CONFÉRENCE ÉPISCOPALE DU CONGO


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TOUS APPELÉS, CHACUN PAR SON NOM

lundi 3 août 2020

PAROLES D’ÉVÊQUE N° 5

Réunis pour notre I8ème Assemblée Plénière de la CEC, du 23 au 30 avril 1990, à Ouesso, nous, Évêques de la République Populaire du Congo, adressons le Message que voici au Peuple de Dieu dont nous avons la charge pastorale.

L’an passé, nous avons traité du statut des prêtres diocésains. Cette année, en vue du Synode des Évêques qui doit se réunir à Rome sur le thème de la formation des prêtres, nous avons préparé, en Assemblée Plénière, notre contribution à cette réflexion de l’Église Universelle.

A l’issue de nos travaux, nous éprouverons le besoin de situer la vocation sacerdotale dans son milieu vivant, là où elle prend racine et s’épanouit pour le bien de l’Église et du monde. C’est, en effet, au cœur de la mission de l’Église à laquelle participent tous les baptisés, que prennent naissance et signification toutes les vocations sacerdotales et religieuses.

Frères et Sœurs,

Nous devons discerner les signes des temps. Notre Église doit renouveler la conscience qu’elle a de la mission de salut que Jésus-Christ lui confie chaque jour, au service de notre peuple.

Le temps nous presse ; des chemins hier encore fermés vont bientôt s’ouvrir devant nous. Sommes-nous prêts à y marcher avec assurance et à y prendre des initiatives capables de répondre à l’attente de tous ceux qui, aujourd’hui, mettent leur espérance en Jésus-Christ et en son Église ?

Nous pensons que cette nouvelle prise de conscience de l’Église passe par la nécessité, pour chacune et chacun d’entre nous de répondre en toute liberté et responsabilité à l’appel de Dieu, qui est sa propre vocation humaine et chrétienne.

Pour vous aider à discerner toutes ces vocations et à y répondre pour le plus grand bien de notre peuple, nous vous disons ce qui suit :

Le jour de notre Baptême

1. le jour de notre Baptême, chacun de nous a été appelé dans l’Église par son nom.

Dans la foi chrétienne, chacun de nous considère cet appel solennel qui fait partir de la célébration du Baptême, comme un appel réel, une vocation. Le Seigneur choisit ceux qu’il veut et II les appelle à se libérer du péché, pour vivre une vie nouvelle, pour la gloire de Dieu et le salut de tous les hommes (Mt 9, 37-38).

2. Mais il ne suffit pas que chacun de nous entende l’appel de Dieu dans la cérémonie de son Baptême. Il faut encore que chacun entende cet appel de manière précise et très concrète, comme le jeune Samuel l’entendit durant son sommeil dans le sanctuaire de Silo.

"Durant le sommeil", cela peut signifier dans la profondeur et le secret de notre conscience, là où les désirs les plus forts et les plus décisifs plongent leurs racines.

Comment reconnaître la voix de Dieu au fond du cœur

Comment chacun de nous peut-il reconnaître, (discerner) au fond de son cœur l’appel du Seigneur, c’est-à-dire sa propre vocation chrétienne ? Nous pouvons chercher, en lisant la Bible, sous quelle forme les grands Serviteurs de Dieu dans l’Alliance ancienne et dans la nouvelle ont reçu du Seigneur leur vocation chrétienne authentique sur deux aspects, deux versants bien distincts et pourtant inséparables.

L’appel de Dieu est ressenti comme un grand désir de le connaître, de Lui appartenir, de vivre dans la lumière de sa sainteté, d’obéir à sa loi, d’être conduit par Lui sur les chemins de la vie, de recevoir de Lui les dons de sagesse, de communier à son amour et de célébrer sa gloire dans l’Éternité.

Frères et sœurs, la vocation chrétienne est désir de Dieu, amour de Dieu, joie et lumière de Dieu, présence de Dieu trois fois Saint dans nos cœurs.

Mais la vocation est aussi et en même temps une mission reçue de participer en quelque manière au salut du monde. Chacun reçoit cette mission sous la forme d’un grand désir de voir tous les hommes libérés du péché, triompher de la souffrance et de la mort et se réconcilier dans la justice et la vérité. Ce grand désir de sauver les hommes en les arrachant au règne du péché et de la mort est un don de Dieu qui s’appelle l’espérance.

