CONFÉRENCE ÉPISCOPALE DU CONGO


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MESSAGE D’ÉVÊQUES SUR LES ANTIVALEURS - AVRIL 2013

mardi 5 mai 2020

PAROLES D’ÉVÊQUES N° 34
MESSAGE DES ÉVÊQUES DU CONGO A L’ISSU DE LA 41ÈME ASSEMBLÉE PLÉNIÈRE,
TENUE À BRAZZAVILLE DU 8 AU 14 AVRIL 2013

PRÉAMBULE

Réunis pour la 41ème Assemblée Plénière à Brazzaville, du 8 au 14 avril 2013, nous, Évêques de la Conférence Épiscopale du Congo (C.E.C.), vous adressons à vous tous, prêtres, religieux et religieuses, fidèles laïcs du Christ, hommes et femmes de bonne volonté, ce message d’interpellation et d’espérance sur la situation sociale de notre pays.

1- En jetant un regard sur notre pays, le constat est qu’il y a une accumulation de maux ; que les valeurs humaines, ancestrales et chrétiennes d’équité, de justice, d’honnêteté, de loyauté, de pudeur, cèdent la place aux antivaleurs de corruption, d’incivisme, de déviances sexuelles, d’impunité, etc. Ces antivaleurs - déjà dénoncées dans nos messages antérieurs - restent virulentes, actuelles, nocives et interpellantes pour la société toute entière. Il faut, par ailleurs, signaler que l’Église n’est pas l’unique institution à faire ce triste constat et à proposer des pistes de réflexion.

2- C’est pourquoi, en cette année de la foi, décrétée par le Pape Benoît XVI, nous venons vous inviter à une prise de conscience. En effet, une société qui ne se donne pas les moyens appropriés pour vaincre les maux dont elle souffre, court à sa propre ruine. L’Église en vertu de sa mission spécifique reçue du Christ ne peut rester silencieuse ni indifférente face à ce drame. Elle veut accomplir son humble service au monde et à la société, en proposant des principes de réflexion, des critères de jugement et des directives d’action qui relèvent de sa doctrine sociale, pour que les changements profonds que requièrent ces diverses situations de misère morale, soient accomplis pour le bien de tous . C’est aussi de cette manière qu’elle veut être lumière au milieu du monde (cf. Is 49,6 ; Mt 5,13-14).

3- La célébration du cinquantenaire de notre indépendance a ouvert, peut-on dire, une ère nouvelle de notre histoire qui appelle ou exige des comportements nouveaux. Il nous faut, à nous tous, un véritable sursaut national. Tous les corps sont concernés : le social, le politique, le religieux, etc. Nous sommes tous appelés à une conversion profonde de notre mentalité et de notre intelligence, une orientation de tout notre être vers le Christ.

I- NOS PRISES DE POSITION ANTÉRIEURES

4- Le message que nous vous adressons aujourd’hui, s’inscrit dans la ligne de notre enseignement ordinaire, comme pasteurs d’une Église qui a été confiée à notre sollicitude. Il vient s’ajouter à ceux que nous vous avons déjà transmis dans le passé. Ceux-ci nous ont toujours indiqué les valeurs sur lesquelles construire notre vie individuelle et collective. Ils nous ont toujours invités à l’espérance, à une conversion profonde des comportements et à un engagement conséquent au service du bien commun. Jésus-Christ nous invite de manière pressante à sortir du sommeil de la routine, des " ténèbres " pour passer à la lumière et de porter la lumière là où il fait encore nuit.

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Qu’avons-nous déjà dit dans le passé ?

1) Message des Évêques du Congo lors de la célébration du Centenaire de l’Évangélisation du Congo :

Un message de foi et d’espérance ! Nous en appelions à un effort de renouveau : dans la foi, dans la prière, dans la vie en famille. Renouveau aussi dans l’engagement en société : Chrétiens, distinguez-vous par votre sérieux et votre ardeur au travail. Tout ce qui sert la paresse, l’inconscience professionnelle, l’irresponsabilité, la corruption, le tribalisme, ne doit pas avoir de place dans votre vie (Loubomo, 6 mars 1983).

