parmi lesquels : la catéchèse, les vocations, le mariage, la pauvreté, la réconciliation, le veuvage, la jeunesse, le laïcat et d’autres thèmes liés aux questions sociales de paix, de justice, de conflit, de travail… conformément à la Doctrine Sociale de l’Église qui n’a pour seul but que de vouloir « construire la civilisation de l’amour et de la solidarité » (Paul VI, Homélie de Noël 1975), selon les principes de la dignité de la personne humaine, du bien commun, de la subsidiarité et de la solidarité.

II. BUT ET MISSION DE LA CONFÉRENCE ÉPISCOPALE

5. Notre but, comme Conférence Épiscopale, n’est pas celui de diminuer l’autorité souveraine de chaque évêque diocésain, mais bien celui de nous mettre ensemble, dans un esprit de communion, de fraternité et de collégialité (cf. Can. 447) pour discuter, méditer et traiter ensemble les préoccupations pastorales d’intérêt national, comme dit le saint concile Vatican II : « De notre temps surtout, il n’est pas rare que les Évêques ne puissent accomplir leur charge convenablement et avec fruit, s’ils ne réalisent pas, avec les autres évêques, une concorde chaque jour plus étroite et une action plus coordonnée » (Christus Dominus, n° 37). Le Pape François ajoute : « Le chemin de la synodalité est précisément celui que Dieu attend de l’Église du troisième millénaire » (Pape François, Discours pour la commémoration du 50ème anniversaire du Synode des Évêques, 17 octobre 2015). Étant ensemble, nous revivons au quotidien le mandat missionnaire confié aux Apôtres et donc à chaque baptisé que nous sommes, mais plus particulièrement, à nous vos Évêques et Pères, qui avons reçu de manière toute spéciale la mission d’enseigner, de sanctifier et de gouverner (munus docendi, munus sanctificandi, munus regendi). En un mot, nous voulons vivre et réactualiser ces paroles du Christ aux Apôtres : « Allez donc, de toutes les nations, faites des disciples » (Mt 28, 19).

III. NOS MESSAGES ANTÉRIEURS

6. En cinquante ans, les Évêques du Congo, en diverses occasions et périodes, n’ont fait qu’annoncer l’Évangile, à travers leurs messages, déclarations ou autres prises de parole. En effet, tout notre enseignement est basé sur un seul souci : celui de vous conduire vers Dieu, sur le chemin du Salut, comme dit le décret conciliaire sur l’activité missionnaire dans le monde Ad gentes : « Envoyée par Dieu aux nations pour être le sacrement universel du Salut, l’Église, en vertu des exigences intimes de sa propre catholicité et obéissant au commandement de son fondateur (cf. Mc 16,16), est tendue de tout son effort vers la prédication de l’Évangile à tous les hommes » (Ad gentes, n°1). D’où l’importance que nous accordons à tous nos messages et déclarations ; nous vous invitons non seulement à les lire et relire mais aussi à les méditer personnellement, en groupes ou dans les mouvements d’apostolat et à les mettre en pratique.

7. Ainsi en cinquante ans, nous avons publié plusieurs messages et déclarations qui touchent tous les domaines : l’éducation, la vocation, le prêtre, la famille, la jeunesse, les laïcs, la formation, la société, la paix, le dialogue, le pardon, la politique, la question sociale, sans oublier le message du centenaire de l’évangélisation du Congo en 1983, qui avait pour titre : Les Ombres et les Lumières de l’Église Catholique dans notre Pays. Aucun domaine n’a échappé à notre attention. Nous avons voulu être, en tous temps et en tous lieux, « la voix des sans voix » et jouer pleinement notre rôle de pasteurs et de prophètes en vous annonçant à la fois « la joie de l’évangile », «  l’évangile de la vie » et « l’évangile de la paix » (Pape François). Comme affirme le concile Vatican II : « les joies et les espoirs, les tristesses et les angoisses des Hommes de ce temps, des pauvres surtout et de tous ceux qui souffrent, sont aussi les joies et les espoirs, les tristesses et les angoisses des disciples du Christ et il n’est rien de vraiment humain qui ne trouve écho dans leur cœur » (Gaudium et spes, n°1). En substance, tous nos messages, en 50 ans, sont contenus dans ces différents thèmes : 1/ le prêtre et la vocation ; 2/les laïcs ; 3/la question sociale ; 4/ Église-famille et développement ; 5/les antivaleurs ; 6/le dialogue interreligieux et l’œcuménisme ; 7/ la famille ; 8/la jeunesse ; 9/ la santé, etc.

