CONFÉRENCE ÉPISCOPALE DU CONGO


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LA FOI CATHOLIQUE FACE AUX NOUVEAUX MOUVEMENTS RELIGIEUX AU CONGO : LES SECTES

vendredi 16 mars 2012

16ÈME ASSEMBLÉE PLÉNIÈRE À POINTE-NOIRE
DU 18 AU 24 AVRIL 1988

Chers Frères et Sœurs,

1. Le don gratuit de Dieu, c’est la vie éternelle donnée aux hommes par Jésus-Christ. Lui-même nous a dit : « Tout pouvoir m’a été donné au ciel et sur la terre. Allez donc, de toutes les nations faites des disciples, les baptisant au nom du Père et du Fils et du Saint-Esprit, et leur apprenant à observer tout ce que je vous ai prescrit. Et voici que je suis avec vous pour toujours jusqu’à la fin du monde » (Mt 28, 19-20). Qu’est-ce que cette vie éternelle ?

La vie éternelle, c’est que les hommes connaissent Dieu, et Celui qu’il a envoyé, Jésus-Christ (cf. Jn 17, 3). Ce Jésus-Christ qui est notre vie, notre chemin affirme : « Je suis la Résurrection et la Vie, qui croit en moi, même s’il meurt, vivra ; et quiconque vit et croit en moi ne mourra jamais » (Jn 11, 25-26). Cette vie donnée en abondance, nous vient par l’Église. Jésus-Christ l’a confiée à Pierre (cf. Mt 16, 13-20) et la veut dans l’unité (cf. Jn 17, 20).

2. Tout au long de son histoire, l’Église, depuis les apôtres jusqu’aujourd’hui, par ses Pasteurs Évêques et prêtres, veille à l’exécution de l’ordre reçu du Seigneur : enseigner toutes les nations, garder les disciples du Christ dans l’unité. Dès les premiers jours de l’Église, son unité a été menacée par des enseignements erronés dont nous trouvons l’écho dans les épitres des apôtres Paul et Jean (cf. 1Co 1, 10- 16) ; Ga 1,6-7 ; 1Jn 2, 18-28).

Le Christ Lui-même en parle à ses disciples pour les mettre en garde : « Beaucoup me diront en ce jour-là : Seigneur, Seigneur, n’est-ce pas en ton Nom que nous avons chassé les démons ? En ton nom que nous avons fait bien des miracles ? Alors je leur dirai en face : Jamais je ne vous ai connus ; écartez-vous de moi, vous qui commettez l’iniquité » (Mt 7, 22-23).

3. A la Lumière de ces paroles de l’Écriture et interpellés par les signes des temps que sont la multiplicité des sectes dans la vie de notre Église, nous voulons vous dire deux choses, à vous chrétiens :

- toute personne humaine a le droit de professer sa foi en Dieu selon la voix mystérieuse de sa conscience ;

- toute atteinte à cette liberté est une atteinte à ses droits fondamentaux ; elle est contraire à la volonté divine. Mais nous vous demandons aussi de rester toujours à l’écoute de la Parole de Dieu, à l’enseignement de l’Église voulue par Dieu et qui se veut au service de la vérité et de l’unité.

4. C’est pourquoi, à la suite de Notre Seigneur Jésus-Christ, nous vous demandons de demeurer vigilants et de ne pas vous laisser égarer par les faux prophètes, particulièrement nombreux dans notre pays ces dernières années.

Rappelons-nous les mises en garde de Saint Paul à ce propos : « Un temps viendra où les hommes ne supporteront plus la saine doctrine, mais au contraire, au gré de leurs passions et l’oreille les démangeant, ils se donneront des maîtres en quantité et se détourneront de la vérité pour se tourner vers les fables » (21 m 4, 3-4).

5. Pour vous aider à rester fidèles au service du Seigneur et à la mission qu’il nous a confiée, nous vous présentons tour à tour :

- la réalité congolaise après la célébration du premier Centenaire de l’Évangélisation ;

- la foi catholique ;

- l’incompatibilité entre la foi catholique et les Sectes ;

- les orientations pastorales.

I. LA RÉALITÉ CONGOLAISE APRÈS LA CÉLÉBRATION DU PREMIER CENTENAIRE DE L’ÉVANGÉLISATION DU CONGO

Constat

6. Aujourd’hui, on assiste à une prolifération des sectes au Congo. Mais par manque de recherches exhaustives sur le phénomène, nous ne pouvons pas en parler de manière satisfaisante. Car alors, il aurait fallu donner des précisions sur leur nombre, leur dénomination, leur importance numérique, leur origine humaine et géographique, leur histoire, leur doctrine, leur stratégie de recrutement, les profils de leurs fondateurs et de leurs adeptes, leurs principales activités. Des chiffres officiels ont été avancés pour montrer la gravité du problème ; mais ce ne sont là que des chiffres approximatifs.

Pour bien les apprécier, nous avons besoin de connaître les différents paramètres utilisés par les chercheurs qui les donnent. Pour le moment, nous sommes sûrs que les sectes énumérées dans cette lettre ont une certaine audience dans la société congolaise. Nous mentionnons les sectes aussi bien d’origine étrangère que congolaise.

Qu’est-ce qu’une secte ?