2) Engagement politique, non-violence, fraternité :

Face à l’engagement politique, à la non-violence et à la fraternité, nous invitions les chrétiens à être présents (…) activement et effectivement, mais sans jamais compromettre leur foi ni les intérêts majeurs de l’Église et de la Nation (Brazzaville, 20 novembre 1990).

3) Message de paix et de réconciliation :

Nous adressions un appel pour un Congo nouveau, juste et fraternel : Du plus haut responsable au plus petit, nous avons à nous ré-imprégner des exigences morales indispensables à toute vie en société : Tu ne tueras pas, Tu ne voleras pas, Tu ne mentiras pas. Et de poursuivre : Ce sursaut moral est une nécessité pour tous, c’est le gage sûr de l’avenir de notre pays (n° 7 et 8), (Brazzaville, 6 août 1993).

4) Appel à la reconstruction :

Nous étions revenus sur les valeurs morales de reconstruction : La débâcle du peuple est avant tout un problème spirituel et moral avant d’être un problème de stratégie diplomatique et militaire. Un seul mot résume, pour les prophètes de la Bible, le désastre du peuple : L’infidélité ! Infidélité à Dieu qui signifie en même temps mépris de son frère (n° 2, 2). Et de conclure qu’on ne peut croire sans aimer, qu’on ne peut aimer en mentant, en volant, en tuant ; qu’on ne peut être chrétien sans être artisan d’amour, de justice et de paix (n°3, 6). (Dolisie, 20 mars 1994).

5) Le discernement chrétien devant les choix :

L’Église, rappelions-nous dans ce message, profondément insérée dans la société, partage ses joies et ses peines. Nous inspirant de l’exhortation de Paul aux Romains de ne pas se modeler sur le monde présent, mais de se laisser transformer par Dieu, pour discerner sa volonté et ce qui lui plaît (cf. Rm 12, 2), nous invitions à lire les signes des temps : Le peuple de Dieu s’efforce de discerner dans les événements, dans les exigences et les requêtes de notre temps… les signes véritables de la présence ou du dessein de Dieu " (GS n° 11). " (…) le Seigneur nous dit, à quoi devons-nous être attentifs pour organiser notre vie dans le monde d’aujourd’hui, pour vivre au Congo en ces temps-ci (Brazzaville, 26 avril 1997).

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II- AUJOURD’HUI, POURQUOI CETTE PRISE DE POSITION ?

1) Étroite solidarité de l’Église avec l’ensemble de la famille humaine

Les joies et les espoirs, les tristesses et les angoisses des hommes de ce temps, des pauvres surtout et de tous ceux qui souffrent, sont aussi les joies et les espoirs, les tristesses et les angoisses des disciples du Christ, et il n’est rien de vraiment humain qui ne trouve écho dans leur cœur .

5- Si l’Esprit du Seigneur est sur notre Église, ne sera-t-elle pas, elle aussi, malgré ses faiblesses, porteuse de Bonne Nouvelle et d’espérance au monde, au pays ? Le Christ est lumière des nations, et nous demande, à notre tour, d’être sel de la terre et lumière du monde (cf. Mt 5,13.14). L’Église dans le monde de ce temps ne peut demeurer spectatrice, observatrice.

D’ailleurs, le but de ses multiples activités est d’amener les chrétiens à vivre la Bonne Nouvelle au quotidien. L’annonce de l’Évangile n’est pas pour faire rêver mais pour éveiller les consciences et appeler à plus de responsabilité, pour vouloir contribuer à faire des hommes et des femmes heureux, libres et responsables.

Aux Galates, Paul dit qu’ils ont été appelés à la liberté, pour se mettre au service les uns des autres par l’amour (cf. Ga 5,13-16).

Frères et sœurs, nous devons donc nous laisser toucher par l’Évangile, lumière de la vie ; et que cette grâce nous aide à changer nos cœurs et nos comportements.