Regardons Moïse, il cherche Dieu sur le sommet des montagnes, il veut connaître son nom, il se prosterne en sa présence dans le silence du désert. Mais en présence de Dieu, son cœur brûle du désir de libérer son peuple esclave en Égypte.

3. Oui ce double désir est bien la marque de toute vocation chrétienne. Relisons l’Évangile de Jean et la vocation des premiers disciples. Jésus choisit des hommes et des femmes, qui portent en eux l’espérance d’Israël, c’est-à-dire un désir brûlant de voir la libération de leur peuple opprimé (Jn 1 : 43).

Quand Jésus rencontre Nathanaël, Il lui dit "toi, tu es un vrai Israélite et tu es sincère". Dans le langage de ce temps-là en Palestine, cela voulait dire "toi, tu es un vrai militant et tu penses au salut de ton peuple. Quand tu priais sous le figuier, je t’ai vu"( Jn 1,45-51).

La Vierge Marie elle-même a été choisie parmi ceux qui portaient en eux l’espérance d’Israël comme un don de l’Esprit. Écoutez le Cantique de Marie. Maintenant qu’elle sait que le Sauveur du monde va naître et qu’elle le porte dans son sein, elle ne pense plus qu’au salut des pauvres de son peuple et elle rend gloire à Dieu (Le 1, 46-55).

En répondant à leur vocation, les prophètes et les apôtres ont rouvert à l’humanité les chemins de salut, ces chemins que les fils d’Adam n’auraient jamais dû quitter.

En effet, le livre de la Genèse nous enseigne qu’en créant l’homme, Dieu dans son dessein d’amour, le destinait à habiter la terre, et à la dominer, en toute responsabilité, en toute justice et dans le respect de Dieu et de sa loi, en alliance et en communion avec Lui.

« Croissez, multipliez et dominez sur toute la créature », telle est la bénédiction prononcée par Dieu sur l’homme à sa naissance, telle est notre vocation humaine jusqu’à la consommation des siècles. Le péché nous en écarte, Jésus nous y rappelle et rouvre pour nous les chemins du salut, de la réconciliation et de la paix.

AUJOURD’HUI AU CONGO DIEU APPELLE DES HOMMES ET DES FEMMES

4. Aujourd’hui dans notre Église au Congo, le Seigneur continue à faire entendre son appel, au fond des cœurs chrétiens, sous des formes diverses et nouvelles. Nous voulons, frères et sœurs, en citer quelques unes, pour nous aider à mieux comprendre en quoi consiste l’appel de Dieu et sous quelles formes il peut être entendu.

a. Sauver la Famille

Des hommes, des femmes et des jeunes peuvent aujourd’hui témoigner du grand désir qui est en eux de sauver la famille congolaise de tous les maux qui la détruisent sous nos yeux et la réduisent à l’impuissance : immoralité, magie, jalousie, instabilité des foyers, mauvaise éducation des enfants, etc...

C’est ainsi que nous voyons des chrétiens et des chrétiennes retrouver les chemins de la chasteté, la pratique du pardon et du conseil et réfléchir en toute responsabilité aux moyens de faire renaître leurs familles avec toutes leurs capacités de bonheur, en les purifiant de toutes les maladies endémiques qui les rongent.

Oui, frères et sœurs, la vocation au mariage est une vocation chrétienne : elle est un appel à la Sainteté ; la famille est un monde à sauver.

b. S’engager dans une profession

Mais beaucoup d’autres réalités de notre pays sont marquées par le péché et la corruption. Elles appellent les chrétiens décidés à se dévouer au nom de Jésus- Christ pour le salut de leurs frères.

Certaines professions exigent tout particulièrement de ceux qui s’y engagent une vraie générosité, un grand amour des hommes, une indéfectible fidélité à Dieu.

Nous pensons tout particulièrement aux professions de l’enseignement, de la santé et du droit. Trois domaines où notre pays souffre d’une grave insuffisance morale et spirituelle.

Trois domaines clés pour l’avenir de notre peuple. Trois domaines dans lesquels aucun redressement ne peut être envisagé sans que se lèvent parmi nous des hommes et des femmes appelés par Dieu dans les profondeurs de leur conscience à donner le meilleur d’eux-mêmes, pour le salut de tous. Mais nous pensons aussi à la renaissance des campagnes, exigence incontournable de notre développement économique, culturel et social.