7. Étymologiquement, secte vient des mots latins : secare = couper et sequi = suivre. Ainsi pour le Larousse, une secte est un ensemble de personnes qui professent la même doctrine ou encore un ensemble de personnes qui se sont séparées d’une communauté religieuse. Mais nous appelons secte ici : tout mouvement philosophico ou mythico-religieux séparé ou non d’une Église-mère et consciente de son identité. Le sont par exemple :

a) Les Sectes dissidentes du Christianisme :

- les Témoins de Jéhovah ;
- les Adventistes du septième jour ;
- les Amis de l’homme ou la secte de l’Ange de l’Éternel ;
- l’Église universelle du Christ de Montfavet ;
- l’Église Catholique Libérale ;
- les Mouvements Pentecôtistes.

b) Les Sagesses d’Occident :

- la Rose-Croix
- la Fraternité Blanche Universelle
- Ayam
- la Scientologie
- la Franc-maçonnerie
- le Mouvement Raëlien
- Eckankar.

c) Les Mouvements venus d’Orient :

- la Foi Baha’ie
- Tenrikyo
- la Mahikari.

d) Les Sectes Nationales :

- les Sectes messianiques : le Matsouanisme et les Groupes Ngunza
- les Mouvements revivalistes : la Croix-Koma...
- les Mouvements prophétiques : le Lassysme...
- les Sectes indigénistes : la secte Louzolo ou Dambage...

Insatisfactions des croyants congolais et « succès » des sectes

8. Ce que nous allons dire maintenant se réfère à l’existence globale du congolais, dans sa complexité. Nos bases sont culturelles, sociales et historiques. Le problème des sectes que nous traitons concerne les Congolais et particulièrement les Catholiques. Les sectes se présentent comme une réponse ou une solution à certaines questions et préoccupations existentielles des Congolais et des Congolaises ; elles sont le signe d’une certaine insatisfaction.

Notre monde est en situation de crise réelle et profonde dans tous les domaines. Il en résulte une vulnérabilité générale chez l’homme actuel sous forme de crises culturelle, sociale, morale, spirituelle et économique. Chacune de ces crises se manifeste comme des besoins et des aspirations.

Crise culturelle : C’est en fait la plus grave et la plus importante : elle influence toute la vie. Le monde actuel, du fait des moyens de transport très développés, des mass-médias (radio, télévision, journaux) est de plus en plus un carrefour où les différentes cultures sont obligées de se rencontrer. L’autarcie culturelle n’est plus possible. Les apports des autres nous arrivent tous à la fois, au risque d’étouffer notre propre culture. Au prix de bien de déchirements, nous sommes contraints de nous ouvrir aux autres.

Mais que choisir et que laisser ? Comment réaliser une synthèse harmonieuse au milieu de tant d’éléments disparates ? Nous savons en effet que ceux qui possèdent les moyens les plus efficaces pour véhiculer leurs civilisations imposent aux faibles leurs conceptions de la vie, entraînant une nouvelle forme d’esclavage. Il en résulte révoltes, refus et mécanismes de protection. Les nouveaux mouvements religieux qui naissent dans notre pays seraient bien le signe de cette protestation.

Crise sociale : Notre société actuelle est déchirée. Elle est ébranlée même dans ses structures de .base, par exemple la famille. Hier on parlait du lignage, du clan. Le mariage considéré comme une institution était protégée par des lois, des règles. On ne convolait pas au mariage comme on voulait. Le couple avait une mission au sein de la société. Les gardiens des lois et des conduites prescrites pour l’harmonie de la société étaient les aînés, les anciens.

9. Aujourd’hui, toutes ces institutions n’ont plus la même importance et l’autorité des anciens n’est plus respectée. L’école avec son enseignement et le savoir qu’elle donne ne saurait être qu’un lieu où l’on apprend des « choses » et des comportements sociaux étrangers à sa propre culture.

Puisque le nouveau savoir vient de l’étranger considéré comme supérieur, celui qui l’acquiert s’octroie un pouvoir et une autorité sur ceux qui sont restés au village. L’ordre et l’harmonie de la société, du village sont bouleversés. Certains mouvements religieux seraient une protestation devant ce bouleversement de l’harmonie sociale.

Crise morale et spirituelle : Certaines bases morales et spirituelles qui régissaient la vie en société et les rapports entre les hommes connaissent un ébranlement dû à l’introduction de religions nouvelles et d’un code moral nouveau dont les exigences ne sont pas les mêmes. Du coup, la société ne connaît plus l’harmonie que lui procurait l’observance des coutumes et des croyances établies par les ancêtres.

C’est parce qu’insatisfait que l’homme congolais recherche ce qui paraît le mieux correspondre à ses besoins et aspirations d’harmonie, de participation et de vérité intégrale. Les sectes se présentent comme des lieux capables de combler ces besoins et ces aspirations.

Crise économique : Inutile d’insister sur cette crise. Tous admettent qu’elle engendre la pauvreté et la dépendance, ainsi que tous ces clivages sociaux (riches - pauvres) de plus en plus prononcés qui entraînent chez ceux qui sont le plus touchés un sentiment de frustration.

Les sectes, en offrant un lieu où se pratique vraiment la solidarité, deviennent pour les .délaissés, les frustrés, une protestation contre la société actuelle qui condamne certains à la pauvreté et à la souffrance imméritées.

Les Sectes et les grandes questions vitales de l’Homme

10. La sorcellerie, l’échec, la souffrance, la maladie et la mort préoccupent au plus haut point l’homme congolais. Pour lui, tout ce qui est mal a toujours une cause : la sorcellerie. D’où le combat le plus important de l’homme est celui qu’il livre contre la sorcellerie. Tant qu’on n’aura pas vaincu la sorcellerie, racine de tout mal, on n’aura rien fait. Le Congolais attend donc que les religions, parmi lesquelles la religion catholique, s’occupent de la sorcellerie et lui donnent une réponse satisfaisante. Si elles ne le font pas, elles déçoivent.