IV. ENGAGEMENT SOCIAL DES LAÏCS

8. Le laïc est la présence effective de l’Église dans la société. Par les laïcs, l’Église « ordonne en vérité le monde entier au Christ » (Apostolicam Actuositatem, n°2 § 1). Il est appelé à manifester son engagement dans la gestion du temporel qui est sa mission et donc son domaine de prédilection. Il doit prendre une part active à la vie sociale par son adhésion à la gestion de la chose publique. Le fidèle laïc doit se former et s’engager à être témoin du Christ à temps et à contretemps pour être partout « sel de la terre et lumière du monde » (Mt 5, 13-14), afin d’insuffler, dans notre société et dans toutes les instances de la vie publique, une dynamique inspirée de la Parole de Dieu.

9. Le Pape Paul VI, dans sa Lettre encyclique "Populorum Progressio", qui veut que « le développement soit le nouveau nom de la Paix » (n°76), exprime par là le but à atteindre et la mission essentielle de l’Église qui « n’est pas seulement d’apporter aux Hommes le message du Christ et sa grâce, mais aussi de pénétrer et parfaire par l’esprit évangélique l’ordre temporel » (Apostolicam Actuositatem, n°5). L’ordre des réalités temporelles sous-entend que les laïcs s’engagent pour le bien de la vie, de la famille, de la culture, des réalités économiques, des métiers et professions, des institutions de la communauté politique, des relations internationales et d’autres réalités du même genre (Apostolicam Actuositatem, n°7).

10. Eu égard à ces enseignements de l’Église, nous constatons avec regret un manque d’engagement chez certains de nos fidèles laïcs. Nous tenons à vous rappeler que par votre vocation chrétienne, vous êtes appelés à participer à la vie socio-politique, économique et culturelle de notre pays, pour y apporter l’esprit chrétien. Ne pas prendre une part active à la vie sociale serait de l’irresponsabilité, car chacun de nous, selon la volonté du Christ et de l’Église, doit mettre du sien pour la bonne marche de la société et participer au développement du pays. Comme le déclare notre message de 2010 : « appelés à témoigner de Jésus Christ et de son Évangile, nous vous exhortons, bien-aimés de Dieu, à déployer tout votre être chrétien dans tous les domaines de la vie personnelle et sociale, économique et politique » (Message de la 38ème Assemblée Plénière, la vocation et la mission des laïcs au Congo, n°23). Aussi dans le message de la 39ème Assemblée Plénière de mai 2011, nous disions : « nous vous exhortons cette fois-ci à plus d’engagement dans le cadre de vos responsabilités spécifiques au plan professionnel, social, économique, culturel et politique » (message de la 39ème Assemblée Plénière, la vocation et la mission des laïcs dans la société, n°7).

V- PERSPECTIVES

11. Cher peuple de Dieu, en célébrant les 50 ans de notre Conférence Épiscopale, ayant vu ou jeté un regard sur ce qui a été fait, nous Évêques du Congo, voulons partager avec vous notre vision sur notre mission dans les années à venir. Ce sont là les défis qui font partie de nos préoccupations actuelles. Ces défis concernent certains domaines comme : l’éducation, la santé, la famille, le laïcat, l’entreprenariat, etc.

1- De l’Éducation

12. Nous n’allons pas redire ce qui a été décidé lors des Conseils Nationaux des Écoles Catholiques et dans la plupart de nos messages antérieurs. L’éducation reste une priorité pastorale et une exigence pour notre société. Nous voudrions d’abord insister sur la qualité de l’enseignement donné dans nos écoles qui doit toujours être améliorée. Ensuite, Il s’agira de veiller sur la qualité des structures, autrement dit, créer des infrastructures idoines pour faciliter le bon apprentissage. En outre, il nous faut veiller sur la compétence du personnel et la conduite exemplaire. En effet, un éducateur ou une éducatrice doit être avant tout un homme ou une femme modèle et donc exemplaire, de bonne moralité, capable de transmettre aux élèves non seulement ses connaissances mais aussi les valeurs humaines et chrétiennes.