Pour que nos campagnes revivent, il faut que toute une élite, professionnelle, sociale et spirituelle se sente appelée à y vivre, pour y faire renaître la vie.

Nous pensons également à la voie nouvellement ouverte dans notre pays à l’initiative économique et sociale des personnes et des groupes.

Prendre aujourd’hui dans notre pays, une initiative économique porteuse d’espoir, exige que se lèvent des hommes et des femmes conscientes des enjeux sociaux et spirituels du développement économique et prêts à affronter toutes sortes de difficultés et d’épreuves. L’argent et les compétences ne suffisent pas, il faudra investir dans notre développement économique et social beaucoup de générosité, d’honnêteté et d’espérance véritable.

Nous ne pouvons oublier toutes les professions de la communication dont l’importance primordiale nous est, à chaque instant, rappelée par le Pape Jean-Paul II. Porteuse de mensonges ou de vérité, de fraternité ou de haine, de vraie beauté ou d’abominations, d’incitations à la déchéance, les moyens de communication sociale appellent aujourd’hui des pionniers, des militants, des enfants de lumière, des artisans de paix, des prophètes, des artistes, des assoiffés de justice et de vérité, qui donnent aux messages véhiculés par les médias un contenu conforme à cette vérité et à cette justice.

C’est l’occasion pour nous, Évêques, de dire notre indignation et notre vive préoccupation lorsque nous voyons que les cinémas de nos villes programment de plus en plus et très souvent, en toute impunité, des films à caractère pornographique.

Un trafic de cassettes vidéo, également pornographiques, se développe dans notre pays au vu et au su de tous. Les parents démissionnent devant l’engouement des jeunes et même des enfants pour ces spectacles corrupteurs. Non seulement on achète des cassettes, mais on ne prend aucune précaution pour les tenir hors de la portée des petits. Qui a intérêt à voir notre jeunesse se traîner dans cette boue où se corrompent les valeurs les plus sacrées de l’amour, de la famille et de la société ?

c. La passion du bien commun.

Frères et sœurs, nous n’avons pas tout cité. Mais nous voudrions vous dire toute l’espérance que nous mettons en chacun de ceux et de celles qui parmi nous, brûlent d’une vraie soif de faire le bien dans leur vie de famille, dans leur vie de travail et dans leur vie sociale.

Nous les invitons à reconnaître dans ce désir généreux qui est en eux un véritable appel de Dieu qui veut que tous les hommes soient sauvés, et une invitation à se mettre à l’école de Jésus-Christ, le seul Sauveur en qui il n’y a ni mensonge, ni volonté de puissance, mais amour et vérité.

Évidemment notre pensée va à ceux et à celles qui, de la base au sommet de la société, sont en charge du bien commun. Appelés à servir et non à se servir, ils ont devant eux la possibilité de faire le bien ou le mal, selon l’esprit qui est en eux : esprit de lucre, de domination, d’orgueil ou esprit de justice, de vérité et de paix. Puissent- ils être animés par l’espérance véritable de voir à l’horizon de notre temps le salut des pauvres de notre peuple (Le 1, 46, Cantique de Zacharie).

Une Église dans le monde

5. Revenons, frères et sœurs, à l’enseignement du Concile Vatican II sur l’Église dans le monde de ce temps. Il nous rappelle en des termes nouveaux, ce que l’Église a toujours pensé d’elle-même. L’Église existe dans le monde pour être le sacrement du salut, c’est-à-dire pour témoigner, en y coopérant, de la volonté de Dieu de sauver tous les hommes par Jésus-Christ, avec Lui et en Lui (Prière eucharistique. III).

L’Église existe pour que ceux que Dieu a choisis et appelle au fond de leur cœur puissent s’approcher de Jésus-Christ, se convertir à sa parole, devenir membres de son Corps et coopérateurs de sa mission de salut, chacun selon la grâce qu’il reçoit. L’Église n’existe pas pour elle-même, mais pour le salut du monde. L’Église ne parle pas d’elle-même, mais de Jésus-Christ, Sauveur du monde. A chaque époque de l’histoire et au cœur des événements qui marquent la vie de chaque génération nouvelle, l’Église doit redécouvrir la manière concrète, significative et efficace dont elle doit accomplir sa mission de travailler au salut des peuples auxquels elle est envoyée, et leur annoncer la Bonne Nouvelle du Salut et de la libération de tous les hommes en Jésus-Christ.