11. Les fondateurs et animateurs de sectes exploitent habilement cette préoccupation. Ils promettent un apaisement, une solution immédiate à ces problèmes. Leurs séances de prières se réduisent à des rites d’exorcismes et à des dénonciations de personnes sorcières. Là au moins, les adeptes se sentent compris et rassurés d’être libérés des effets maléfiques du sorcier. Pendant que les grandes religions comme la religion catholique minimisent ce genre de problèmes vitaux, les sectes les abordent ouvertement, donnant ainsi une impression de libération et de soulagement ; d’où leur attrait.

Les Sectes et les forces invisibles

12. Les forces invisibles ont une influence sur les humains, les congolais y croient, les sectes le disent. Pour accéder au monde des forces invisibles dans lesquelles l’homme se trouve comme pris, et qu’il faut connaître pour maîtriser, l’homme se voit proposer trois types d’accès.

La connaissance : Cette voie est souvent initiatique : ceux qui savent, qui détiennent les «  vérités » sur le monde ne peuvent tout dévoiler à n’importe qui. Pour savoir et réussir, il faut franchir des étapes préparatoires (souvent moyennant finances). Aussi chacun est prêt à devenir adepte de celui qui est censé détenir les secrets de la nature, de la vie et de la réussite. Les possesseurs de ces connaissances de salut se réfèrent parfois aux Évangiles.

On prétend que Jésus n’aurait pas révélé toutes ces connaissances au peuple. Il aurait transmis des connaissances secrètes à l’un ou l’autre des Apôtres (Jean en particulier). Certains vont même jusqu’à prétendre que les prêtres connaissent ces vérités, mais ne veulent pas les livrer aux autres. Les grandes Églises prêcheraient donc un salut relatif. Il est préalable de se livrer aux sectes qui disposeraient de la vraie connaissance qui permettrait de triompher de toutes les difficultés de la vie.

La technique : D’autres groupes prétendent disposer d’une technique pour « capter » ces forces cosmiques. C’est plus qu’une connaissance intellectuelle ; c’est un savoir pratique qui dit Église « comment faire ». À la limite, la technique peut devenir magique. C’est un moyen sûr qui permettra nécessairement le «  succès ». Vous disposez de l’objet miracle qui vous tirera de toutes les situations les plus désespérées. Ainsi, on se laisse initier à toutes les méthodes pour disposer de plus de chance dans la vie.

Le moyen-terme peut-être une personne censée avoir le pouvoir de « capter » ces forces naturellement rebelles. Il s’agit alors de se défaire de son problème personnel pour le lui confier, inutile donc de faire des efforts soi-même. Sûr de la « chose » ou de la personne qui travaille pour nous, on devient passif.

La foi : Ici, Dieu et les forces vitales sont donnés à chaque homme. Il n’est plus nécessaire de chercher à s’en emparer ou à les « capter » ; il suffit de les accueillir. L’accueil se fait à travers l’obéissance à une parole révélée par Dieu et consignée dans un livre auquel chacun peut se référer. Il faut alors s’efforcer de bien comprendre ces paroles de vie et de se mettre dans des dispositions d’accueil nécessaires. L’écoute conduit à une mise en pratique de la parole qui suppose effort et renoncement.

13. Tous les groupes religieux baignent dans ces trois registres, avec une dominante pour chaque secte. Leur « succès » global vient de ces trois perspectives. C’est la santé, le succès scolaire ou professionnel, la réussite de la vie conjugale qui est au bout d’une bonne fréquentation de la secte.

En même temps, on se rend compte qu’aucune voie n’est totalement satisfaisante. Les forces de la vie, le bonheur, cela ne se laisse pas « capter » aussi aisément ; en effet, le propre de la vie est d’être insaisissable. La déception est donc fréquente ; et il n’est pas rare de voir un catholique passer à la Rose-Croix après un détour par le Mahikari.

Les Sectes et l’Homme concret

14. Les sectes exploitent ainsi les faits culturels, sociaux et religieux. Elles donnent beaucoup de place au groupe, à la communauté, mais elles se focalisent d’abord sur l’individu avec toutes ses préoccupations. C’est donc un fait qu’on découvre dans les sectes les préoccupations profondes de nos concitoyens. L’intérêt porté à ces besoins exprimés presque par tous publiquement exerce une réelle fascination. Voilà, en partie, par lequel biais nous expliquons le « succès » des sectes.

15. Malgré tout ce qui vient d’être dit, nous ne pouvons pas nous empêcher d’exprimer nos très vives inquiétudes à l’endroit des sectes quelles qu’elles soient. Nos réserves se réfèrent particulièrement à leur intransigeance, à leur intolérance voilée sous des apparences mielleuses, à leur méthode de recrutement et d’embrigadement, profitant des difficultés des gens et de leur ignorance.

16. Nous déplorons aussi leurs affirmations contraires à l’orthodoxie doctrinale et le dénigrement des grandes religions en particulier l’Église Catholique. Malgré la satisfaction de quelques promesses, nous leur reprochons enfin leur manque de respect et d’honnêteté.

Chers frères et sœurs, pour vous aider à rester au service du Seigneur et fidèles à la mission qu’il nous a confiée, nous vous présentons maintenant la Foi Catholique.