13. Ainsi, la Commission Épiscopale pour l’Éducation Catholique veillera à :
- Harmoniser la gestion et le fonctionnement de nos structures scolaires.
- Promouvoir les programmes d’éducation humaine, morale, spirituelle et intégrale de l’Homme par la mise en œuvre du « Pacte Éducatif Mondial » proposé par le Pape François en 2020, avec la mise en place des écoles spécialisées.
- Organiser des formations professionnelles, car la création des écoles techniques offrira à notre jeunesse plus d’opportunités dans le monde du travail.

14. Tout en se félicitant de ce qui se fait à travers nos écoles, nous nous réjouissons de l’existence à Pointe-Noire, d’une branche de l’Université Catholique d’Afrique Centrale (UCAC), appelée UCAC-ICAM (Institut Catholique d’Arts et Métiers), en attendant l’ouverture de l’Université Catholique du Congo dans un futur proche. Nous encourageons aussi, la création des universités catholiques ou instituts dans les diocèses. Pour ce faire, nous demandons aux congrégations religieuses d’adhérer à ce projet et de s’investir davantage dans le domaine précieux de l’éducation.

2- De la Santé

15. Le problème de la santé est d’une ampleur sans précédent surtout en cette période de crise sanitaire causée par la pandémie à coronavirus. Les structures de santé publique connaissent beaucoup de difficultés à telle enseigne que la qualité des soins s’en ressent. Nous notons aussi le non-respect du serment d’Hippocrate par certains agents de la santé, d’où la nécessité de la part de l’Église de s’investir davantage dans ce domaine. À cet effet, nous sommes appelés à réorganiser la Commission Épiscopale pour la Pastorale de la Santé et la mise en place par elle des antennes dans les diocèses. L’Église pourra, dès lors, s’inscrire dans une nouvelle perspective pastorale sanitaire pour le bien de tous.

16. Par ailleurs, malgré les centres de santé qui existent dans nos diocèses, appartenant pour la plupart aux congrégations religieuses, nous encourageons tous projets liés à la santé. Aussi, encourageons-nous, comme dans le passé, l’ouverture des dépôts de médicaments dans les paroisses, avec possibilité de vendre des produits à faibles prix pour aider les familles moins nanties à se soigner à faibles coûts.

3- De l’Entreprenariat dans l’Église :

17. Partant de la Parole de Dieu « Donnez-leur vous-mêmes à manger » (Mt 14, 16), notre Église se doit d’approfondir son action. Il s’agit non seulement d’annoncer l’Évangile en paroles, mais aussi d’apporter davantage ce qu’il faut pour le bien-être social de la population et la préservation de notre environnement. En vue d’actions transformatrices dans notre société, nous devons penser à la mise en place de structures d’Église capables de créer les conditions pour l’emploi. D’où l’urgence d’approfondir des réflexions sur la question de l’autofinancement, réflexions déjà en cours, au niveau de notre secrétariat général qui a organisé des sessions sur ce thème. Ainsi, la réalisation du projet d’autonomisation et d’autofinancement de notre Église locale est une priorité majeure et un idéal salvifique. Dans ce sens, l’Église se donnerait des moyens de peser dans la sphère économique du pays. Pour cela, il faudrait ensuite penser à la formation nécessaire pour une bonne gestion du patrimoine.

4- Du Laïcat :

18. Le thème du laïcat a été l’objet de deux Assemblées Plénières, celle de 2010 sur la vocation et la mission des laïcs dans l’Église au Congo et celle de 2011 sur la vocation et la mission des laïcs dans la société. Avec le concile Vatican II nous disons : « Les chrétiens, en marche vers la cité céleste, doivent rechercher et goûter les choses d’en-haut, mais cela pourtant, loin de la diminuer, accroît plutôt la gravité de l’obligation qui est la leur de travailler avec tous les hommes à la construction d’un monde plus humain. Et de fait, le mystère de la foi chrétienne leur fournit des stimulants et des soutiens inappréciables : Ils leur permettent de s’adonner avec plus d’élan à cette tâche… » (Gaudium et Spes, n°57). Les laïcs coopèrent à l’œuvre de l’évangélisation de l’Église et participent à titre de témoins à la mission salvifique. Les laïcs doivent développer en eux-mêmes et chez les autres la connaissance de Dieu et l’esprit missionnaire en faisant naître des vocations dans leur propre famille, dans les associations catholiques et les écoles (cf. Ad Gentes, n°41).