2) Regard sur la situation actuelle de notre pays

6- Prise dans le vaste mouvement du monde, notre société congolaise n’est pas à l’abri de certains errements à telle enseigne qu’il est parfois difficile de parler encore de vie morale. C’est une crise profonde qui sévit dans le cœur de l’homme et qui s’exprime à travers la dépravation et la dégradation des mœurs. Nous nous arrêtons à cinq antivaleurs qui nous paraissent caractéristiques.

a) La Corruption

7- Par corruption, on entend le fait pour une personne investie d’un pouvoir, de recevoir des pots-de-vin pour des avantages personnels. Qu’elle soit passive ou active, elle est un phénomène mondial complexe, et elle demeure un facteur qui compromet considérablement le développement d’un pays. Mais aucune raison ne saurait justifier ce phénomène qui a cours dans notre société. En effet, tous les secteurs sociaux sont malheureusement gangrenés par la corruption. Comment comprendre le paiement de 10 à 20% pour le retrait de sa pension de retraite, la perception de pourboires pour les actes administratifs comme le passeport pourtant déclarés gratuits par le Chef de l’État, les exactions de la police routière ou les usagers de la route en porte à faux, cherchant toujours à soudoyer pour se tirer d’affaires, l’accueil, les soins dans les services sanitaires publics conditionnés par le paiement d’argent ? Et la liste n’est pas exhaustive.

En suivant les référentiels sur la lutte contre la corruption établis au niveau international par des études indépendantes , la République du Congo est passée de l’indice 2,3 en 2004 (113ème rang sur 133 pays) à l’indice 2,1 en 2010 (154ème sur un total de 178 pays). Une note inférieure à 3 indique une corruption perçue comme endémique. Et cela montre que la corruption est devenue une pratique culturelle ; considérée comme normale dans notre pays.

8- Les causes de ce phénomène sont, avant tout, la mal gouvernance, l’appât du gain, et dans une certaine mesure, la convoitise (cf. Mi 2,2). Dans un monde où règnent la corruption, la tricherie, la malhonnêteté souvent dictées par les urgences de survie, le témoignage d’honnêteté, de transparence prend souvent les traits d’un véritable martyre.

La conséquence la plus flagrante se fait sentir sur le plan aussi bien économique que social. En effet, la corruption bloque la croissance économique et compromet le bien-être social. L’incertitude du lendemain s’accroit.

b) L’Incivisme

9- L’incivisme, c’est le fait de manquer de dévouement à l’intérêt public, de ne pas privilégier les intérêts généraux au profit des intérêts personnels.

L’incivisme se traduit, entre autres, de la manière suivante : scènes de vandalisme, de pillage, de vol de biens publics ou privés, comme cela arrive lors des troubles sociopolitiques ; la non-assistance à personne en danger, la maltraitance des personnes âgées, le mutisme face à certaines scènes dont on a été soi-même victime ou témoin ; le phénomène de cris, de danses, de tenues obscènes et des nuisances sonores lors des veillées mortuaires, l’exhibitionnisme ; la musique bruyante des bars dancing et autres bistrots jusqu’à des heures tardives dérangeant le repos du citoyen ; les abus de pouvoir relevant des autorités publiques.

10- Nous relevons également comme actes d’incivisme l’inobservance des règles d’hygiène dans les lieux publics susceptible de provoquer des maladies graves - comme la rougeole, le choléra, la fièvre typhoïde - et la pollution de l’environnement : les rues devenues des dépotoirs et les fossés, des vidanges.

c) Les déviances sexuelles

11- Les déviances sexuelles s’entendent comme des comportements et des pratiques sexuelles non conformes aux règles et normes de la société. Dès lors, elles sont toutes des voies conduisant vers la souillure du corps et de l’âme. Les plus courantes constatées dans notre pays sont les suivantes : débauche, viol, inceste, homosexualité, pédophilie.

Ces déviances manifestent un non apprentissage des vertus, notamment celles de la force et de la tempérance, et la maîtrise de soi. Ou l’homme apprend à dominer ses passions et obtient la paix, ou il se laisse asservir par elles et devient malheureux. C’est dans le même sens que saint Paul nous invite à ne pas marcher sous l’emprise de la chair (cf. Rm 8,5-6).