II. BREF EXPOSE DE LA FOI CATHOLIQUE

La Foi trinitaire

17. La Foi Catholique consiste essentiellement à croire en un seul Sauveur, Jésus- Christ, Fils de Dieu et Dieu Lui-même. Il a pris chair dans le sein de la Vierge Marie que nous honorons du vénérable titre de « Mère de Dieu ». Il a habité parmi nous pour nous révéler Dieu le Père Tout-Puissant, Créateur du ciel et de la terre, du monde visible et invisible, Source de Sainteté, d’Amour et de Vie.

18. Fils bien-aimé du Dieu vivant, Jésus-Christ est mort et ressuscité pour tous les hommes, afin de les sauver du mal, du péché et de la mort (cf. Rm 5, 12s).

Il est pleinement Dieu et pleinement Homme pour l’éternité. C’est parce qu’il est vrai Dieu et vrai Homme qu’il peut nous sauver. C’est Lui l’Unique Sauveur. En dehors de Lui, il n’y en a pas d’autre (cf. Ac 4, 12).

19. En communion avec son Père, Jésus-Christ nous a envoyé l’Esprit Saint qui nous découvre la vérité toute entière et développe en nous la Foi, l’espérance et l’amour. L’Esprit Saint est Dieu et Sauveur, au même titre que le Père et le Fils, dans l’unique Trinité. Il est Dieu en nous, pour faire de nous des fils comme l’écrit l’Apôtre Pau l : « Et la preuve que vous êtes des fils, c’est que Dieu a envoyé dans nos cœurs l’Esprit de son Fils qui crie : Abba, Père ! » (Ga 4, 6).

20. Tout chrétien est appelé à progresser sur les chemins du salut ouverts par Jésus- Christ, en prenant appui sur la présence et la force de l’Esprit. L’initiative chrétienne est une initiation à l’expérience de l’Esprit donné à l’Église universelle, donné à chaque communauté vivant de ia Foi, de l’Espérance et de l’Amour, donné aussi à chaque famille chrétienne régénérée par la grâce du sacrement, donné enfin personnellement à chacun et chacune d’entre nous dans l’intimité de son cœur. Ainsi, celui qui prie, qui se rend attentif à la Parole de Dieu et à l’enseignement de l’Église interpellé par les signes des temps, marche dans la vérité et sauve sa vie de tous les discours trompeurs.

Le Salut de l’Homme en Jésus-Christ

21. Le salut que nous apporte Jésus-Christ ne se limite pas seulement à la guérison physique, mais il consiste surtout dans le pardon des péchés et la libération des trois convoitises humaines : l’argent, la chair et le pouvoir. On est libéré de la mort par le don de la grâce qui est une vie nouvelle : la vie éternelle qui commence dès ici-bas le jour du Baptême et trouve sa plénitude après la mort.

En effet, le Baptême nous incorpore à Jésus-Christ et nous introduit dans un nouveau système de relations, une nouvelle alliance avec Dieu, avec nous-mêmes, avec nos frères et nos sœurs. Le chrétien, conscient d’être libéré du mal, du péché et de la mort, est héritier d’une grande espérance dont il a la mission de faire partager à tous ses frères. Celui qui vit de cette espérance, sûr d’être pardonné de ses péchés, s’engage résolument dans un combat quotidien contre le règne des trois convoitises humaines : l’argent, la chair et le pouvoir.

Face à la mort, il sait proclamer et annoncer la résurrection. Adhérer à la personne du Christ Sauveur, c’est entrer dans le mystère de sa filiation divine et dans celui de sa mort et de sa résurrection. En effet, comme Fils de Dieu, Jésus-Christ nous introduit dans l’univers de la grâce, en nous faisant participants de la vie divine. Par sa mort et sa résurrection, Il ouvre au cœur même de notre mort, le chemin de la vie éternelle. Le chrétien sauve de la corruption toutes les grandes réalités terrestres. En se libérant de la convoitise de la chair, il sauve l’amour et la famille. En se libérant de celle de l’argent, il sauve le travail et favorise le partage. En se libérant de celle du pouvoir, il libère les fonctions sociales pour le meilleur service de la communauté humaine.

22. La volonté du Père, c’est de sauver tous les hommes qu’il a créés par amour et tout réconcilier dans le Christ. Le Christ nous invite à remettre nos vies dans les mains toutes-puissantes de Dieu, Maître du monde, du temps et de l’histoire. S’il est avec nous, qui sera contre nous ? (cf. Rm 8, 3 Iss). La vie n’est pas un piège, mais un don de Dieu.

C’est par Lui que nous sommes libérés de la peur des mauvais esprits et de toute angoisse. Nous croyons à la victoire du Christ mort et ressuscité sur toute puissance maléfique, et nous sommes invités à mener dans la foi le combat du Christ qui nous délivre de tout mal. C’est ainsi que, définitivement libérés, nous sommes disponibles pour nous engager, au nom du Christ, dans l’édification d’un monde nouveau et d’une terre nouvelle. En même temps qu’elle annonce la vie éternelle, l’Église invite les disciples du Christ à s’engager dans l’histoire, en travaillant chaque jour à la transformation des réalités terrestres.