19. En dépit de ce que nous avons dit sur la vocation et la mission des laïcs dans l’Église et dans la société, nous constatons que sur le terrain, les comportements et l’engagement chrétien font défaut. Pour ce faire, nous recommandons ce qui suit :

a)- Appel à la sainteté : La sainteté constitue la priorité de tout itinéraire de vie chrétienne. C’est un appel qui concerne tout baptisé : « Soyez saints, car moi, votre Dieu, je suis Saint » (Lv 19, 2) ; aussi « Soyez parfaits comme votre Père du ciel est parfait » (Mt 5, 48). Telle est l’intention aimante de Dieu qui nous veut saints et parfaits comme lui.

b)- Formation des Laïcs : La nécessité de la formation des laïcs à l’apostolat dynamique et responsable est un besoin réel. On formera des laïcs grâce à l’appui des projets de formations à travers le Conseil National de l’Apostolat des Laïcs (CNALC) et au démarrage du Centre National du Laïcat Congolais. Les laïcs doivent être encouragés à être « sel de la terre et lumière du monde » (Mt 5, 12-14). Ils doivent être prophètes, c’est-à-dire porteurs du message évangélique dans les différents milieux de vie. Le Pape Paul VI dit que le champ propre de l’activité des laïcs, c’est le monde de la politique, de la réalité sociale, de l’économie…. (cf. Pape Paul VI, Evangelii Nuntiandi, n°70).

c)- Accompagnement des laïcs : Le fidèle laïc a besoin de l’accompagnement spirituel dans sa mission dans la société pour atteindre la gloire de Dieu. « Les laïcs, comme tous les fidèles, ont le droit de recevoir en abondance des pasteurs les biens spirituels de l’Église, surtout le réconfort que procurent la Parole de Dieu et les sacrements (Can 682). Que les laïcs manifestent donc aux Pasteurs leurs besoins et leurs désirs avec liberté et cette confiance qui conviennent à des fils de Dieu et à des frères dans le Christ » (Lumen Gentium, n°37).

5- De la Famille :

20. La famille, lieu d’amour, de partage et d’épanouissement pour tous, se doit, par le biais de la Commission de la famille, sous l’impulsion d’une nouvelle dynamique de formation, d’accompagnement et d’orientation, d’atteindre l’idéal d’un développement socio-économique viable. Car « l’avenir de l’humanité passe par la famille » (Jean Paul II, Familiaris Consortio, n°86). En faisant recours à nos deux Assemblées Plénières sur la famille (2015 et 2016), nous soulignons encore la nécessité d’une bonne pastorale de la famille, par la mise en place des stratégies optimales capables de conduire vers la stabilité des familles. Nous demandons aux groupes ou mouvements de la pastorale de la famille et de la vie de relancer, de raviver cette pastorale. Nous affirmons qu’il est urgent d’élaborer un directoire de la pastorale de la famille pour la préparation au mariage, le suivi moral, psychologique et spirituel des jeunes couples, pour la bonne conduite des familles chrétiennes.

21. Dans le message du centenaire, les Évêques du Congo demandent : « qu’au sein de la famille chrétienne règnent l’amour, l’entraide et le soutien mutuel. Il faut y insister aujourd’hui, plus que jamais, en ce tournant important de la vie économique de notre pays. Car la recherche de l’argent et des richesses crée de plus en plus de l’égoïsme. On ne veut plus partager avec son époux, ou sa femme, ou ses enfants ou les siens. Parents chrétiens, l’éducation chrétienne de vos enfants vous revient, en premier lieu » (Messages des Évêques du Congo lors du Centenaire de l’Évangélisation du Congo, en Mars 1983 : Les Ombres et les Lumières de l’Église Catholique dans notre Pays, n°22 et 23).