L’époque que nous vivons est pour tous les peuples de l’Afrique et du monde, une période de remise en question et de réajustement de toutes les structures sociales, politiques, économiques et culturelles. Nos sociétés et nos cultures doivent retrouver en elles-mêmes le nouveau dynamisme qui leur est absolument indispensable pour se transformer de l’intérieur en accueillant les innovations et les progrès qui s’imposent à tous les peuples (sur toute la surface) de la terre.

Tandis que nous avons le souci d’annoncer l’Évangile au cœur de nos réalités culturelles, nous partageons les préoccupations de tous ceux qui s’interrogent sur la manière d’accueillir dans nos cultures les grandes innovations culturelles et sociales qui sont pour nous, les formes modernes de la démocratie, de l’état de droit, de l’initiative économique, de la communication et de la science.

Nous sommes très conscients de ce que toutes ces transformations économiques, politiques et sociales ont une dimension culturelle, morale et spirituelle. Les chrétiens sont appelés à s’y engager avec toutes les richesses spirituelles, morales et intellectuelles, et tout le dynamisme qu’ils puisent dans leur vie en Église.

A la lumière de ces enseignements, nous devons nous demander si notre Église est effectivement aujourd’hui une pépinière de véritables vocations humaines et chrétiennes pour le salut du Congo, de l’Afrique et du monde.

Dans notre Église, les hommes, les femmes et les jeunes que le Seigneur appelle à Lui, trouvent-ils les moyens de se préparer et de se former à leur mission de salut et de se renouveler sans cesse dans l’esprit de leur vocation chrétienne et humaine ?

Dans notre monde complexe et soumis à des transformations rapides et profondes, toute vocation humaine et chrétienne doit répondre à deux exigences complémentaires et permanentes : "la compétence et la sainteté".

Notre Église doit donc être, pour tous ceux que le Seigneur appelle à la vie chrétienne, un lieu de formation et de sanctification, un lieu de préparation à la mission et à l’engagement dans la foi.

FORMATION DES LAÏCS

Besoins ressentis :

6. Lorsque nous réfléchissons aux structures de formation que nous mettons en place, nous ne devons jamais perdre de vue le but que nous poursuivons. L’Église ne doit pas se préoccuper uniquement d’entretenir ses propres structures, elle doit mettre au monde des chrétiens pour le salut du monde. Elle doit donc se doter non seulement des moyens de catéchèse nécessaires à l’initiation chrétienne des enfants, des jeunes et des adultes, des gens simples et des intellectuels, mais elle doit aussi développer des moyens d’éducation, d’information, de recherche et de réflexion pour tous ceux qui veulent s’engager en chrétiens dans leur vie familiale, sociale et professionnelle.

Chaque besoin ressenti est un appel, auquel doivent répondre des initiatives correspondantes. Les agents de la santé ont donné l’exemple d’un mouvement qui s’est constitué en vue de promouvoir la vocation chrétienne de tous les professionnels chrétiens de la santé.

Les familles chrétiennes, elles aussi, cherchent depuis de nombreuses années à mettre en place un mouvement de formation aux responsabilités conjugales et familiales. Ce mouvement doit se renouveler et se développer. En effet, dans la nouvelle conjoncture économique, le rôle de la famille comme lieu d’initiative économique et sociale se trouvera considérablement accru. Il est essentiel, à l’avenir des générations nouvelles qui les attendent. Beaucoup d’autres milieux auraient besoin de voir naître et se développer au sein de l’Église, des lieux spécialisés de réflexion, de formation et d’information où les chrétiens puissent se former à leurs responsabilités chrétiennes.

C’est dans le but de promouvoir une telle fécondité apostolique, culturelle et sociale, pour la gloire de Dieu et le salut de nos frères que nous devons nous préoccuper de perfectionner sans cesse, nos structures d’initiation chrétienne, catéchétique et liturgique, et nos structures de formation et d’information permettant au plus grand nombre possible de laïcs d’acquérir des bases des sciences bibliques, de la morale, de la doctrine sociale de l’Église, de la mission et de l’engagement.