23. La révélation chrétienne ne vient donc pas des rêves individuels, ni des inspirations laissées à la fantaisie des hommes. Elle nous vient par la tradition judéo-chrétienne transmise de génération en génération, sous la garde vigilante de l’Église à qui a été garantie l’assistance de l’Esprit-Saint qui mène à la vérité tout entière (cf. Jn 16, 13). Cette révélation sauve tout ce que nos coutumes et la sagesse de nos anciens contiennent des vérités et nous permet de le mettre en valeur. Ce n’est pas la coutume qui discerne l’Évangile, c’est l’Évangile qui discerne la coutume. Le lieu primordial où s’effectue le salut de l’humanité est la conscience de chaque personne humaine. Le royaume de Dieu est au-dedans de nous (cf. Le 17, 21). Mais pour avoir part aux sources du salut, chaque homme est invité à mettre sa conscience en état d’écouter, pour accueillir la nouvelle du salut proclamée dans l’Église.

Église et Sacrements

24. L’Église, Corps Mystique du Christ, est le moyen et le signe du salut : réconciliation et alliance nouvelle entre Dieu et les hommes. Cette réconciliation avec Dieu, avec soi-même, avec, ses semblables, est le lien de la paix et de la communion. Le salut que nous recevons personnellement, nous le vivons en Église et nous sommes appelés à sauver le monde, en Église. Nous qui avons été sauvés, nous devenons à notre tour sauveurs, artisans de paix et de réconciliation, en nous engageant dans la construction d’une Église visible, mais aussi dans la transformation du monde et dans le salut de nos frères ; unis dans le même esprit de communion, nous sommes appelés à faire de ce monde le lieu d’une vie fraternelle.

25. Avoir foi en l’Église, c’est aussi croire aux charismes qui lui sont propres pour le salut du monde : charisme de vérité (Magistère), charisme de discernement des signes des temps (Synodes), charisme d’unité (Église-communion), charisme de salut et de libération pour les pauvres et les malades (créativité du Peuple de Dieu). Ainsi, l’Église va au-devant des hommes, pour leur donner une réponse. 21- Nous signalons par ailleurs deux pôles de salut : un pôle sacramentel et un pôle historique.

- L’économie sacramentelle de l’Église Catholique s’organise autour de l’Eucharistie, source et sommet de la vie chrétienne. Elle commence par le Baptême et la confirmation. Elle se prolonge dans le sacrement de réconciliation, dans l’engagement du sacrement de mariage et de l’ordre, et dans la célébration du sacrement des malades.

- Quant au pôle historique, c’est notre engagement dans l’histoire ; là où Dieu nous place et où II nous veut. Il nous faut apprendre à discerner les signes des temps pour savoir comment, aujourd’hui, l’Église coopère au plan du salut. Croire, c’est en effet admettre que Dieu est à l’œuvre dans nos vies, dans le monde et dans l’histoire et y collaborer.

26. Cette foi que nous venons d’exposer ne rencontre pas toujours l’adhésion, des hommes. Au cours de sa vie terrestre, Jésus-Christ est déjà à lutter pour maintenir l’unité de son groupe. Aujourd’hui encore, il y a des « Thomas », des gens qui ne croient qu’à leur expérience propre, et n’accordent aucun crédit aux messages de l’Église (cf. Jn 20, 25b, 29). Dans nos cité et nos villages, il y a des gens qui, comme Pierre, sont primesautiers ou n’ont confiance qu’en leur propre initiative.

Toutes les propositions de leurs contemporains sont systématiquement repoussées, parce qu’ils s’estiment parvenus à un niveau supérieur de perception. Le Christ rappelle à tous que Dieu résiste aux orgueilleux et ne se révèle qu’aux tout-petits : « Je te bénis, Père, Seigneur du ciel et de la terre, d’avoir caché cela aux sages et aux intelligents et de l’avoir révélé aux tout-petits » (Le 10, 21 ).

27. Nombreux sont ceux qui n’aimeraient avoir des relations qu’avec Dieu seul : « Montre-nous le Père et cela nous suffit », dit Philippe (Jn 14, 8). Leur aspiration profonde est le contact direct avec Dieu. Ils n’apprécient pas du tout les intermédiaires humains vivants (l’Église), et ceux qui nous ont précédés (les saints). Ce sont les mêmes qui s’acharnent sur les images, les statues, les crucifix, le chapelet et les sacramentaux (eau bénite, bénédictions). Nous, membres de l’Église Catholique, disciples de Jésus-Christ, qui est Dieu fait homme, nous accordons une importance légitime et mesurée à tous ces intermédiaires que Dieu nous offre tout au long de notre histoire.

28. Enfin, nous sommes tous des « Judas » et des « Samaritaine » : nous trahissons et nous péchons. Nous avons donc à nous convertir, à nous renouveler. Rappelons- nous que le but de notre conversion est Jésus-Christ. Voilà, frères et sœurs, l’exposé de notre foi. Si nous n’avons pas hésité à vous le proposer dans un langage que vous pourrez trouver difficile, c’est que nous pensons que face à l’expansion des sectes, il est important de revenir à nos sources : notre Foi Catholique.

III- INCOMPATIBILITÉ ENTRE LA FOI CATHOLIQUE ET LES SECTES

29. Plusieurs chrétiens pensent qu’après tout, ce n’est pas renier son Baptême que d’adhérer à une secte, surtout si celle-ci affirme que ses adeptes peuvent continuer à prier dans leur Église d’origine. A ce propos, l’Apôtre Paul nous met en garde quand il dit : « Le Christ tel que vous l’avez reçu, Jésus le Seigneur, c’est en Lui qu’il vous faut marcher, enracinés et édifiés en lui, appuyés sur la foi telle qu’on vous l’a enseignée, et débordant d’action de grâces. Prenez garde qu’il ne se trouve quelqu’un pour vous réduire à l’esclavage par le vain leurre de la philosophie, selon une tradition toute humaine, selon les éléments du monde, et non selon le Christ » (Col. 2, 6-8) ; cf. aussi (1Tm 6, 3-5).