6- De la Pastorale d’ensemble :

22. Devant les limites de notre pastorale d’ensemble et l’essor des nouveaux courants religieux, l’appauvrissement et l’asservissement de notre peuple, nous devons davantage orienter notre pastorale vers un véritable éveil de la conscience chrétienne et citoyenne. Le meilleur service que peut offrir la CEC est de garantir des formations d’éveil de conscience. Car beaucoup de confusion proviennent, en effet, d’un manque de connaissances suffisantes en matière de foi et de morale. Un renouvellement et un approfondissement d’une catéchèse continue et de qualité pour les adultes est un présupposé indispensable pour un renouvellement de l’apostolat. En effet, l’Église est toujours en mission, car la Mission fait partie de son être même ; elle existe pour évangéliser (Paul VI, Evangelii nuntiandi, n°14). Cette tâche obéit pleinement au projet de Dieu qui « veut que tous les hommes soient sauvés et parviennent à la connaissance de la vérité » (1Tm 2, 4-5).

23. Il nous faut donc les moyens nécessaires qui permettront de redynamiser notre pastorale d’ensemble et réaménager les pastorales particulières au sein de l’Église du Congo. Le premier moyen c’est d’abord notre foi sincère en Jésus-Christ. La promotion des valeurs, la discipline, l’unité et la cohésion sont des objectifs capitaux et sine qua non pour une bonne pastorale. On ne devient chrétien qu’ensemble, avec les autres dans la communion des saints. (Cf. 1 Cor 12). Les nouvelles provinces ecclésiastiques érigées en 2020 offrent un horizon nouveau pour une pastorale nationale de proximité, en donnant la possibilité et la facilité aux diocèses concernés d’organiser des activités ecclésiales dans leur province. Nous sommes convaincus que le renouvellement de l’Église aujourd’hui est plus qu’une urgence. Que notre pastorale soit plus que jamais fondée sur la Parole de Dieu en vue de la pratique de la foi.

VI. EXHORTATIONS ET APPELS

1. Aux prêtres et aux personnes consacrées

24. Chers prêtres et personnes consacrées, en cette année du cinquantenaire de notre existence, nous voulons avant tout vous remercier pour votre engagement et dévouement au sein de vos communautés et paroisses. Nous vous invitons à persévérer dans votre vocation et à élargir le champ de la moisson du Christ à travers votre apostolat et votre témoignage de vie. Nous sommes conscients des difficultés de tout genre que vous rencontrez au quotidien, mais nous vous rappelons de garder votre lampe allumée (Lc 12, 35) et de résister à la tentation de la vie mondaine qui risque de ternir votre identité de prêtres et de personnes consacrées. Soyez fidèles à votre vocation, à vos engagements sacerdotaux et religieux. Évitez, fuyez les pratiques païennes et immorales. En tout temps et en tout lieu, comportez-vous comme des ministres du Christ (cf. Cor 4, 2), cultivez en vous l’humilité (cf. Phi 2, 3-8). Que l’Evangile du Christ soit toujours votre priorité.

2. Aux fidèles laïcs

Chers Fidèles du Christ,

25. Nous voulons vous rappeler que par votre baptême vous êtes devenus des chrétiens et donc fidèles du Christ, en revêtant en vous les trois fonctions de prêtre, prophète et de roi. Nous voulons aussi vous rappeler que la foi sans les œuvres est morte (cf. Jc 2, 20). Pour ce faire, nous attirons votre attention sur la réalité du témoignage de votre vie qui nous est rapporté au quotidien. Cela ne nous honore pas et est loin de faire notre fierté. (cf. Les messages des évêques de 2010 et 2011).

26. Nous remarquons qu’au regard des antivaleurs qui gangrènent notre pays, les chrétiens sont loin de faire la différence. Dans les familles, certains de ceux qui maltraitent les orphelins, les veufs, les veuves, les époux et les épouses ne sont-ils pas chrétiens ? Dans les services, parmi ceux qui sont coupables de détournements ou qui usent de la corruption, la concussion, le trafic d’influence, la démagogie, la délation, etc. n’y a-t-il pas des chrétiens ? Et parmi les chauffeurs et les contrôleurs de bus qui font payer au-delà du raisonnable, avec le soi-disant phénomène des demi-terrains, n’y a-t-il pas des chrétiens ? À l’école, à l’université, le chrétien enseignant se distingue-t-il facilement ? Au marché, les chrétiens vendeurs et vendeuses utilisent-ils de bonnes mesures et fixent-ils des prix justes ? Les hommes et les femmes politiques véreux, certains ne sont-ils pas chrétiens ? Certains collecteurs d’impôts sont-ils vraiment différents de ceux décriés dans la Bible ? (cf. Lc 3, 12-13) Certains agents des forces de l’ordre, qui, au lieu d’assurer la sécurité des biens et des personnes, font tout le contraire de ce qu’exige leur devoir, n’y a-t-il pas parmi eux des chrétiens ou des croyants ? Certains agents de santé qui vendent les produits aux patients ne sont-ils pas chrétiens ? La liste n’est pas exhaustive.