Cette formation chrétienne de base est indispensable pour que des Laïcs puissent, en toute compétence et en pleine communion avec l’Église, prendre dans leur vie familiale, professionnelle et sociale, les responsabilités et les initiatives chrétiennes dont nous avons parlé.

STRUCTURES EXISTANTES

7. Nous disposons déjà d’un certain nombre de structures : structures d’initiation et de formation chrétienne de base, structures de formation et d’information permanente ou spécialisée. Avant de songer à des initiatives nouvelles, demandons-nous ce que nous faisons des moyens dont nous disposons déjà ;

  • Formation des catéchistes ;
  • Cours de théologie pour les adultes ;
  • Programmes de réflexion et de formation au sein de chaque groupe, mouvement ou fraternité ;
  • « Week-end » du "Renouveau" ;
  • Mouvement National des Foyers Chrétiens ;
  • Initiation à l’audio-visuel ;
  • Diffusion de La Semaine Africaine ;
  • Animation de nos bibliothèques paroissiales ;
  • Groupes Évangile et Santé (GES),
  • Activités de vacances pour les jeunes : Camp de Leaders, Chantiers villes- campagnes, Camps d’Adolescents.

Certaines structures sont encore embryonnaires, comme le Forum des Jeunes Entreprises créé au sein de Comafrique, les week-ends scientifiques organisés par le Conseil National des Laïcs Catholiques, les centres de préapprentissage, en ville comme dans les campagnes, pour la réorientation des jeunes déscolarisés vers les métiers manuels.

D’autres encore se préparent à naître, par exemple pour la formation des animateurs ruraux. Enfin les sessions de formation permanente des Ouvriers Apostoliques qui attirent chaque année de nombreux participants de l’Afrique Centrale.

Aurons-nous dans un proche avenir de nouvelles initiatives à prendre, notamment dans le secteur de l’éducation, de l’enseignement, de la santé et de la justice ? Il est trop tôt pour le dire. Nous réfléchissons à ces problèmes avec le sérieux et la pondération nécessaires. La Commission Épiscopale de l’Éducation Chrétienne s’est reconstituée et elle étudie les nouvelles perspectives, à mesure qu’elles se dessinent.

Puissent les structures existantes se perfectionner et donner l’exemple de tout ce qui est possible et nécessaire dans tous les domaines, pour préparer les chrétiens de notre pays à répondre à leur vocation apostolique, dans toutes leurs exigences et toutes leurs diversités.

8. Mais la compétence ne suffit pas. Les tâches missionnaires et le salut du monde seront toujours tellement au-dessus de nos capacités humaines, qu’il serait insensé de notre part de croire qu’une formation quelconque puisse suffire à qualifier un disciple de Jésus. Moïse avoue son incompétence, mais le Seigneur le rassure : « Je serai avec toi » (Ex 3, 12).

Dieu avec nous. Lui en nous et nous en Lui. Aucune vocation chrétienne ne peut s’accomplir sans que se développe cette vie intérieure, cette vie de Dieu en nous. Nos désirs les plus généreux doivent se purifier pour devenir, en vérité, foi, espérance, amour et nous habiter, au service du Seigneur et de nos frères.

Aucune structure de formation de devra donc négliger l’initiative de la vie spirituelle, vie intérieure, vie sacramentelle, vie de communion avec l’Église et dans l’Église. En effet, faute d’avoir compris que tout appel de Dieu est vocation à la sainteté, nos meilleurs désirs et nos meilleures initiatives, risqueraient de se disperser, de s’égarer et de se dissoudre dans le subjectif, le particulier, l’humain, la recherche de soi et les ambitions personnelles.

Seul le désir de Dieu cultivé dans la foi, l’espérance et l’amour, par une authentique vie de prière, peut nous permettre de demeurer chacun à notre place, dans la véritable histoire du salut, dont l’Évangile est le sacrement, dont l’Esprit est le moteur, Jésus-Christ le berger et le Père la source et la fin.

VOCATIONS RELIGIEUSES ET SACERDOTALES

Certains parmi nous sont appelés à une consécration totale de leur vie.