Pour nous Catholiques, la source de la vérité est la parole de Dieu contenue dans les Saintes Écritures et la Tradition de l’Église, comme le souligne le Concile Vatican II : « La Sainte Tradition et la Sainte Écriture constituent un unique dépôt sacré de la Parole de Dieu confiée à l’Église... » (cf. Del Verbum ou la Révélation Divine, n° 10).

30. Même si les Sectes ne s’opposent pas de la même façon à la Foi Catholique, nous émettons le principe général suivant : Toute participation à la vie des Sectes est un reniement de son Baptême et un manque de confiance au Christ qui est le « Chemin, la Vérité et la Vie ». (Jn 14, 6a). Point n’est besoin de chercher ailleurs le fondement de notre salut, puisque la révélation de Jésus-Christ est au cœur de notre foi : « Et si le Christ n’est pas ressuscité, vaine est notre foi ». (1Co 15, 17).

Nous le croyons : le Corps de Jésus a été déposé dans le tombeau après sa crucifixion ; et il n’y est pas resté prisonnier de la mort. Personne n’est venu enlever son corps et pourtant II en est sorti grâce à Dieu. Bien plus, Il est apparu à ses amis (cf. 1Co 15, 6). Aussi pouvons-nous affirmer que la connaissance la plus sûre sur Dieu et sa vérité est celle que chacun de nous peut trouver dans l’Écriture lue correctement et dans la vie chrétienne vécue grâce à la rencontre personnelle avec le Christ.

31. Nous déplorons une certaine lecture hâtive et fondamentaliste de l’Écriture qui isole certains versets bibliques de leur contexte. C’est ainsi qu’on aboutit à des conclusions erronées comme celles de la théorie de la réincarnation appelée aussi métempsychose ou transmigration des âmes. On prétend en effet que la réincarnation d’un homme dans plusieurs existences est fondée sur l’Écriture !

a) - Le principal argument avancé à ce propos est tiré des textes bibliques parlant du retour d’Élie le prophète. De fait le prophète Malachie annonçait : « Voici que je vais vous envoyer Élie le prophète, avant que n’arrive le jour de Yahvé, grand et redoutable » (Ml 3, 23). Or jésus affirme : « Elle doit venir... Or, je vous le dis, Élie est déjà venu... » (Mt 17, 11-12). On conclut alors que Jean-Baptiste n’est autre qu’une incarnation d’Élie. De là on généralise et on affirme que la théorie de la réincarnation est fondée sur l’Évangile. Mais on se garde bien de lire tous les autres versets de l’Écriture concernant le même sujet ; cela est maintenant regrettable.

b) - A la question posée par les prêtres juifs et les lévites : « es-tu Élie ? » Jean- Baptiste lui-même répond : « Je ne le suis pas » (cf. Jn 1, -21). Voilà une réponse claire à tous ceux qui trouvent que l’Écriture affirme la réincarnation d’Élie en la personne de Jean-Baptiste. Entre Jean-Baptiste et Élie, il ne s’agit pas d’une continuité d’être, mais d’une continuité de fonction dans l’histoire de la révélation. Le rôle d’annoncer la venue du Messie prédit par le prophète Malachie, en parlant d’Élie, est rempli par Jean-Baptiste. La théorie de la réincarnation est également réfutée par l’Épître aux Hébreux : « Les hommes ne meurent qu’une fois, après quoi il y a un jugement » (He 9, 27).

c) - La Tradition de l’Église abonde d’ailleurs en citations condamnant la doctrine de la réincarnation qui était très répandue dans les premiers siècles de notre ère. Les Pères latins Tertullien, Ambroise, Jérôme, les Pères grecs Grégoire de Nazianze, Jean Chrysostome et Irénée de Lyon, ainsi que les Grecs d’Alexandrie ne cessent de dire que la réincarnation est contraire à la Vérité divine. Cette doctrine de la réincarnation fut condamnée dès le VIème siècle, au Concile de Constantinople (543), puis au Concile de Lyon (1245-1274) et à celui de Florence (1439-1442).

d) - Nous croyons à la résurrection de la chair et à la vie éternelle ; et ceci parce que Jésus, mort et ressuscité, est apparu avec son corps, montrant les traces de sa crucifixion. Il révèle ainsi qu’il n’y a pas de réincarnation, mais que chacun vivra en Lui avec son corps glorifié pour l’éternité.

D’ailleurs l’accroissement considérable du nombre d’hommes sur la terre est un démenti formel à la doctrine de la réincarnation. Toutes ces croyances erronées auxquelles les sectes portent crédit sont fermement réprouvées par l’Église Catholique parce qu’elles vont à rencontre de la vraie foi en Dieu le Père, Dieu le Fils et Dieu l’Esprit-Saint. Trop de chrétiens se laissent séduire par des voix infidèles à la Tradition de l’Église. Cela arrive très souvent parce qu’ils ignorent le contenu de leur foi et qu’ils sont prêts à accepter n’importe quelle doctrine (cf. 2 Tm 3, 14-15).

Le salut a été réalisé une fois pour toutes par Celui qui a donné sa vie pour la multitude. L’avènement du Christ est le grand événement de l’histoire du monde. Il transforme l’histoire du monde en histoire du salut.