Chères filles et chers fils,

27. Revenons à la raison ! « Ne vous conformez pas à la mentalité du siècle présent. Mais soyez transformés par le renouvellement de votre intelligence, afin de pouvoir discerner la volonté de Dieu, ce qui est bon, agréable et parfait » (Rm 12, 2). Saint Paul vous exhorte à ne plus marcher comme des païens, qui marchent selon la vanité de leurs pensées (cf. Éph 4, 17), « Mais devenez des imitateurs de Dieu comme des enfants bien-aimés et marchez dans la charité à l’exemple du Christ qui nous a aimés et qui s’est livré lui-même à Dieu pour nous comme une offrande et un sacrifice de bonne odeur » (Éph 5, 1-2).

3. Aux familles

28. Famille Congolaise, nous voudrions avant tout te rappeler que tu trouves tes origines dans le dessein de Dieu comme nous le rapporte le récit de la création. Dieu a voulu que l’homme et la femme soient une seule chair et forment ainsi la famille (Gn 1, 27). La famille est une réalité intrinsèquement liée au mariage. (cf. Gn1, 28). Fidèles du Christ, nous vous exhortons à valoriser, promouvoir, protéger, défendre la famille et ses valeurs. Le fils de Dieu, en prenant chair dans le sein de la Vierge Marie, a voulu montrer au monde l’importance de la famille, premier lieu de culture et d’apprentissage à la vie (cf. Message des Évêques du Congo de 2015).

29. L’occasion est donc tout indiquée pour nous, en cette année jubilaire, de nous interroger sur la qualité de l’éducation dans les familles. Les phénomènes de gain facile, de vol, de viol, de violence, de tricherie, de détournement, et plus encore des enfants de la rue et de l’insécurité généralisée imposée par les bébés noirs, les koulounas… trouveraient une première réponse dans la famille, si les parents se montraient responsables et engagés à y mettre fin. C’est à cette prise de conscience que nous pouvons engager la famille vers un lendemain meilleur. Nous dénonçons avec fermeté les divisions et séparations qui règnent au sein des familles. Que les familles chrétiennes deviennent de plus en plus des « Églises domestiques », des lieux de prière, d’éducation et de formation (cf. Africae Munus, n°42). Chères familles, nous vous portons dans nos prières et vous accordons notre bénédiction.

4. Aux enfants et jeunes

Chers enfants et jeunes, vous nos filles et fils !

30. Depuis toujours vous avez été notre priorité. En ces moments où nous célébrons les 50 ans de notre Conférence Épiscopale, nous pensons particulièrement à vous ; vous les missionnaires d’aujourd’hui et de demain. La crise sanitaire actuelle vous a empêchés de réaliser certains de vos projets, voire de vivre pleinement votre engagement de chrétien et de disciple du Christ. Certains d’entre vous ont même cessé de venir à l’Église ou ont fait d’autres choix. Sachez que nous, vos Pasteurs, souffrons avec vous car, nous dit Saint Paul, « nous formons tous un seul corps, si un membre souffre, tous les membres souffrent avec lui » (1 Co 12, 26).