9. Frères et sœurs, c’est dans ce climat de générosité profonde de tout le peuple de Dieu, attentif à écouter les appels du Seigneur et empressé à y répondre à plein cœur et à pleine vie, que certains parmi nous sont appelés à une consécration, plus totale et plus visible de leurs vies et de leurs personnes au service de Dieu, de l’Église et du monde : les uns dans le dynamisme de la grâce de leur Baptême sont appelés à la vie religieuse selon la règle d’un Institut, dans la vie commune et la pratique des trois vœux de pauvreté, de chasteté et d’obéissance ; d’autres sont appelés à exercer au service du sacerdoce commun des fidèles, le ministère du Christ, tête de son Église.

Les uns et les autres renoncent à fonder une famille et à faire carrière ou fortune dans le monde, pour se mettre entièrement au service de l’Église, de sa vie quotidienne, de sa communion locale et universelle, de ses projets apostoliques, du soin spirituel des chrétiens et du Peuple de Dieu.

APPELÉ POUR ÊTRE ENVOYÉ

10. La mission que Jésus-Christ a confié à ses disciples « Allez donc, de toutes les nations faites des disciples... » (Mt 28 ,18-20) se continue aujourd’hui par les Évêques. Ces derniers la poursuivent ensemble avec ceux qu’ils envoient dans le monde, pour être témoins de l’Évangile (prêtres, religieux et religieuses, laïcs). Il nous faut vivre cette mission du Christ. Car « la moisson est abondante ». Le souci de la mission étreint le cœur du Christ qui veut des collaborateurs.

Aussi une vocation sacerdotale ou religieuse est missionnaire ou elle n’est pas. Pour être envoyé, il faut être appelé. Les Évêques ont, en dernier ressort, la responsabilité d’authentifier les vocations sacerdotales et de confirmer prêtres et religieux dans leurs missions apostoliques.

Ainsi, nul ne se fait apôtre de lui-même. On ne s’envoie pas soi-même en mission, mais on est envoyé par l’Évêque : on est mandaté. Face à cette responsabilité, nous vos Évêques, avons trois soucis que Dieu doit partager avec nous :

  • Comment discerner la vocation de ceux qui sont appelés ?
  • Comment les former à leurs missions ?
  • Comment assurer leur subsistance, pendant leur formation et pendant toute leur vie de service ?

DISCERNER LES VOCATIONS SACERDOTALES ET RELIGIEUSES

11. Le discernement et l’accompagnement des vocations sacerdotales et religieuses est une tâche bien délicate et pleine d’exigences. Après avoir réfléchi comme nous venons de le faire à la grandeur et aux exigences de la vocation de chaque chrétien, choisi, sanctifié et envoyé pour le salut du monde, pouvons-nous douter un seul instant de la nécessité absolue de ne laisser accéder au sacerdoce ministériel et à la vie religieuse que des hommes et des femmes réellement appelés à tout quitter pour le nom de Jésus ?

Où les trouverons-nous, ces jeunes, ces hommes, ces femmes appelés à la consécration totale de leurs vies, sinon dans les mouvements d’apostolat et les tâches paroissiales où leur désir d’appartenir à Dieu et de se dévouer au salut de leurs frères les aura tout naturellement poussés à s’engager ? Les milieux naturels d’éclosion de véritables vocations sacerdotales et religieuses sont les mouvements de spiritualité et d’apostolat et les tâches paroissiales.

Aussi, même si l’on éprouve le besoin de rassembler régulièrement, les aspirants à la vie sacerdotale ou religieuse, on aura bien soin de ne pas les couper de la vie militante, apostolique et priante du Peuple de Dieu.

C’est cette vie ecclésiale qu’ils seront appelés à servir avec compétence et générosité tout au long de leur vie, pour la gloire de Dieu et le salut du monde. Au moment de l’admission dans un séminaire ou dans un postulat, qu’une communauté réellement vivante puisse témoigner de sa générosité apostolique et de la transparence de sa vie.

Outre un milieu ecclésial vivant et apostolique, les vocations, ont besoin, pour s’épanouir et pour surmonter tous les obstacles, de conseils spirituels. Il nous faut des prêtres, des religieux, des religieuses et même des laïcs qui se dévouent à ce ministère de l’accompagnement spirituel. Guider une vocation de jeune, sur les chemins de la prière, de la conversion et de la maturité est un grand travail auquel il faut avoir la conscience de s’initier pour le mener à bien.