Par ailleurs, nous sommes aujourd’hui témoins de ce que l’on peut appeler la civilisation de la dépravation des mœurs. L’acte sexuel par lequel l’homme et la femme se donnent l’un à l’autre au sein du mariage comme communauté d’amour pour leur propre épanouissement et pour participer à l’ordre du créateur est de plus en plus banalisé et chosifié.

d) L’impunité

12- L’impunité est aussi une des choses courantes dans le quotidien des congolais. Elle est également à ranger parmi les antivaleurs. Tout le monde le constate, le déplore et pourtant on risque bien de la considérer paradoxalement comme " normal ".

Ce mal peut être défini comme une pratique pernicieuse et systématique de non-sanction des délinquants, une absence de répression, de sanction des auteurs pour leurs actes. Cette pratique ne requiert chez nous aucune enquête. Elle s’avère également nuisible et dangereuse pour la société et est courante dans tous les domaines.

13- Au niveau familial, il y a des parents qui sont impuissants face à l’inconduite de certains des leurs. Le fait justement de ne pas réprimer les comportements déviants, lorsque ceux-ci sont affichés, constitue une forme d’impunité. Ils oublient que cela est lourd de conséquence pour l’avenir de leur progéniture. C’est en ce sens qu’on parle de crise de l’autorité parentale.

Et pourtant, nous enseignent les Écritures, l’éducation est une tâche exaltante et enthousiaste, un travail que Dieu lui-même a délégué fondamentalement aux parents. C’est un travail exigeant, patient et joyeux, non exempt de difficultés et qui devrait inciter les parents à demander la lumière du Seigneur (cf. Ep 5, 22- 6, 9). Éduquer c’est porter à leur plénitude les potentialités qui résident chez chacun des enfants : les aider à découvrir l’importance de se soucier des autres, leur apprendre à créer des rapports authentiquement humains, à vaincre la peur de s’engager… En définitive, rendre chacune et chacun apte à répondre au projet de Dieu sur sa vie.

14- Au niveau des services administratifs, scolaires et universitaires, l’impunité reste manifeste. Les services coercitifs de l’État semblent impuissants face aux fautes professionnelles notoires, de non-respect des engagements pris, de manque de conscience professionnelle, d’absentéisme notoire, de travail mal fait, de banditisme, de vol, de concussion, de détournements de deniers et de biens publics, de violation de la constitution, etc. La protection d’individus passibles de sanctions ou de poursuites judiciaires est la meilleure façon de perpétuer les antivaleurs.

e) Les atteintes aux valeurs démocratiques

15- Depuis plus de deux décennies, un vent de démocratie souffle sur le continent. Notre pays n’est pas en reste. Nous saluons et félicitons tous les efforts qui sont accomplis en vue de la consolidation du processus démocratique. Toutefois, nous sentons le devoir de proposer quelques points de réflexion. Il est bon de rappeler que les élections sont un aspect très important du processus démocratique. Le jour du vote est d’une importance telle qu’on attend que les urnes donnent leur verdict accepté par tous. Que tout se dénoue et que les différents candidats soient départagés dans la transparence et la paix.

Notre jeune démocratie progresse. C’est le cas du respect des échéances électorales. Mais ce progrès porte en lui des insuffisances : mauvais découpage électoral, persistance des fraudes électorales, achat et/ou violation des consciences, l’inégalité de traitement des candidats et des partis dans le financement et l’accès aux média.

16- A titre illustratif, voici ce qu’a déclaré le Pape Benoit XVI au sujet des élections dans l’Exhortation issue du 2ème Synode spécial pour l’Afrique : (…) les élections constituent un lieu d’expression du choix politique d’un peuple et sont un signe de la légitimité pour l’exercice du pouvoir. Elles sont le moment privilégié pour un débat politique public sain et serein, caractérisé par le respect des différentes opinions et des différents groupes politiques. Favoriser un bon déroulement des élections, suscitera et encouragera une participation réelle et active des citoyens à la vie politique et sociale. Le non-respect de la Constitution nationale, de la loi ou du verdict des urnes, là où les élections ont été libres, équitables et transparentes, manifesterait un manque de compétence dans la gestion de la chose publique .