31. Dans cette situation difficile que nous traversons, et dans le souci de nous relever, nous vous invitons à être de véritables missionnaires en étant des témoins du Christ, comme le précise le Pape François : « Ainsi, aujourd’hui encore, Dieu dit à chacun de vous : “Lève-toi !”… Car il n’est pas possible de recommencer sans vous, chers jeunes. Pour se relever, le monde a besoin de votre force, de votre enthousiasme, de votre passion. C’est en ce sens que nous voudrions méditer avec vous sur le passage des Actes des Apôtres dans lequel Jésus dit à Paul “ Lève-toi ! Je te rends témoin de ce que tu as vu” (cf. Ac 26, 16) » (Pape François, Message pour la XXXVIème journée mondiale de la jeunesse, du 14 septembre 2021). Ainsi donc, nous vous invitons à vous lever pour changer la société congolaise dans la lutte contre les antivaleurs. Allez dans tous les coins et recoins de notre pays, touchez les cœurs de vos frères et sœurs, ramenez au Christ vos frères et sœurs désorientés et égarés, devenus esclaves de la drogue, de la violence et du mal. Nous, vos Pasteurs, nous sommes avec vous, nous vous accompagnons dans nos prières afin de bâtir un Congo nouveau, beau et prospère, où l’amour est au centre et non plus le tribalisme ou le régionalisme comme le souligne votre hymne de la jeunesse. Nous vous invitons à la prière quotidienne et fervente.

5. Aux acteurs politiques

32. Acteurs politiques de notre pays, nous vous saluons pour votre engagement dans ce domaine précieux qui vous invite à la loyauté, au patriotisme, au service et à la notion du bien commun. Comme en toutes choses, faire de la politique exige une vocation. En parcourant l’histoire de notre pays, en 61 ans d’indépendance, la politique congolaise a été trop souvent marquée par des tensions, des déchirements, des querelles, qui ont un impact négatif dans la volonté de construire le pays. Certains hommes ou femmes politiques n’ont cherché qu’à privilégier leurs intérêts au lieu de ceux de la Nation ; on donne l’impression de faire la politique dans le seul but de s’enrichir ou de chercher des postes, oubliant que la politique est l’art de gérer la cité.

33. En reprenant ici nos différents messages, nous dénonçons avec vigueur les mauvaises pratiques utilisées dans les milieux politiques. Nous vous invitons à une politique plus saine et bienveillante motivée par les valeurs républicaines. Avec le Pape François, nous vous invitons à la fois à une charité politique et à une charité sociale : « Cette charité politique, écrit le Pape François, suppose qu’on ait développé un sentiment social qui dépasse toute mentalité individualiste. La charité sociale nous fait aimer le bien commun et conduit à chercher effectivement le bien de toutes les personnes » (Fratelli Tutti, n°182). Au nom du Seigneur, exercez votre vocation politique en faisant le bien et en voulant le bien du peuple ; le Seigneur saura vous récompenser.

6. Aux gouvernants

34. Chers gouvernants de notre pays et membres de l’exécutif, en cette année jubilaire, nous voulons vous rappeler votre mission, noble mission au service de la nation et du peuple congolais. Nous reconnaissons ce que vous faites pour le pays. Nous vous encourageons à faire plus, en pensant au bien-être de la population dont vous avez la charge. Le peuple vous juge par rapport à ce que vous faites en sa faveur. Il attend de vous la garantie des besoins élémentaires de la vie : l’eau, l’électricité, le travail, la santé, pour une vie digne. Le peuple n’a pas seulement besoin de discours mais des faits. Nous voulons vous rappeler que vous êtes là au nom du peuple. Ayez conscience que toute mission implique le service, le service à la Nation. Les antivaleurs prennent le dessus partout et nous assistons malheureusement aux détournements, au vol, à l’impunité, à l’injustice, à l’enrichissement d’une minorité au détriment de la majorité. Nous vous disons que le peuple a besoin de gouvernants qui pensent à lui. Par la miséricorde de Dieu, ayez pitié du peuple qui vous est confié.

35. Il y a de la misère dans les familles, beaucoup manquant du minimum. Nous constatons l’augmentation des prix des denrées et services alimentaires. Les conditions sanitaires dans les hôpitaux se dégradent de plus en plus, d’où l’augmentation des cas de décès. Aujourd’hui, surtout depuis le déclenchement de la crise sanitaire due à la pandémie à coronavirus, les moyens de déplacement deviennent de plus en plus difficiles, les bus ou transports en commun font des demi-terrains, sous le regard indifférent des autorités publiques. Les gens sont dépourvus de moyens pour faire face aux situations actuelles alors que chacun a le droit de connaître son état de santé. Dans ce contexte de précarité, nous ne comprenons pas l’augmentation du prix du test PCR passé de 20 à 40.000 FCFA. Nous continuons inlassablement à prier pour vous pour que le Seigneur qui est venu pour servir et non pour être servi (cf. Mt 20, 28), vous inspire le goût du service et un sens élevé du patriotisme.