MOYENS DE FORMATION ET D’ÉDUCATION

12. Quant à la formation humaine, intellectuelle, morale et spirituelle de tous ceux que Dieu appelle à son service dès leur jeune âge, nous avons plusieurs moyens à mettre en œuvre ; aucun ne doit être négligé.

a) Familles c chrétiennes ;

b) Mouvements d’apostolat des jeunes ;

c) Œuvres parascolaires

d) Séminaires, foyers et postulats.

a) FAMILLES CHRÉTIENNES

C’est dans sa famille, lorsqu’elle est chrétienne que la vocation d’un jeune homme ou d’une jeune fille doit être accueillie d’abord, avec toute la discrétion nécessaire, afin de respecter la liberté des jeunes, tout en leur apportant le soutien d’une éducation ferme. Lorsque la famille fait défaut pour des raisons sociales ou spirituelles, il est bon qu’un jeune aspirant à la vie sacerdotale ou religieuse puisse bénéficier du parrainage affectueux et vigilant d’un foyer ou d’un adulte.

Le rôle des parents chrétiens dans le soutien des vocations est très important. Il requiert un dialogue franc entre parents et enfants. Il s’agit pour les parents de découvrir la vocation de leur enfant, de s’y intéresser et pour les enfants de s’ouvrir à leurs parents. Ainsi les parents trouveront réponse à leurs interrogations : cette vocation est-elle réelle ? La situation sociale ne pousse-t-elle pas l’enfant à entrer dans un séminaire ?

Une autre inquiétude pour les parents est celle du soutien financier de l’enfant pendant sa formation. Devant les vocations sacerdotales ou religieuses affirmées, les réactions des parents seront souvent différentes :

- Ou bien l’enfant est issu d’une famille chrétienne et pratiquante ; la vocation est alors accueillie comme une bénédiction. Elle sera soutenue par la prière des parents.

- Ou bien l’enfant est issu d’une famille non chrétienne ou qui ne pratique plus ; la vocation risque d’être perçue comme une perte. Les parents auront l’impression d’avoir souffert « pour rien » ; ils penseront à leurs vieux jours. Ils regretteront de voir leur enfant ne plus participer à l’agrandissement de la famille ni à la résolution des problèmes familiaux. C’est pourquoi il arrivera qu’ils s’efforcent d’entraver le soutien des amis, des foyers chrétiens et de la communauté.

Bref, les influences sur une vocation sont nombreuses. Les encadreurs doivent considérer ces influences caractérisant les différents types d’éducation pour mieux aider la maturation de la vocation.

b) MOUVEMENTS D’APOSTOLAT DES JEUNES

Le rôle des mouvements d’apostolat des jeunes est essentiel dans le discernement, mais aussi dans la formation des vocations sacerdotales et religieuses. La pédagogie d’un mouvement tel que celui des « Bilengue ya Mwinda », (Jeunes de la Lumière), ayant un projet éducatif structuré et complet et proposant une démarche d’acheminement vers la maturité personnelle et l’engagement apostolique est l’un des meilleurs soutiens que l’on puisse proposer à une vocation religieuse ou sacerdotale.

A nous de vérifier la validité éducative de nos mouvements, groupes ou fraternités de jeunes, de leur apporter de véritables structures, de véritables exigences et de véritables contenus humains et spirituels.

c) INITIATIVES SCOLAIRES ET PARASCOLAIRES

Le niveau scolaire et culturel en voie de dégradation générale dans notre pays, est un souci pour tout le monde. Nous qui avons à acheminer des hommes et des femmes d’élite vers l’accomplissement de leurs vocations humaines et spirituelles, nous nous sentons tout particulièrement concernés. Ne négligeons pas les initiatives parascolaires que nous pouvons prendre pour relever le niveau scolaire et culturel de la jeunesse qui fréquente nos paroisses.

Nos bibliothèques paroissiales devraient de plus en plus fonctionner comme des centres d’appui pédagogique et d’activités culturelles et mettre à la disposition des jeunes motivés, des animateurs compétents, des documentations scolaires adaptées et des moyens audio-visuels.

Nous souhaitons que toutes les communautés paroissiales soient sensibilisées à l’œuvre des bibliothèques comme structures d’accueil, et service des jeunes. L’Église enfin, dispose d’un certain nombre d’internats, petits ou moyens séminaires, postulats ou foyers, acheminant vers le Grand Séminaire, les scolasticats et les noviciats.

d) NOS INSTITUTS : SÉMINAIRES - FOYERS...