IV- LES ORIENTIONS PASTORALES

31. Il faut maintenant discerner les appels contenus dans ces signes des temps que sont les sectes. Nous avons dit que les sectes naissent avec la crise de la culture, de la société, de la politique, de l’économie et des Églises. Elles sont comme une réaction instinctive de survie et le symptôme de l’inévitable inquiétude métaphysique et religieuse inhérente à tout homme comme le souligne le Pro-Nonce Apostolique, Son Excellence Beniamino Stella, lors de son allocution à l’ouverture de la présente Session plénière, le 18 avril 1988 : « vous voici confrontés à un phénomène social d’une extrême complexité, qui plonge ses racines dans les mystères des consciences individuelles, comme dans les profondeurs de la culture, et qui s’alimente à toutes les angoisses qui minent nos sociétés en crise : crise familiale, crise spirituelle, crise sociale et politique, crise de la civilisation et de la culture. Ce phénomène est celui du pullulement des sectes dans votre pays. Ce phénomène n’est pas seulement congolais, toute l’Afrique est atteinte ; le monde entier est atteint. »

32. Devant la misère de notre société congolaise contemporaine, l’espoir d’une issue demeure intact. Les intellectuels, les fonctionnaires, les ouvriers, les chômeurs, les femmes, les jeunes et tous les nécessiteux - qui paraissent être les catégories les plus touchées - vont vers les sectes pour trouver une certaine réponse à leurs problèmes ou leurs questionnements.

Les sectes semblent planter leurs tentes sur les terrains ignorés ou délaissés par l’Église (mystère, transcendance, réincarnation, sorcellerie, magie...). Même s’il n’est surtout qu’apparent, fragile et même éphémère, leur « succès » nous invite à faire notre examen de conscience et à mieux préciser nos désaccords et nos refus. Certes, nous faisons déjà beaucoup dans notre Église pour vivre notre foi et pour venir en aide à tous ceux qui souffrent de toutes sortes de maux et de détresses. Mais reconnaissons que ce qui se fait demeure insuffisant. Nous pouvons et nous devons faire mieux. C’est là le sens de ce que nous allons dire maintenant.

33. Pour que notre travail pastoral soit plus efficace, interrogeons-nous sur ce que les sectes proposent et qui explique leur « succès ». Ce « succès » doit être pour tout pasteur, catéchiste et laïc congolais une interpellation. Les fidèles qui nous quittent pour les sectes sont profondément déçus de ne pas toujours trouver chez nous les valeurs que les nouveaux mouvements religieux leur offriraient.

Ainsi trouvent-ils là-bas :

a) - une communauté bien accueillante qui change de l’anonymat et du caractère impersonnel de beaucoup de nos paroisses et de nos assemblées actuelles. Ceux qui y vont sont souvent des personnes souffrant de solitude, d’incompréhension ou encore de maladie.

b) - des ministères qui sont plus à la portée de tous, car la division en Clergé et Laïcat semble absente ou moins rigide ; tous paraissent avoir un rôle à jouer et cela stimule l’intérêt de chacun pour la communauté.

c) - des rites religieux et un sens du sacré qui les ouvrent à une expérience mystique, à une rencontre avec la divinité. On constate un espace réel fait à la rencontre personnelle et communautaire avec Dieu, à l’émotion religieuse collective et contagieuse.

d) - des guérisons et des mouvements de conversion. Toutes les religions veulent libérer l’homme et elles revendiquent une prédication accompagnée d’œuvres de puissance, particulièrement les guérisons. Il semble qu’il y ait des témoignages de conversion.

Comment répondre à tous ces appels ?

34. Pour nous Pasteurs de l’Église, une lecture attentive, une longue méditation du chapitre 345 du prophète Ezéchiel doit être une première réponse. Nous y découvrirons un visage, une manière d’être Pasteur qui, sans négliger les brebis demeurées fidèles à l’Église, favorisera notre conversion et notre regard sur nos frères et sœurs qui appartiennent aux sectes. A ce propos, nous rejoignons la pensée du Pro-Nonce dans l’allocution citée plus haut : « Dans notre effort de discernement, nous devons aussi savoir reconnaître nos propres enfants, ceux qui se sont séparés de nous et ceux qui, à travers les sectes, se sont en réalité mis en chemin et marchent vers nous à la rencontre du Christ ».

Cela nous aidera à redynamiser le ministère d’accueil dans nos communautés paroissiales où chaque chrétien, chaque fidèle sera accueilli, soutenu, accompagné tel qu’il est. Nos communautés paroissiales retrouveront le sens de l’accueil et de la communauté propres à nos coutumes traditionnelles. Nous félicitons tous les mouvements d’apostolat et les communautés de base pour leur effort d’entraide mutuelle, signe concret de la charité fraternelle que nous exige le Christ. Mais nous leur demandons de faire davantage.

35. L’initiation chrétienne dans nos catéchuménats d’écoliers, de jeunes, d’adultes doit être renouvelée : Dieu est une personne vivante que l’on cherche avant d’être un énoncé enfermée dans une définition. L’initiation chrétienne est un cheminement dans cette rencontre, rencontre que devront favoriser nos homélies et notre catéchèse. Par le Baptême, Dieu nous a tout donné ; il nous faut encore accueillir ce don et le faire fructifier.

Or ce que nous désirons, c’est que Dieu vienne magiquement donner la solution à nos problèmes de l’existence quotidienne. C’est une illusion, car II nous a laissés libres de vivre dans son amour ou de le refuser ; Il nous prend comme des collaborateurs libres. Nous ne devons pas travailler seuls. Il faudra associer les laïcs qui apprendront ainsi à se mettre au service de leurs communautés et à travailler avec enthousiasme pour leur Église. Il nous faut chercher comment nos liturgies peuvent laisser plus de place à l’initiative personnelle, à la prière silencieuse ou spontanée, tout comme à l’expression corporelle de l’assemblée.