7. Aux forces de l’ordre

36. Il est noble votre métier lorsqu’il est exercé selon les normes universelles du droit ! Vous êtes appelés à défendre la Nation et les idéaux de paix à tout prix. Votre mission exige de vous une loyauté impartiale. Elle consiste à défendre la République, à garantir la paix et la sécurité des personnes et des biens. Ne commettez ni extorsion, ni fraude envers personne, contentez-vous de votre solde (cf. Lc 3, 14). Nous prions le Seigneur pour vous afin que ces objectifs nobles ici résumés puissent être poursuivis et atteints par l’engagement désintéressé de chacun de vous. « Heureux les artisans de paix, car ils seront appelés fils de Dieu » (Mt 5, 9).

8. Aux agents de santé

37. Nous n’avons jamais cessé de louer votre dévouement, votre disponibilité et votre abnégation. Et cela s’est encore confirmé dès le début de la pandémie de Covid-19 où certains parmi vous ont perdu leur vie en sauvant des patients. Ces actes héroïques nous ont fortement marqués et nous ne cessons de prier pour le repos de leurs âmes. Nous vous invitons de nouveau à beaucoup d’humanisme et de solidarité humaine, comme déjà dit dans notre appel du 15 octobre 2017, car des malades continuent à mourir par négligence, par manque de soins, d’attention, de moyens… Certes vous êtes parfois confrontés à des retards de paiement de salaires, mais cela ne doit pas vous amener à le faire payer aux patients qui sont l’image du Christ souffrant. Vivez votre mission dans la société, dans vos lieux de service. Le Christ nous interpelle et il s’identifie aux nécessiteux, aux malades qui interpellent nos dons et talents : « … j’étais malade, et vous m’avez visité… ». (Mt 25, 36). Nos prières vous accompagnent et vous avez notre soutien paternel.

9. Aux personnes de bonne volonté

38. À vous toutes, personnes de bonne volonté, nous tenons à vous remercier pour ce que vous êtes et faites. Nous vous invitons, partout où vous êtes, à persévérer dans le bien en vous éloignant davantage du mal. Nous tenons aussi à vous dire qu’en cinquante ans, nos prédécesseurs et nous-mêmes, fidèles à notre mission de pasteurs et guides, avons cherché à vous conduire sur le chemin du Christ et du Salut, à travers nos messages et déclarations. Nous vous demandons de relayer cet enseignement pour qu’il soit connu et vécu au quotidien. Nos messages ont pour seul but d’orienter les cœurs vers Dieu et d’aider le peuple au respect de la dignité de la personne humaine et du bien commun. Que le Seigneur vous aide à cultiver les valeurs de citoyenneté, d’honnêteté et de service envers la nation et envers Dieu, à travers vos frères et sœurs.

CONCLUSION

39. Filles et fils bien aimés, au terme de ce message du cinquantenaire, nous rendons, une fois de plus grâce à Dieu pour ses bienfaits à l’égard de notre Église locale et pour ce que nous avons pu faire ensemble. Nous demandons pardon au Seigneur pour nos manquements. Au terme de notre 50ème Assemblée plénière, nous lui confions cette année jubilaire, nos activités pastorales, nos communautés, nos familles et surtout notre pays le Congo. Au Seigneur, nous demandons le don de la paix pérenne en terre congolaise et dans les familles ; que cette paix si chère à tous, parte de nos cœurs pour que nous puissions construire, autour de nous, les valeurs de justice, de solidarité et d’amour. Combattons chaque jour les antivaleurs, en hausse dans notre société. « Oublions ce qui nous divise, soyons plus unis que jamais » (cf. L’hymne nationale de la République du Congo). Que le Seigneur nous bénisse tous et toutes et que Marie Reine de la paix et Notre Dame du Rosaire intercède pour notre Église, nos familles, nos communautés et pour notre cher pays le Congo.

Fait à Brazzaville le 17 octobre 2021

 

Les Archevêques et Évêques du Congo

 

 

 


 
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