Ces institutions sont, pour l’avenir de notre Église, d’une extrême importance. De leur qualité humaine et spirituelle dépendra la qualité des Serviteurs et des Pasteurs du Peuple de Dieu.

Pour chacune de ces institutions nous avons besoin d’élaborer des projets éducatifs adaptés à nos réalités et ouverts sur l’avenir de nos Églises, constituer des équipes d’éducateurs de la nouvelle génération, et enfin de rassembler les moyens matériels indispensables à leur bon fonctionnement. Tout cela ne peut se réaliser sans une prise en charge du Peuple de Dieu tout entier et sans une volonté très largement partagée par toutes les familles et les communautés chrétiennes de faire ce qu’il faut pour donner à notre Église les serviteurs dont elle a besoin.

Nous pensons qu’à tous les niveaux, celui de la conception des projets éducatifs, celui de la constitution des équipes d’éducateurs et celui de la gestion des moyens, la participation des laïcs chrétiens compétents et motivés est indispensable. A aucun de ces niveaux, nous ne pouvons plus nous contenter de faire purement et simplement appel à l’extérieur.

Les coopérants étrangers qui viennent nous aider doivent être accueillis dans des projets qui soient les nôtres. L’aide extérieure doit être recherchée en complément et en soutien d’efforts qui soient véritablement ceux de notre peuple chrétien. L’appel au perfectionnement humain et au progrès spirituel doit retentir avec toutes ses exigences et doit venir des profondeurs de notre conscience chrétienne fécondée par l’Esprit-Saint.

Ceci met en cause les structures de promotion des vocations et d’aide au séminaire que nous avons essayé de mettre en place. Elles ont le mérite d’exister. Comment améliorer et renouveler sans cesse leur compétence, leur dynamisme, leur enracinement dans la vie de chacune de nos communautés et chacun de nos mouvements apostoliques ?

Une chose est certaine, nous n’avons pas encore mis au service de nos séminaires, postulats, foyers et autres instituts de formation des Ouvriers Apostoliques, tous les moyens humains, spirituels et matériels dont nous disposons. Manque de coordination, de réflexion, de planification, de conscientisation de toute la communauté ecclésiale. Or, nous ne bénéficierons d’aides extérieures efficaces que dans la mesure où nous aurons su procéder à l’investissement effectif de nos moyens propres :

- Collecte en faveur des séminaires

- Unités de production et d’autosuffisance alimentaire attachées à chaque institut

- Conseils d’administration constitués pour chaque institut avec la participation des parents d’élèves, et de toutes les compétences pédagogiques, administratives, et économiques souhaitables.

- Renfermées sur elles-mêmes et sur leurs problèmes éducatifs, spirituels, et matériels, nos institutions sont menacées par le mauvais esprit, le découragement, la décadence et toutes les mesquineries de la misère.

- Alors que certains rêvent voir notre Église revenir dans l’enseignement, que faisons-nous de remarquable et de démonstratif dans nos établissements.

CONCLUSION

13. Frères et Sœurs, nous concluons ce message en nous référant à notre Saint Père, le Pape Jean-Paul II, dans son exhortation apostolique sur la mission des fidèles laïcs dans l’Église et dans le monde.

En ce moment magnifique et dramatique de l’histoire, dans l’imminence du troisième millénaire... Il n’est permis à personne de ne rien faire... il n’y a pas de place pour l’inaction lorsque tant de travail nous attend tous dans la vigne du Seigneur... il faut regarder en face ce monde qui est le nôtre avec ses valeurs et ses problèmes, ses soucis et ses espoirs, ses conquêtes et ses échecs : un monde dont les conditions économiques, sociales, politiques et culturelles présentent des problèmes et des difficultés encore plus graves que celles décrites par le Concile dans la constitution Gauduim et spes (cf. Christ Fideles Laïci). Oui, frères et sœurs, chacun de nous est appelé selon la grâce qui lui est donné, mettons-nous avec Jésus-Christ au service du « maître de ta moisson », pour la Gloire de Dieu et le salut de nos frères.

 

LES ÉVÊQUES DU CONGO

 

 


 
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