36. Nous devrons aussi nous remettre devant les yeux la finale de l’Évangile de Marc : « allez dans le monde entier, proclamez l’Évangile à toute la création. Celui qui croira et sera baptisé, sera sauvé ; celui qui ne croira pas sera condamné. Et voici tes signes qui accompagneront ceux qui auront cru : en mon nom Us chasseront les démons, ils parleront en langues nouvelles, Us saisiront des serpents, et s’ils boivent quelque poison mortel, ii ne leur fera pas de mal ; ils imposeront les mains aux infirmes et ceux-ci seront guéris » (Me 16, 15-18).

Ce texte nous interpelle : « De qui s’agit-il ? » Dans nos réunions entre Pasteurs, une lecture partagée de ce passage doit nous aider à donner les réponses qu’attendent nos frères sur le ministère de guérison. Nous encourageons la revalorisation du sacrement et de la messe pour les malades, ainsi que l’adoration du Saint- Sacrement.

37. Pour vous catéchistes et autres laïcs engagés participant à la vie de nos communautés, ce phénomène des sectes suscite-t-il un intérêt ? Est-ce votre problème ? Il nous semble que vous vous en déchargez bien volontiers sur vos pasteurs. Or il nous concerne tous, Pasteurs et Laïcs. Le dernier Synode des Évêques sur les Laïcs, par les documents, les réflexions qu’il nous apporte, nous permet de poser les vraies questions sur les rapports entre pasteurs et laïcs, sur nos responsabilités respectives.

Votre effort devrait porter :

38. Sur la formation. Il serait opportun que les commissions de catéchèse se remettent à jour sur les nouvelles questions d’aujourd’hui, en complétant les leçons sur la création et la science, la résurrection et la réincarnation, la foi en Jésus-Christ et la sorcellerie, la révélation (vérité biblique et vérité dite cachée). Et que les laïcs aient le souci de continuer à se former pour approfondir leur foi.

Beaucoup de nos frères qui sont dans les sectes, y sont allés en effet par ignorance, ignorance de la tactique des sectes, ignorance de nos propres richesses. Devant les sectes, nous nous apercevons, nous Catholiques, que nous ressemblons à des parents qui ont chez eux de la nourriture pendant que les enfants sont dehors à la chercher. C’est l’occasion pour nous de regarder ce que nous avons hérité de la longue Tradition de l’Église et d’en saisir l’opportunité pour aujourd’hui.

L’ancien ministère de « portier » correspondrait aujourd’hui au service des surveillants dans nos Églises. Ne pourrait-on pas envisager que ces surveillants d’église constituent un groupe plus structuré et plus disponible pour l’accueil dans tous les sens du terme ? D’autre part, après avoir pris connaissance de la déroute spirituelle de nombreuses personnes, il faudrait créer un ministère d’accompagnement dont nous avons redécouvert l’importance grâce aux groupes du Renouveau Charismatique. Nous ne pouvons pas enfin nous nourrir vraiment de la Parole de Dieu sans de vrais lecteurs avisés, formés au sens de l’Écriture. Ce qui suppose la fréquentation assidue des cours de Bible. Comme le ministère d’exorciste n’est réservé qu’au prêtre, il n’empêche que certains laïcs accompagnent ce dernier pour les prières de délivrance.

39. Sur la communauté. Dans nos communautés paroissiales, de quartier ou de village, nos frères se dirigent plus volontiers vers une secte lorsqu’ils ont des problèmes de solitude, d’incompréhension, de maladie ou de sorcellerie. N’est-ce pas le signe que dans nos communautés ecclésiales nous n’avons pas su réaliser l’esprit de la « première communauté chrétienne » où tous se « montraient assidus à l’enseignement des Apôtres, fidèles à la communion fraternelle, à la fraction du pain et aux prières » ?(AC 2, 42). Posons-nous la question : « Nos communautés ont-elles encore une âme » ?

40. Le chemin à suivre pour répondre à cette interpellation des sectes est la conversion de toutes nos vies chrétiennes et le renouvellement de toutes nos communautés de base, de quartier, de paroisse et de village.

Nous vous l’avions déjà demandé et dans notre Message de Loubomo en 1986 et dans la Lettre sur le Renouveau Charismatique, en 1987. Puisse notre appel être de nouveau entendu cette année. Notre Église, Évêques, Prêtres et Laïcs a un besoin urgent de conversion et de témoignage. Les vrais témoins surgiront des communautés vivantes et rayonnantes de foi, de prière et d’amour. Qu’en cette Année Mariale, la Reine des Apôtres, Mère de l’Église et Vierge fidèle, garde notre Église congolaise dans l’unité, la fidélité et la paix.

Fait à Pointe-Noire, le 23 avril 1988

 

Les Évêques du Congo

Mgr. Barthélémy BATANTU Archevêque de Brazzaville, Président de la Conférence Épiscopale du Congo.
Mgr. Georges-Firmin SINGHA Évêque d’Owando.
Mgr. Hervé ITOUA Évêque de Ouesso.
Mgr. Ernest KOMBO Évêque de Nkayi, Administrateur Apostolique de Pointe-Noire.
Mgr. Anatole MILANDOU Évêque de Kinkala.

 

 

 


 
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