III- PROPOSITIONS

17- Les maux que nous avons tentés d’analyser ne peuvent être guéris par l’effet d’un coup de baguette magique. Ils requièrent des changements profonds : changement de mentalités, changement d’attitudes afin de retrouver la confiance, de réveiller le sens moral et d’éveiller au sens de la justice. Pour ce faire, il nous faut une volonté forte et déterminée, du sommet à la base.

Comme les foules qui venaient se faire baptiser auprès de Jean Baptiste lui demandaient : Que devons-nous faire ? (Lc 3,10), faisons nôtre cette interrogation, devant cette triste situation.

1) A la famille

18- Aux parents, pères et mères, votre rôle est irremplaçable. Nous venons de relever que l’éducation est la base de tout. Éduquer, c’est proposer des vertus : abnégation, ardeur au travail, loyauté, sincérité, pureté, respect …, en les présentant de manière attrayante, mais en même temps sans rabaisser le niveau d’exigence. C’est aussi motiver les enfants pour qu’ils fassent bien les choses, mais sans exagérer, sans dramatiser lorsque les échecs arrivent, en leur apprenant plutôt à en tirer une expérience. C’est les encourager à ambitionner des buts nobles, sans se substituer à eux dans leur effort. Et, surtout, développer l’auto-exigence, la lutte, une auto-exigence qui ne sera pas présentée comme un but en soi, mais comme un moyen d’apprendre à agir avec droiture et de manière autonome par rapport aux parents.

Aux enfants, vous devez obéissance et respect aux parents, aux éducateurs, à toute personne, aux lois de la République et cultiver le sens du travail bien fait ; notre pays compte sur vous.

2) Aux hommes politiques et aux gouvernants

19- Tout est favorable pour un Congo émergent. Les potentialités économiques et les ressources donnent à rêver : forêts denses, pétrole et autres minerais, vastes étendues de terres fertiles, hydrographie abondante, climat favorable ; environnement sociopolitique relativement apaisé… Mais hélas ! Nos conditions de vie laissent toujours à désirer et nous interpellent.

Il est utile de rappeler que pour l’exercice de la fonction politique, il faut être animé par le souci du bien commun. Dans ce sens la mal-gouvernance sera éradiquée si on revient aux valeurs fondamentales de la gestion de la cité. C’est ce que rappelait le Pape Jean Paul II aux hommes politiques et gouvernants africains : Les gouvernements ont, en particulier, le devoir imprescriptible de protéger le patrimoine commun contre toutes les formes de gaspillage et de détournement réalisés par des citoyens dépourvus de sens civique et des étrangers sans scrupules .

Hommes politiques et gouvernants, ayez le souci de créer les conditions de plein emploi, de veiller et de contrôler le fonctionnement des services mis à la disposition de la société, pour une plus grande efficacité.

3) A l’Église de Dieu qui est au Congo

20- Le Christ nous dit : Vous êtes le sel de la terre (…) Vous êtes la lumière du monde (Mt 5,13-14). Il demande que le sel que nous sommes ne puisse s’affadir dans les antivaleurs, et la lumière ne puisse sombrer dans la nuit de la complaisance et de la compromission.

Nous vous appelons à une conversion, à une metanoia. C’est vrai, même les chrétiens sont marqués par l’esprit et les habitudes de leur époque et de leur pays. Mais par leur baptême, l’Évangile les invite à renoncer aux tendances mauvaises dominantes. Ils doivent ramer à contre-courant . C’est cela être témoin. Le mystère pascal que nous célébrons actuellement nous fait entrer dans une nouveauté, une vie nouvelle : prendre conscience de notre dignité comme personne humaine et comme chrétien.

21- Au début de l’ère chrétienne, un auteur anonyme évoquait de cette manière le rôle des chrétiens dans la société. Les chrétiens ne se distinguent des autres hommes ni par le pays, ni par le langage, ni par les vêtements (…) Ils sont dans la chair, mais ne vivent pas selon la chair. Ils passent leur vie sur la terre, mais sont citoyens du ciel. Ils obéissent aux lois établies et leur manière de vivre l’emporte en perfection sur les lois (…) ce que l’âme est dans le corps, les chrétiens le sont dans le monde. L’âme est répandue dans tous les membres du corps comme les chrétiens dans les cités du monde. L’âme habite dans le corps et pourtant elle n’est pas du corps, comme les chrétiens habitent dans le monde mais ne sont pas du monde .

Le témoignage chrétien n’est pas facultatif. C’est une mission que nous avons reçue du Seigneur. Il dynamise notre vie et nous engage aux devants de nos frères et sœurs, pour leur apporter la lumière du Christ.

4) Aux hommes et femmes de bonne volonté

22- Chacun de nous doit conjuguer un état d’esprit permanent et un mode de vie en harmonie avec sa conscience et, par son engagement professionnel, collaborer efficacement au développement de notre pays trop longtemps assis au bord de la route qui conduit au développement.

Hommes, femmes et vous tous acteurs de la société civile, allez de l’avant dans ce que vous faites déjà pour la promotion des valeurs. Surtout, ne sombrez pas dans le pessimisme, la résignation ou la peur. La bénédiction de Dieu vous accompagne.

Au-delà du tableau sombre que nous avons dépeint plus haut, notre avenir est aussi entre nos mains : hommes d’État, hommes d’Église, fidèles laïcs du Christ, hommes et femmes de bonne volonté. Nous avons donc à œuvrer par la vérité de nos paroles, le changement de nos comportements, le sens du bien, l’ouverture réelle au dialogue.

5) A tous : ne vivre que de l’Amour de Dieu et du prochain

23- Gardons à l’esprit le double commandement de notre Seigneur Jésus Christ : Tu aimeras le Seigneur ton Dieu de tout ton cœur, de toute ton âme, et de tout ton esprit et tu aimeras ton prochain comme toi-même (Mt 22, 13).

Mère Teresa de Calcutta, commentant ce passage, affirme : Dieu est amour (1Jn 4,8). (…) Ce qui nous lie à Dieu est vraiment une relation d’amour. Et puis l’amour de Dieu est infini. Y avoir part c’est aimer et donner jusqu’à ce que cela nous en coûte. Voilà pourquoi il ne s’agit pas tant de ce que nous faisons que de l’amour que nous y mettons, de l’amour que nous mettons dans ce que nous donnons. Voilà aussi pourquoi les gens qui ne savent ni donner ni recevoir l’amour sont, quelles que soient leurs richesses, les plus pauvres des pauvres .

24- Cet amour nous établit gardiens de valeurs comme le déclare le Pape François : Nous sommes " gardiens " de la création, du dessein de Dieu inscrit dans la nature, gardiens de l’autre, de l’environnement ; ne permettons pas que des signes de destruction et de mort accompagnent la marche de notre monde ! Mais pour " garder " nous devons aussi avoir soin de nous-mêmes ! Rappelons-nous que la haine, l’envie, l’orgueil, souillent la vie ! Garder veut dire alors veiller sur nos sentiments, sur notre cœur, parce que c’est de là que sortent les intentions bonnes et mauvaises : celles qui construisent et celles qui détruisent !

CONCLUSION

25- Notre dignité est dans le service que nous rendons à nos frères et sœurs inspiré par les valeurs de l’Évangile. Le chrétien est bâtisseur d’une société nouvelle dont le fondement est Jésus - Christ. Notre grandeur est dans le travail bien fait. Notre avenir comme nation n’est possible que dans une vie imprégnée de vertus. Face aux antivaleurs, revenons à la source : l’Amour du Christ.

Que chacun se laisse interpeller par les difficultés morales de notre société, et par les souffrances de nos frères et sœurs.

Que l’Esprit nous inspire les paroles, les actes et les conversions nécessaires pour l’épanouissement moral de chacun et de tous, et que notre Église soit toujours porteuse de Bonne Nouvelle et d’Espérance.

Que la Vierge Marie, Reine de l’Église, Notre-Dame du Congo, protège notre beau pays !

Que Dieu Père, Fils et Esprit Saint vous bénisse sur la voie d’un renouveau moral et spirituel.

FAIT À BRAZZAVILLE, LE DIMANCHE 14 AVRIL 2013,
LORS DE LA MESSE DE CLÔTURE,
EN LA BASILIQUE SAINTE ANNE DU CONGO.

 

LES ÉVÊQUES DU CONGO

 


 
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